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Culture - Photos

Marie-Noëlle Fattal, tendre arpenteuse de Beyrouth...

Ce sont des images de vie que la photographe qui se cache derrière le très suivi fil Instagram Beirutfootsteps expose pour la première fois à BEYt, une ancienne demeure de Mar Mikhaël aux stigmates du 4 août déjà colmatés. Vie d’une ville à travers ses rues, ses quartiers, des moments éphémères du quotidien de ses habitants, captés par un objectif sensible et positif.

Marie-Noëlle Fattal, tendre arpenteuse de Beyrouth...

Une photo sans titre, prise le 7 juillet 2020 par Marie-Noëlle Fattal, montrant un toit de maison aménagé en terrasse d’été. Photo DR

Lorsqu’elle retourne en 2015 au Liban après plusieurs années passées à l’étranger, Marie-Noëlle Fattal se lance, tous les week-ends, dans l’exploration pédestre des différents quartiers de Beyrouth. Sa façon à elle de renouer avec cette ville à laquelle elle a toujours été attachée, qui l’a toujours inspirée, même de loin, confie-t-elle.

Son smartphone en main, elle se met à photographier spontanément des gens, des bâtiments ou encore de petites scènes de rue beyrouthines. Un cireur de chaussures attelé à la tâche sur un coin de trottoir, une réunion de fumeuses de narguilé sur le pas de porte d’une boutique, des bougainvilliers en fleurs dans un jardin abandonné, des échoppes et des façades anciennes encore échappées aux bulldozers… Bref, elle immortalise tout ce qui la touche, l’impressionne, lui arrache un sourire…

« Hallaa’ el-Chabeb », le barbier des jeunes hommes, photo prise par Marie-Noëlle Fattal en janvier 2019. Photo DR

Le regard empli d’une tendre curiosité envers cette ville et ses habitants, la jeune femme accumule, ainsi, au fil de ses promenades dominicales, les instantanés de vie à Beyrouth. Des images toujours positives et pleines de vitalité, malgré la pointe de nostalgie qui s’en dégage souvent. Car c’est vers les vieux secteurs restés encore authentiques que ses pas la (ra)mènent invariablement. Ces Zokak el-Blat, Hamra, Gemmayzé, et surtout le périmètre de Mar Mikhaël, qu’elle arpente inlassablement. Attirée par leur harmonie architecturale encore relativement préservée, couplée à une certaine mixité sociale, culturelle et générationnelle qui en fait le charme particulier, à la fois contemporain et désuet, elle veut en garder trace avant qu’il ne soit trop tard.

Pour mémoire

« Beirut Footsteps », Marie-Noëlle Fattal, pas à pas

À cet effet, Marie-Noëlle Fattal crée, en mars 2015, Beirut Foosteps, un compte Instagram sur lequel elle partage ses photos des coins et recoins de cette capitale qu’elle ne se lasse pas de découvrir avec toujours autant de passion.

Ses images prises au moyen d’un simple téléphone portable, mais avec une sensitivité jaillie droit du cœur, souvent relevée d’un brin d’humour, parlent à tous ceux qui comme elle sont sensibles à une certaine facette du Liban et de sa capitale : vraie, vibrante, colorée et toujours positive en dépit de tous ses maux. Elles lui valent aujourd’hui près de 12 000 followers qui voient en elle la photographe attitrée de la Beyrouth des petits bonheurs quotidiens.

Marie-Noëlle Fattal, photographe du vrai Beyrouth. Photo DR

L’année qui a brisé ses peurs…

Et puis arrive l’année 2020. Celle de tous les malheurs, de tous les défis aussi. « Cette année, qui a été horrible pour moi comme pour tout le monde, aura, en revanche, brisé toutes mes peurs », confie-t-elle. En premier, celle d’oser franchir le cadre rassurant du fil Instagram pour se lancer pour la première fois dans le circuit des expositions. Ce qu’elle appréhendait, n’étant pas une photographe professionnelle. Mais voilà, durant la période de confinement, s’étant enfin dotée d’une « vraie grande caméra », elle avait fourbi ses armes, s’exerçant notamment à prendre des photos en intérieur. En juillet dernier, munie de son nouvel appareil numérique, elle grimpe au 12e étage d’un immeuble situé derrière les escaliers de l’ancien cinéma Vendôme, à Mar Mikhaël, à la vue plongeante sur le périmètre alentour, tout en lacis de ruelles et bâtisses décaties. Elle s’y installe quotidiennement et, braquant son objectif sur les habitants de ces quartiers anciens où la vie s’écoule non pas paisiblement – ce n’est jamais le cas au Liban –, mais dans une proximité de voisinage où dénuement et chaleur humaine vont de pair, elle capte les instants de bonheur « éphémères » qui émaillent leur ordinaire. Cette femme qui fume à sa fenêtre, cet homme qui a fait de la terrasse de sa maison délabrée son jardin d’Éden ou ce vieillard penché sur les géraniums de son balcon avec un amour quasi perceptible… Autant de visages anonymes qui racontent, sans pathos, la précarité de la vie dans cette ville que d’aucuns préfèrent montrer lisse, fêtarde, bling-bling ou meurtrie… mais jamais dans sa vérité intime.

Cette série de photos intimistes prises au cours du mois de juillet 2020 et tout simplement baptisée 12th Floor (12e étage) forme le noyau central de l’exposition que Marie-Noëlle Fattal présente à BEYt jusqu’au 3 janvier 2021. Dans cette ancienne demeure de Mar Mikhaël, aux stigmates du 4 août déjà colmatés, cadre idéal pour son propos artistique, elle a réuni également sous l’intitulé « Éphémères » trois autres séries de ses clichés pris au cours de ces trois dernières années.

La première, et la plus ancienne, Waiting, est comme son nom l’indique axée autour de ces chaises vides qu’on voit souvent dans les rues, sur les rebords des trottoirs, seules, en attente d’un moment ou d’une conversation, cassées ou oubliées. Elles sont le symbole, selon l’artiste, « des chaises vides d’un pays sans État ». La seconde, Free Walls, s’arrête sur les murs de la ville réappropriés par ses artistes. Et la troisième, Of Dogs and Humans, qui, tout en traversant la thaoura et évoquant subrepticement la pandémie, capte des attitudes et des regards aussi expressifs chez certains passants que chez leurs fidèles compagnons à quatre pattes.

Que des images d’avant le traumatisme collectif du 4 août, « absolument non photographiable », dit l’arpenteuse amoureuse de Beyrouth, qui par-delà ce terrible choc a décidé « de repartir vers quelque chose de positif ». Et d’entraîner les visiteurs de l’exposition à sa suite.

Il reste à signaler que la totalité des ventes sera reversée au Marion Hochar Ibrahimchah Fund qui aide les femmes microentrepreneuses à rebâtir leurs commerces et petites industries détruits par l’explosion du port le 4 août.

« Éphémères » de Marie-Noëlle Fattal; BEYt Mar Mikhaël. Jusqu’au 3 janvier 2021, de 11h à 20h.

Lorsqu’elle retourne en 2015 au Liban après plusieurs années passées à l’étranger, Marie-Noëlle Fattal se lance, tous les week-ends, dans l’exploration pédestre des différents quartiers de Beyrouth. Sa façon à elle de renouer avec cette ville à laquelle elle a toujours été attachée, qui l’a toujours inspirée, même de loin, confie-t-elle. Son smartphone en main, elle se met...

commentaires (1)

magnifique expo

Nicole Hamouche

14 h 26, le 21 décembre 2020

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Commentaires (1)

  • magnifique expo

    Nicole Hamouche

    14 h 26, le 21 décembre 2020

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