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Politique - Gouvernement

Guerre de communiqués entre Hariri et le palais présidentiel

Des échanges acerbes ont eu lieu entre les deux parties depuis lundi matin, la tension est à son comble et les accusations de retarder la naissance du cabinet fusent des deux côtés.

Guerre de communiqués entre Hariri et le palais présidentiel

Le Premier ministre désigné Saad Hariri a répondu hier par deux fois à des messages du palais présidentiel. Une guerre des communiqués qui en dit long sur les tensions entre les deux parties. Mohammad Azakir/File Photo/Reuters

Alors même que la perspective de formation d’un gouvernement n’a jamais été aussi hypothétique, la journée d’hier était riche en échanges acerbes entre le Premier ministre désigné Saad Hariri et le palais présidentiel.

La journée a commencé par une lettre ouverte du conseiller du chef de l’État, Salim Jreissati, publiée par an-Nahar, dans laquelle il accuse le Premier ministre désigné de chercher à « éterniser » les tractations gouvernementales. Dans cette lettre, M. Jreissati appelle notamment le Premier ministre désigné à coopérer avec le chef de l’État afin qu’ils « trouvent ensemble une façon de sauver le Liban ». Il estime que le « délai raisonnable » pour former un gouvernement, dans les conditions que connaît le pays, « est écoulé ». Évoquant les difficultés rencontrées, selon lui, par Saad Hariri dans la mise sur pied de son cabinet, Salim Jreissati se dit convaincu que « la seule personne capable » d’aider le Premier ministre désigné à les surmonter est le président de la République Michel Aoun.

Le bureau de presse de Saad Hariri n’a pas tardé à répondre à cette publication, précisant que l’octroi du tiers de blocage à « une partie politique précise » ne sera jamais accordé, en référence implicite à une revendication du Courant patriotique libre (CPL, aouniste) et du président Aoun à cet égard.

Le bureau de presse de Saad Hariri affirme que ce dernier veut former « un cabinet de technocrates non partisans, qui pourra mettre un terme à l’effondrement que vit le pays et reconstruire tout ce qui a été détruit dans l’explosion du port ». « Mais le président Aoun demande un gouvernement dans lequel tous les partis politiques soient représentés, qu’ils aient approuvé ou non la désignation de Saad Hariri, ajoute le communiqué. Cela risque de réitérer l’expérience des gouvernements précédents, qui travaillaient sur base du “partage du gâteau” et des tiraillements politiques », souligne le communiqué.

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Les réponses aux questions que se pose M. Jreissati dans sa lettre ouverte « se trouvent toutes auprès du président de la République », affirme Saad Hariri, qui estime, non sans ironie, que le conseiller du chef de l’État « n’a probablement pas eu connaissance de toutes les informations » qui sont en possession du président, notamment la mouture qui lui a été présentée la semaine dernière, et où se trouvaient quatre noms qui avaient été proposés par M. Aoun lui-même lors d’une réunion précédente.

La réponse à la réponse… à la réponse

Mais la polémique ne s’arrête pas là, puisque la présidence de la République n’a pas tardé à… répondre à la réponse. Le bureau de presse de la présidence dénonce dans ce nouveau texte « une série d’inexactitudes » dans les prises de position du Premier ministre désigné. Selon ce texte, le chef de l’État ne s’est pas opposé aux noms proposés dans la mouture de M. Hariri, mais « à la répartition confessionnelle des portefeuilles ministériels », notamment parce que aucun critère unifié n’a été observé pour cette répartition. Le président revient par ailleurs sur l’affirmation du leader sunnite selon laquelle il a utilisé dans sa mouture des noms qu’il aurait lui-même suggérés. « Le président Aoun n’a jamais proposé de noms de ministrables, mais une série de noms au cours d’une discussion », dit le texte. Michel Aoun a toujours « insisté sur la nécessité de discuter avec les chefs des différents groupes parlementaires qui devront donner leur confiance au cabinet », a également souligné Baabda.

