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L’art et la bananière

Y a-t-il jamais eu un seul cas judiciaire public au Liban, et plus généralement dans le monde arabe, élucidé, bouclé de A à Z, dans lequel justice a été rendue dans les règles de l’art? Un seul, rien qu’un seul ? Faut croire que la vraie justice dans nos contrées demeure un fantasme inaccessible, dans lequel se télescopent les egos des margoulins portés à bout de bras par les raclures de la politique et les tempéraments de certains juges enclins à aller au-delà de leurs désirs.

S’il est communément admis que les dirigeants arabes mentent comme des arracheurs de dents, alors on peut penser qu’une bonne brouettée de chefs libanais ravirait la palme aux meilleurs d’entre eux. Ainsi, près de trois mois après le drame meurtrier du port de Beyrouth, on attend toujours que le commis à ce dossier ait fini de l’étudier. Le plus taré des mutants aurait déjà eu le temps de l’apprendre par cœur et de le déclamer en alexandrin à la fête des mères, mais nos fins limiers en sont encore à tâtonner pour savoir qui du soudeur ou du gardien du hangar a conçu cette opération diabolique. Et si l’investigation traîne en longueur, c’est probablement dû au nombre incalculable de portefaix interrogés, véritables James Bond à la solde des Israéliens, dont la mission était d’arroser le nitrate d’ammonium d’une béchamel à l’acide nitrique pour activer le pataquès.

Encore plus imbécile a été le fatras d’informations incohérentes qui a suivi le funeste télescopage chimique. Notamment sur les réseaux sociaux toutes chapelles confondues et auprès des responsables de tous poils et barbes, qui se sont mis à frétiller et balancer en vrac un confetti d’infos fantaisistes et non vérifiées, aussitôt gobées par les niaiseux avides de frissons apocalyptiques.

Pourtant, ces démarches ne sont pas dépourvues d’intérêt, puisqu’elles permettent à la fois à nos vieux briscards de la politique de bomber le torse en jouant à peu de frais les héros incontournables, aux commentateurs et autres experts en art divinatoire d’enchaîner les âneries analytiques oscillant entre optimisme sirupeux et pessimisme pleurnicheur, et au juge d’instruction vedette de parader en faisant parler de lui.

Tonton Hassane, qui manifestement depuis sa démission regarde ailleurs en sifflotant, a bien balbutié quelques vagues promesses devant les journalistes qui glandaient avec les gardes du corps et le reste de la domesticité à l’extérieur de son repaire. En revanche motus et clapet cousu sur les sources de financement. Pour finalement comprendre, au rythme des petits pets discrets lâchés çà et là par ses ministrillons, que c’est au tréfonds de la gorge du contribuable qu’on ira siphonner le pognon. C’est à peine si ce libéral distingué n’a pas ajouté à l’adresse des familles endeuillées et sans-abri : « Laissez votre numéro, on vous appellera ! »

Bref, c’est ce qu’on appelle une avancée en arrière du pas en avant dans le recul de la réforme de la justice.

gabynasr@lorientlejour.com

Y a-t-il jamais eu un seul cas judiciaire public au Liban, et plus généralement dans le monde arabe, élucidé, bouclé de A à Z, dans lequel justice a été rendue dans les règles de l’art? Un seul, rien qu’un seul ? Faut croire que la vraie justice dans nos contrées demeure un fantasme inaccessible, dans lequel se télescopent les egos des margoulins portés à bout de bras par les...

commentaires (4)

C'est déjà un progrès : nous passons de la République topinambourienne à la République bananière. La prochaine sera la République des boules puantes. Merci Gaby !

Un Libanais

19 h 06, le 21 novembre 2020

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Commentaires (4)

  • C'est déjà un progrès : nous passons de la République topinambourienne à la République bananière. La prochaine sera la République des boules puantes. Merci Gaby !

    Un Libanais

    19 h 06, le 21 novembre 2020

  • Ces pets silencieux dont l’odeur empeste le pays les juges en ont pris goût. Il snifent et se gargarisent avec les vomis des coupables contents de garder leur poste de juges ou de magistrats tout comme les autres incapables qui dirigent le pays. De déclaration en promesse, ils servent de paravent aux assassins de la république et du peuple toute confessions confondues. A quand un Karcher à l’eau de javel pur ou au vitriol pour assainir ce pouvoir de tête en comble?

    Sissi zayyat

    12 h 07, le 21 novembre 2020

  • BRAVO !

    Braschi Philippe

    00 h 07, le 21 novembre 2020

  • C,EST D,ATOLL CRABIEN ET NON PLUS DE REPUBLIQUE BANANIERE CHER GABY NASR QU,IL EN EST QUESTION. REAJUSTEZ ALORS VOS TIRS EN CONSEQUENCE.;

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 29, le 20 novembre 2020

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