La confusion la plus totale a régné hier au sujet d’une information diffusée par l’AFP, citant une source judiciaire, faisant état d’une lettre que le procureur général près la Cour de justice, le magistrat en charge du dossier de l’explosion du 4 août au port de Beyrouth, Fadi Sawan, aurait adressée au Parlement. Une lettre dans laquelle il demande l’ouverture d’une enquête sur les « défaillances » des ministres des Travaux publics et des Transports Michel Najjar, des Finances Ghazi Wazni et de la Justice Marie-Claude Najm. La lettre demande à la Haute Cour de justice – organe du Parlement chargé de juger les ministres et les présidents, prévu à l’article 80 de la Constitution – de se pencher aussi sur le rôle de plusieurs autres personnes ayant occupé les mêmes fonctions ministérielles dans les trois précédents gouvernements, ajoute la source judiciaire citée. Les investigations du juge Sawan ont fait naître « certains soupçons quant à la responsabilité de ces ministres et à leurs défaillances face à la gestion de la présence dans le port de nitrate d’ammonium » dont l’explosion de centaines de tonnes a fait plus de 200 morts et des milliers de blessés et ravagé une grande partie de la capitale, a ajouté cette source. Dans une mise au point, une source proche du ministère de la Justice a précisé que « le juge d’instruction demande au Parlement de faire le nécessaire pour enquêter sur le rôle de tous les chefs de gouvernement et de tous les ministres des Finances, des Transports et de la Justice de 2013 à aujourd’hui ».
Démenti
Contacté par L’Orient-Le Jour, le secrétaire général du Parlement, Adnan Daher, assure « n’avoir reçu aucune demande de la part du juge Sawan ». Il dit ensuite ne « pas avoir de commentaire supplémentaire » à faire à ce sujet.
Renseignements pris, il semble toutefois qu’en affirmant qu’il n’a rien reçu, M. Daher veut signifier « qu’il n’a rien accepté », mais que la missive du juge existe bel et bien. Selon des sources judiciaires, le juge Sawan aurait transmis sa lettre au parquet de la Cour de cassation présidé par Ghassan Oueidate qui a tenté à son tour de la transmettre au Parlement. Toutefois, le secrétariat général aurait refusé de la recevoir, estimant que le juge Sawan n’a pas qualité pour s’adresser au Parlement et que son message doit être envoyé par les voies hiérarchiques et passer par le Conseil supérieur de la magistrature, le ministère de la Justice et enfin le Conseil des ministres. Dans les milieux proches du magistrat, on conteste cette approche de l’affaire et l’on précise qu’en tant que magistrat instruisant une affaire devant une cour de justice, Fadi Sawan a le droit de s’adresser au Parlement « en sa qualité de Haute Cour de justice ». Du reste, dans sa missive, le juge se réserve le droit d’effectuer lui-même les interrogatoires envisagés, si le Parlement fait la sourde oreille à sa requête.
La Haute Cour de justice se compose de sept députés élus par la Chambre et de huit des plus hauts magistrats libanais pris par ordre hiérarchique ou à rang égal, par ordre d’ancienneté. Elle se réunit sous la présidence du magistrat le plus élevé en grade. Les arrêts de condamnation de la Haute Cour sont rendus à la majorité de 10 voix. Cette instance, dont la composition n’a jamais été achevée, n’a jamais siégé non plus.
« Une justice corrompue et politisée »
Sur un autre plan, les proches des victimes de la catastrophe du 4 août ont manifesté hier aux abords de la place de l’Étoile, réclamant pour leurs morts le statut de « martyrs de l’armée ». Vêtues de noir, décoiffées ou voilées, la plupart des femmes qui se trouvaient là portaient des portraits de leurs proches emportés par le souffle de la puissante explosion.
L’un des manifestants présents a dénoncé « une justice corrompue et politisée ». « Nous voulons savoir qui nous ment », a-t-il encore ajouté aux micros des chaînes télévisées sur place. Les manifestants, encadrés par des forces de l’ordre en surnombre, ont insisté et obtenu qu’une délégation d’entre eux soit reçue au Parlement. Celle-ci a finalement obtenu du groupe parlementaire du mouvement Amal l’engagement qu’un texte de loi revêtu du caractère de double urgence conférant aux victimes les mêmes avantages que ceux dont jouissent les « martyrs de l’armée » serait prêt dans quelques jours et soumis au vote.
« Si c’est généralisé à toutes les victimes, je ne serai pas contre, a réagi à cette nouvelle Nazih el-Adem, père de Krystelle, l’une des jeunes victimes de l’explosion. Mais je ne me fais pas trop d’illusions, parce qu’au Liban, les promesses ne sont généralement pas tenues! »
Le statut de « martyrs de l’armée » confère à la famille de la victime des avantages matériels et moraux, comme une indemnité mensuelle, des soins médicaux gratuits et d’autres bénéfices statutaires et sociaux. Ce statut conféré au victimes serait également un pas vers la reconnaissance, par l’État, de sa responsabilité dans la catastrophe et pourrait ouvrir la voie à d’autres formes de réparations.
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IL N,Y A QUE TROIS RESPONSABLES : 1. LES RESISTANTS SANS RESISTANCE SOUS LES ORDRES DE L,IRAN. 2. GOUPIL AUX VOYOUS A MOBILETTES QUI SEMENT LA TERREUR DANS LES QUARTIERS SURTOUT CHRETIENS. 3. LE CHEF PARAVENT DES DEUX PREMIERS.
LA LIBRE EXPRESSION
13 h 49, le 26 novembre 2020