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Économie - Finance

La requête suisse auprès de la BDL a « forcément » donné lieu à un gel d’actifs

Les informations selon lesquelles les autorités helvétiques auraient divulgué les éléments de l’enquête sont fausses, a insisté le député zurichois Fabian Molina.

La requête suisse auprès de la BDL a « forcément » donné lieu à un gel d’actifs

La procédure suisse à l’encontre du gouverneur de la Banque du Liban aurait « forcément » donné lieu à un gel à titre conservatoire de certains actifs qu’il détient en Suisse. Photo João Sousa

C’était assez prévisible : la demande d’entraide judiciaire, adressée la semaine dernière par la Suisse au Liban, dans le cadre d’une procédure ouverte par le ministère public de la Confédération helvétique (MPC) pour « blanchiment d’argent aggravé en lien avec de possibles détournements de fonds au préjudice de la Banque du Liban », a continué d’alimenter le débat public durant le week-end écoulé.

Si aucun élément concernant le contenu du dossier n’a encore été officiellement communiqué, plusieurs sources ont néanmoins confirmé que la procédure avait « forcément » donné lieu à un gel à titre conservatoire de certains actifs détenus en Suisse par le gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé.

C’est en tout cas ce qu’a affirmé samedi le député zurichois membre du Parti socialiste suisse Fabian Molina au média en ligne libanais Daraj. Deux jours environ après avoir expliqué dans la presse de son pays qu’il était « peu probable que cette demande d’entraide soit lancée sans blocage préalable d’argent en Suisse », le parlementaire a indiqué à Daraj « savoir » qu’une partie des fonds du gouverneur avait été gelée, évoquant très succinctement le montant de 400 millions de dollars, qui avait été lâché mardi dernier par le quotidien al-Akhbar, lequel avait cité ses propres sources.

Selon une source proche du dossier, le député faisait alors référence aux informations publiées dans la presse libanaise. La source a également indiqué avoir appris que des actifs détenus en Suisse par le gouverneur avaient été gelés, mais sans avoir pu connaître les montants concernés.

Séparation des pouvoirs

Le député suisse, que nous avons contacté hier, a affirmé avoir appris l’existence de l’enquête mardi dans la presse libanaise avant que le MPC ne confirme le lancement de la procédure. « Les informations selon lesquelles les autorités suisses auraient divulgué les éléments de l’enquête sont fausses », a-t-il encore souligné, avant d’affirmer ne pas pouvoir donner davantage de précisions, pour « respecter la séparation des pouvoirs en Suisse », le pouvoir judiciaire étant désormais en charge du dossier.

« Tout ce que je peux dire, c’est qu’en vertu du droit suisse, des mesures doivent être prises pour éviter l’obscurcissement avant qu’une demande d’entraide judiciaire ne soit faite », a-t-il insisté. Le député zurichois a également réagi dans un communiqué publié sur son compte Twitter. « À l’issue d’un an de campagne pour faire réagir les autorités suisses, je suis satisfait de voir qu’il y a enfin du mouvement concernant le dossier des milliards de dollars volés aux Libanais (…) qui ont souffert de la pauvreté, de la violence et de la corruption pendant beaucoup trop longtemps, et qui méritent transparence complète et redevabilité (de la part de leurs gouvernants). » Le parlementaire, très engagé dans les dossiers liés à la corruption dans son pays, a appelé les autorités libanaises à coopérer pleinement avec celles de son pays sur ce dossier. Il a également exprimé l’espoir que le gouvernement suisse et la Finma, l’autorité fédérale de surveillance des marchés financiers, se manifesteront pour « prévenir des cas futurs de blanchiment d’argent impliquant des banques suisses. Il a enfin appelé les autorités américaines, britanniques, françaises, ainsi que celles du Liechtenstein et du Luxembourg à également « prendre les mesures adaptées ».

Rejet des accusations

Contactée, une source à la BDL a pour sa part rejeté toutes les accusations visant le gouverneur, estimant que le dossier était « monté de toutes pièces ». Une position calquée sur le contenu des déclarations officielles de la Banque centrale au cours de la semaine dernière à ce sujet. La source a en outre rappelé que le gouverneur avait été interrogé jeudi par le procureur général Ghassan Oueidate à qui le ministère libanais de la Justice avait transmis la demande d’entraide, selon la procédure prévue par la loi dans ce cadre (loi n° 33 de 2008 qui transpose les obligations souscrites par le Liban à la Convention des Nations unies contre la corruption – Uncac).

