Havre de paix sur un littoral globalement pollué et bétonné, l’école de voile du Lebanese Yacht Club (LYC), à Thoum, dans la région de Batroun, a été mise vendredi sous scellés sur ordre de l’avocat général près la Cour de cassation, Ghassan Khoury. Une plainte avait été déposée par une société propriétaire du terrain voisin, pour « occupation illégale d’un bien-fonds public maritime ». Le LYC se défend, assurant détenir un permis d’utilisation du site émanant du ministère des Transports, et estime que son activité préserve le littoral qui reste accessible au public.
Consacrée à l’apprentissage de la navigation, l’école permet aux enfants de plus de sept ans d’exercer une activité sportive dans un environnement préservé, en contact avec la nature. Renfermant une source naturelle, le périmètre sur lequel se trouve l’école de voile fait partie du domaine public maritime. Depuis 2015, le LYC s’est vu octroyer une licence d’utilisation délivrée par le ministère des Travaux publics et des Transports sous condition de préserver le caractère écologique du bien-fonds. Le ministère avait justifié cette licence par le fait que l’association est d’utilité publique et à but non lucratif. Celle-ci compte d’ailleurs sur les donations de philanthropes attachés aux causes environnementales et culturelles. Le président du club, Rabih Salem, affirme que le LYC a fait de cette plage un lieu comparable au littoral du sud de la France. Contrairement à ce qui prévaut sur la majeure partie de la côte libanaise, cette plage est ouverte au public et attire tant des Libanais en quête de quiétude, que des amoureux de la voile provenant des quatre coins du monde. Ce qui a généré nombre d’emplois dans la région. En outre, le club participe activement à la tenue du championnat de voile organisé chaque année par la Fédération libanaise de voile à partir du site aménagé. Il coopère aussi avec de nombreuses fédérations et associations internationales de yachts de tradition.
Lattes de bois
Récemment, le propriétaire du terrain voisin, présenté comme étant la société Azur bleu, a porté plainte auprès du parquet de cassation, pour « occupation illégale » par le LYC d’un bien-fonds public. Joint par L’Orient-Le Jour, Rabih Salem affirme que, convoqué à plusieurs reprises au poste de gendarmerie de Batroun, il a réfuté à chaque fois cette accusation, s’appuyant sur les documents prouvant la légalité du droit du club à occuper l’espace. Mais rien n’y a fait. Il a récemment reçu un ordre d’évacuation des lieux, auquel il n’a pas obtempéré. D’où la mise sous scellés de l’école de voile vendredi.
Le Lebanese yacht club est à présent dans le collimateur de la justice, alors qu’il affirme exploiter dans les règles un terrain de 500 m2 sur lequel seules des lattes de bois – amovibles – ont été installées pour l’entreposage de 44 bateaux à voile. Contrairement à tant de projets qui ont bétonné la plage avec des constructions en dur, sans être inquiétés pour autant...
Rabih Salem affirme avoir présenté hier un recours pour contester la décision du juge auprès du procureur général près la Cour de cassation, Ghassan Oueidate. Une source judiciaire affirme que ce dernier devrait examiner le dossier aujourd’hui, et qu’il devrait notamment se pencher sur la question de savoir si le terrain objet de litige est sujet à imposition ou non, c’est-à-dire si les propriétaires ou les exploitants devraient s’acquitter d’une taxe. Selon M. Salem, son organisation ne doit payer aucune taxe puisqu’il n’empiète pas sur le domaine public, d’autant que le club détient du ministère des Travaux publics une autorisation d’utilisation. En fin de compte, si le juge Oueidate en décide autrement, l’ordre donné par M. Khoury serait retiré. La mise sous scellés de l’école de voile a aussitôt suscité un tollé sur les réseaux sociaux et dans les milieux activistes. Le Mouvement écologique libanais (LEM), fondé par Paul Abi Rached, qui regroupe 60 ONG environnementales, a publié un communiqué dans lequel il se demande si la décision de M. Khoury ne serait pas dans « l’intérêt d’un autre bien-fonds ».
commentaires (4)
A quand une police de l'environnement et de la pollution au Liban ? C'est d'une urgence absolue.
nabil zorkot
11 h 56, le 17 novembre 2020