Réunie à la Chambre de commerce et d’industrie de Beyrouth et du Mont-Liban (CCIAB), l’Association des commerçants de Beyrouth (ACB) a lancé hier un ultimatum aux autorités pour réclamer le droit pour les commerces non essentiels d’ouvrir pendant la nouvelle période de confinement total, ordonnée la semaine dernière pour enrayer la propagation du Covid-19. En cas de maintien des restrictions, l’ACB a appelé l’État à indemniser les commerces contraints de fermer.
L’ACB a exprimé l’espoir d’une réaction « immédiate » des autorités sur ce dossier et menacé dans le cas contraire d’appeler ses membres à braver le confinement. Lors de cette conférence de presse, le président de l’ACB, Nicolas Chammas, a notamment martelé « qu’il n’existe pas d’économie sans la santé ni de santé sans économie ». Pour rappel, seuls les commerces non essentiels, les offices autonomes, les établissements scolaires, les crèches, les professions libérales et le secteur privé ont été sommés de fermer leurs portes.
« Nous demandons un équilibre entre tous les secteurs. Nous sommes très concernés par l’avenir de nos employés et donc notre requête se résume en deux volets : soit l’État autorise immédiatement tous les commerces à rouvrir, soit il compense ceux qu’il oblige à fermer à hauteur du double du salaire minimum, c’est-à-dire 1 350 000 livres libanaises, pour chaque salarié, chaque mois, et ce tout le temps de la fermeture », a exposé Nicolas Chammas à L’Orient-Le Jour. Le versement pourra être direct ou prendre la forme d’un crédit d’impôt, a expliqué l’ACB, promettant de monter en puissance à la manière des « gilets jaunes » français si l’État décidait de faire la sourde oreille.
Le message semble en tout cas avoir été entendu par l’exécutif, à en juger par la réaction rapide du ministre sortant de l’Intérieur et des Municipalités, Mohammad Fahmi, qui a déclaré hier après-midi aux médias que « certains commerces et services pourraient être autorisés à rouvrir après vendredi, en fonction du nombre de cas (de Covid-19) ». Selon une source proche de la filière, le ministre devrait « rapidement » prendre une décision dans les 48 heures qui assouplirait les modalités du confinement pour « certains commerces ».
La mort du secteur
La nouvelle période de confinement de deux semaines qui a démarré samedi a été mal perçue par les acteurs d’une majorité de filières du pays, dont les commerçants qui avaient déjà manifesté leur mécontentement. En effet, les restrictions liées au Covid-19 accablent un peu plus une situation économique et financière désastreuse dans laquelle le Liban patauge depuis plus d’un an.
L’ACB a ainsi fait valoir que, dans un tel contexte, la fermeture de l’ensemble des commerces considérés comme non essentiels risque « d’entraîner la mort du secteur », alors que le chiffre d’affaires a baissé de « 70 à 90 % » depuis le début de la pandémie, des chiffres relayés dans le compte rendu distribué à l’issue de la conférence de presse d’hier.
D’autres organisations professionnelles, à l’image du Rassemblement des chefs d’entreprise libanais (RDCL), ont été jusqu’à assimiler la nouvelle période de confinement ordonnée par les autorités à un « complot » contre le secteur privé. Une interprétation que l’ACB ne semble pas non plus écarter. « Nous commençons à avoir des doutes très fondés sur le fait que, stratégiquement, il y a une volonté de détruire le secteur commercial et de changer l’identité du Liban, qui est une économie libre depuis cent ans », a encore ajouté Nicolas Chammas.
Sans aller jusqu’à ce point, l’ACB a tout de même dénoncé l’inégalité de traitement entre les secteurs face au confinement, certains d’entre eux étant autorisés à ouvrir avec des aménagements, à l’instar des industriels ou des banques. « Le secteur commercial est ébahi face aux décisions d’exception qui ont bénéficié à tous les autres secteurs (…) Nous nous levons contre cela car il a été prouvé par une société qui dépêche des clients mystères (GWR Consulting, selon le communiqué de l’ACB) que le secteur commercial était le plus respectueux des mesures sanitaires, avec un taux de conformité supérieur à 90 % », a aussi déclaré à L’Orient-Le Jour Nicolas Chammas, réitérant un discours désormais rodé. Si la question de l’ouverture des banques n’a pas fait débat au moment d’ordonner cette nouvelle période de confinement, les assouplissements obtenus par les industriels ont été décidés après que des représentants de l’Association des industriels ont fait pression sur leur ministère.
Enfin, l’ACB a reproché le fait que le confinement n’est pas respecté dans toutes les régions du pays, comme nous l’avons rapporté dans notre édition d’hier, certains entrepreneurs habitant dans des quartiers populaires préférant braver les interdits pour continuer de gagner leur vie.
Réunion demain au sujet du prix du test PCR
Le ministre sortant des Finances Ghazi Wazni, celle du Travail Lamia Yammine et le directeur de la Caisse nationale de Sécurité sociale Mohammad Karaké se rencontreront demain pour discuter du prix du test PCR – test de dépistage du coronavirus – qui coûte actuellement 150 000 livres (soit près de 100 dollars au taux officiel de 1 507,5 livres). Contactée par L’Orient-Le Jour, une source proche du dossier a déclaré que les trois protagonistes décideront du prix futur du test jeudi. Ils devraient discuter de la part qui pourrait être couverte par la CNSS afin d’en baisser le prix, le but de cette opération étant « d’encourager les personnes à se faire tester », alors que le Liban est confiné depuis samedi afin de lutter contre la propagation du virus. La source précitée a souligné qu’en marge de la crise économique et financière que traverse le pays, en plus de la dévaluation de la livre de près de 80 %, le test « représente actuellement un coût pour les ménages ». Elle a cependant émis des doutes concernant la capacité de paiement de la CNSS, d’une part, et de l’État, de l’autre, ce dernier devant à la Caisse 3 200 milliards de livres au 31 décembre 2018, selon l’ancien ministre du travail Camille Abousleiman. Sans oublier que le Liban a fait défaut sur ses titres de dette en devises – les eurobonds – en mars dernier et n’a donc plus accès aux marchés financiers pour obtenir des liquidités. Ainsi, les ministres et le directeur de la CNSS « vont voir si cette opération est faisable ».En guise de comparaison, le prix du test PCR est de 54 euros en France et il est remboursé à 100 % par l’assurance maladie depuis le 25 juillet, permettant alors au pays de tester à grande échelle et de contrôler la propagation du virus.
M. A.
L’ACB réclame des compensations financière à l’Etat. Mais de quoi vous parlez, le dit État est endetté pour des centaines d’années et ne tire son argent que de l’épargne des libanais. Le dit État est en faillite totale dans tous les domaines, oubliez son existence et tachez de trouver des solutions alternatives
10 h 31, le 18 novembre 2020