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Selon une source judiciaire interrogée par l’AFP, Riad Salamé aurait alors évoqué « des transferts ne dépassant pas les 240 millions de dollars, initiés en 2002 depuis des comptes personnels, pour financer une société fondée avec (son) frère ». Des propos également rejetés par la source à la BDL. Le gouverneur a, lui, récemment annoncé qu’il se rendra en Suisse pour répondre aux questions du MPC, un choix qui lui était ouvert par la réglementation internationale pour ce type de procédure et qui lui permettait aussi de répondre aux questions du parquet suisse sur le territoire libanais.

Si le MPC n’a pour l’instant effectué aucune annonce confirmant ou infirmant un éventuel gel de fonds appartenant au gouverneur ou à toute autre personne liée – les informations publiées au cours de la semaine avaient cité son frère Raja Salamé et sa conseillère Marianne Hoayek –, plusieurs sources concordantes assurent de leur côté que ce levier a « forcément été activé » au regard du contexte de l’affaire.

« Les institutions financières suisses – dont les banques – peuvent déclencher l’alerte lorsqu’elles constatent des mouvements de fonds inhabituels sur des comptes qu’elles gèrent et/ou qu’elles ont des doutes sur leur provenance », explique un spécialiste de ce type de procédure. « Le fait que le titulaire du compte soit une personne politiquement exposée (PPE), autrement dit quelqu’un chargé dans un pays ou une organisation donnée d’une fonction publique éminente, selon la définition du Groupe d’action financière (GAFI), oblige les banques a être plus vigilantes », poursuit-il. Les soupçons doivent, eux, porter sur de potentielles infractions de corruption, de gestion déloyale d’intérêt public, de délits d’initiés, de blanchiment d’argent, de financement du terrorisme, ou d’appartenance ou de soutien à une organisation criminelle – reconnue ou suspectée –, ou, dans une moindre mesure, d’évasion fiscale.

Gel non obligatoire

La banque doit alors transférer le dossier au Bureau de communication en matière de blanchiment d’argent (le MROS, pour Money Laundering Reporting Office Switzerland) qui doit étudier le dossier dans un certain délai pour soit le classer sans suite, soit le renvoyer au MPC. Ce type de procédure exclut à ce niveau toute ingérence des autres autorités suisses ou des services diplomatiques du pays, ces dernières jouant uniquement un rôle de relais.

Comme la Commission spéciale d’investigation libanaise, qui a le pouvoir de lever le secret bancaire dans certains cas de figure, le MROS est membre du groupe Egmont, un forum international dont la mission première est d’améliorer la coopération internationale en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Le MROS n’envoie pas systématiquement les demandes au parquet. Selon le dernier rapport publié sur le site de l’instance, moins de 40 % des 6 126 « rapports d’activités suspectes » ont été relayés au parquet en 2018 (mais plus de 40 % n’ont pas pu être traités en 2018 en raison de la forte hausse du nombre de rapports envoyés).

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« Quand un dossier est transféré au parquet par le MROS, cela veut dire qu’il y a déjà assez d’éléments pour justifier une enquête », relève un second expert interrogé. Une fois notifié, le MPC ouvre nécessairement une procédure pénale qui peut s’accompagner d’une décision de geler les actifs de la personne visée ou, si les éléments du dossier le justifient, de certains proches. « Le procureur n’est pas obligé d’ordonner ce gel, mais c’est à ses risques et périls, surtout si l’affaire est suffisamment grave », note encore le second expert. Il souligne enfin que le gel est préventif et qu’il ne constitue pas en soit un élément démontrant la culpabilité de celui qui le subit.

Le dossier est donc suspendu aujourd’hui à la procédure lancée par le MPC, et il est assez difficile de spéculer sur la suite des événements avec les maigres informations connues. Enfin, si aucun élément ne permet pour le moment de confirmer le montant de 400 millions de dollars évoqué depuis que l’affaire a fuité dans les médias, une enquête datée de 2016 sur la fortune du gouverneur – et que ce dernier avait qualifiée de fausse – avait fait état d’un transfert d’un montant similaire par Marianne Hoayek à Raja Salamé. La filiation du rapport publié de façon anonyme avait été attribuée par la BDL au spécialiste français de la veille économique, Cristal Crédit, qui a formellement démenti, il y a environ un an, y avoir jamais contribué.