Ce à quoi, on l’imagine bien, le bureau de presse de Saad Hariri a une nouvelle fois répliqué en soirée, rappelant les différentes tractations menées par le Premier ministre désigné lors de ses rencontres avec le chef de l’État, qu’il invite à « contrôler » ses conseillers de manière à faciliter le processus de formation du cabinet, plutôt que de l’entraver, dans une allusion claire à Salim Jreissati.

« Peu d’espoir » de la naissance du gouvernement, selon Geagea

Pas de gouvernement à l’horizon, donc. C’est l’impression qui a été exprimée hier par le leader des Forces libanaises, Samir Geagea, au cours d’une conférence virtuelle avec sa base, depuis Meerab. M. Geagea a estimé qu’il n’y a « pas beaucoup d’espoir que M. Hariri forme son gouvernement », affirmant que la pression exercée par les FL ira dorénavant vers la tenue d’élections législatives anticipées.

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D’autres sources politiques, notamment des ministrables, lient cette soudaine montée des tensions à la visite prochaine du président français Emmanuel Macron au Liban, estimant que chaque partie, Baabda d’une part, la Maison du Centre de l’autre, cherchera à lui faire entendre sa version. Mais, toujours selon ces mêmes sources, il existe aussi une volonté, notamment du côté des forces du 8 Mars, de retarder autant que possible la formation du gouvernement, afin de ne pas donner à Saad Hariri le contrôle de l’exécutif alors que le nouveau président américain Joe Biden n’a pas encore pris le pouvoir, et que la région est en plein mouvement, d’où l’intérêt, pour ces parties, de garder des cartes de négociation en main. Cela expliquerait donc l’insistance de Michel Aoun à obtenir le tiers de blocage dans le futur cabinet.

Alors que la tension est à son comble, où pourrait-elle mener ? Selon notre correspondant Mounir Rabih, « l’explosion a déjà eu lieu entre les deux parties quand, au cours de la dernière réunion entre MM. Hariri et Aoun, le président a contre-attaqué en présentant sa propre mouture au Premier ministre désigné ». « Suivant les informations recoupées auprès de plusieurs sources, M. Hariri aurait eu vent de l’intention du CPL d’ouvrir des dossiers de corruption qui impliqueraient ses proches, à l’instar de ce qui a déjà eu lieu au ministère des Déplacés, poursuit-il. La réaction aux inculpations du juge Fadi Sawan dans l’affaire du port de Beyrouth, cette vague de solidarité soudaine avec le Premier ministre démissionnaire Hassane Diab, aurait pour objectif de freiner l’ouverture d’autres dossiers. Sans compter les tiraillements à propos du gouvernement. C’est une guerre dans laquelle toutes les armes, confessionnelles ou autres, sont utilisées. »

Selon notre correspondant, une réaction dans la rue, entre les partisans des deux formations, ne serait pas exclue si les blocages et tensions venaient à durer.


Le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian. Archives AFP


Le Drian : Pour moi, le Liban, c’est le Titanic sans l’orchestre

Le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, a de nouveau dressé un sombre tableau du Liban « qui s’enfonce dans la crise », déplorant « un déni total » des autorités alors que le pays n’a toujours pas réussi à mettre en place un nouveau gouvernement depuis août, dans la foulée de la double explosion dévastatrice du 4 août au port de Beyrouth. Faisant l’inventaire d’une année 2020 « terrible », dans un entretien accordé au Figaro, M. Le Drian rappelle que « des partenaires majeurs de la France ont subi des épreuves dramatiques, comme le Liban qui s’enfonce dans la crise ».

Y a-t-il encore des crises sur lesquelles la France peut peser seule ? demande la journaliste Isabelle Lasserre au ministre français. « La France pèse quand elle est à l’initiative, et souvent, seule la France est à l’initiative. Elle ne règle sans doute pas les choses seule, mais elle a la capacité de rassembler autour d’elle. C’est ce qui fait notre singularité et notre force. Si la France n’avait pas pris l’initiative au Sahel, il ne se passerait rien. Idem au Liban… » répond M. Le Drian. « Même avec une initiative, il ne s’y passe pas grand-chose… » lui rétorque alors la journaliste. « La seule solution pour que le message soit compris était de s’exprimer vigoureusement, en raison de notre amitié historique avec le Liban. C’est parce qu’il y a eu l’initiative de la France que toute la communauté internationale est sur la même logique que nous. Personne ne veut engager des financements tant que le Liban n’aura pas fait ses réformes. Pour moi, le Liban, c’est le Titanic sans l’orchestre. Les Libanais sombrent dans le déni total de leur situation et il n’y a même pas de musique… » constate le chef de la diplomatie française.