C’était assez prévisible : la demande d’entraide judiciaire, adressée la semaine dernière par la Suisse au Liban, dans le cadre d’une procédure ouverte par le ministère public de la Confédération helvétique (MPC) pour « blanchiment d’argent aggravé en lien avec de possibles détournements de fonds au préjudice de la Banque du Liban », a continué d’alimenter...

commentaires (8)

Quand la justice suisse soupçonne un non-résident, elle bloque forcément les comptes avant de poser les questions, sinon ça serait facile pour l'accusé de transférer son argent et de ridiculiser la justice !

Shou fi

22 h 40, le 25 janvier 2021

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Commentaires (8)

  • Quand la justice suisse soupçonne un non-résident, elle bloque forcément les comptes avant de poser les questions, sinon ça serait facile pour l'accusé de transférer son argent et de ridiculiser la justice !

    Shou fi

    22 h 40, le 25 janvier 2021

  • Salamé doit, au pire, être au courant de toutes les malversations de tous nos chers “PEPs”. Reste à savoir s’il va oser les dénoncer pour tenter de sauver au moins une partie de "sa" fortune, ou s’il aura plus peur de se faire descendre dans son parking parl’un ou l’autre (ou plusieurs) de ses co-conspirateurs...

    Gros Gnon

    17 h 43, le 25 janvier 2021

  • LES SEULES SOMMES NON SEULEMENT BLOQUEES MAIS CONFISQUEES ET VOLEES DANS LE PAYS ET TRANSFEREES A L,ETRANGER SOUS DES NOMS DIVERS D,ALIBABAS MAFIEUX SONT LES ECONOMIES D,UNE VIE DES DEPOSANTS LIBANAIS AUPRES DES PREDATEURS BANQUIERS ET LEURS COMPLICES LES CORROMPUS VOLEURS GOUVERNANT LE PAYS SOUS DES MANDATS MAFIEUX.

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 57, le 25 janvier 2021

  • il me revient que ce pays-la suisse- aurait "accepte" sans rechigner les transferts de dizaines / centaines de millions des libanais-entre autres-, dont un grand nombre de PPE( parait il ) quant a la legalite de leur origine ! pareil s'applique a qqs autres pays-havres de blanchiment- LORS leur faire confiance, meme en leur soit disant justice c'est etre trop, bcp trop naifs !

    Gaby SIOUFI

    11 h 42, le 25 janvier 2021

  • Il était grand temps de bouger et de mettre fin à cette organisation mafieuse qui rackette le peuple libanais en le privant de tous ses droits a une vie décente où électricité, l’eau l’éducation et les soins médicaux sont devenus un luxe que les libanais doivent mériter en se conformant à leurs lois de sape sans jamais être inquiétés. Ce silence coupable de la part de tous les pays concernés par ce hold up devraient rendre compte aux libanais qui eux croulent sous les dettes et s’approchent de la misère sans nom pour avoir accepté l’inacceptable faute de lois et de justice alors qu’ils se remettaient d’une guerre qui les avait épuisés. Enfin les consciences se réveillent et espérons qu’elles ne s’essoufflent pas avant d’atteindre leur objectif qui est de juger toute cette mafia qui a agit jusqu’alors avec leur bénédiction. Salamé n’est pas le seul concerné. Ces criminels ont acheté son silence pour piller le pays en lui versant des miettes. Il faut que la vérité éclate au grand jour et que tous ces criminels croupissent en prison pour avoir osé dépouiller un peuple et détruit un pays.

    Sissi zayyat

    11 h 13, le 25 janvier 2021

  • ESPÈRANT DES BONNES NOUVELLES POUR LE PEUPLE APPOVRI.

    Gebran Eid

    10 h 23, le 25 janvier 2021

  • Avis à tous les voleurs qui ont cru qu'ils sont à l'abri des poursuites judiciaires, cette fois internationales, faites-vite, de rapatrier vos sommes avant qu'elles ne soient confisquées dans les pays étrangers.

    Esber

    08 h 24, le 25 janvier 2021

  • Avec un salaire de 500’000$ par an il faut travailler pendant 800 ans pour arriver à 400 millions de dollars...

    Gros Gnon

    04 h 46, le 25 janvier 2021

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