Par le passé, en août notamment, M. Le Drian avait déjà averti que si les réformes n’étaient pas lancées, le risque n’était rien moins que « la disparition du Liban ».

Alors même que la perspective de formation d’un gouvernement n’a jamais été aussi hypothétique, la journée d’hier était riche en échanges acerbes entre le Premier ministre désigné Saad Hariri et le palais présidentiel. La journée a commencé par une lettre ouverte du conseiller du chef de l’État, Salim Jreissati, publiée par an-Nahar, dans laquelle il accuse le Premier...

commentaires (7)

On ne peut pas du neuf avec du vieux. Hariri a atteint ses limites et il serait grand temps de tirer sa révérence en cédant la place àNawaf Salam. . On verra ce qu’ils chercheront à lui trouver comme tare puisqu’il est irréprochable et en plus compétent. Suffit les règlements de comptes personnels et d’ego sur le dos des citoyens. Kelloun yen ne Kelloun point à la ligne.

Sissi zayyat

11 h 23, le 15 décembre 2020

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Commentaires (7)

  • On ne peut pas du neuf avec du vieux. Hariri a atteint ses limites et il serait grand temps de tirer sa révérence en cédant la place àNawaf Salam. . On verra ce qu’ils chercheront à lui trouver comme tare puisqu’il est irréprochable et en plus compétent. Suffit les règlements de comptes personnels et d’ego sur le dos des citoyens. Kelloun yen ne Kelloun point à la ligne.

    Sissi zayyat

    11 h 23, le 15 décembre 2020

  • Merci Monsieur Le Drian, Un Titanic sans orchestre exact. Le bateau coule, sombre et les "capitaines" ne tendent pas la main aux noyés mais les laissent disparaître dans les flots.

    RIGA Pavla

    09 h 44, le 15 décembre 2020

  • Pourquoi continuer de croire que de deux nullités avérées résulte du positif ? L'état catastrophique actuel du pays devrait convaincre tous les Libanais...que les nullités doivent enfin céder leur fauteuil et fonction à d'autres, vraiment patriotes, capables...et surtout courageux ! - Irène Saïd

    Irene Said

    08 h 58, le 15 décembre 2020

  • Et les dossiers de corruption criminelle liée au CPL et ses alliés ?? Ou en est-on? Koulloun ya3né Koulloun!

    LeRougeEtLeNoir

    07 h 54, le 15 décembre 2020

  • KELLON YE3NE KELLON ! QUI SERA L,HERCULE QUI NETTOYERA LES ETABLES - CAR DE TELLES IL S,AGIT - D,AUGIAS LE PSEUDO LIBANAIS ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 54, le 15 décembre 2020

  • Les préjugés de Aoun sont Inacceptables. Le cliché de "l'unité des mesures ", est consommé et donne la nausée. Le tiers de la corruption aussi. Un président "bon papa", comme il prétendait au début de son mandat, signe et laisse le parlement faire le reste, s'il y a lieu. Autrement, ce sont des entraves inexpliquées qui n'ont de solution qu'avec le départ du président, qui n'arrive plus à s'entendre avec une majorité de libanais qui attendent sans cesse une solution combien urgente, et qui ne semble pas proche.

    Esber

    06 h 13, le 15 décembre 2020

  • Le Drian a raison!! ......Fait peu connu : presque:10 pourcent des victimes du Titanic étaient des libanais en route pour le nouveau monde mais à cause de l' idiotie du capitaine se sont trouvés coincés dans leurs cabines des étages inférieurs du rafiot...l'histoire se répète et voilà qu'on se trouve sur notre rafiot dans nos étages inférieurs coulant rapidement...et le capitaine ...?

    Wlek Sanferlou

    03 h 02, le 15 décembre 2020

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