
Le président libanais, Michel Aoun, au palais de Baabda, le 21 septembre 2020. Photo Dalati et Nohra
Un an jour pour jour après que les Libanais sont descendus par milliers dans les rues du pays pour crier leur colère contre la classe dirigeante, accusée de corruption, et alors que des manifestations doivent avoir lieu dans l'après-midi, plusieurs responsables politiques et du corps diplomatique au Liban ont commenté samedi cet anniversaire du soulèvement populaire. Le chef de l'Etat, Michel Aoun, a notamment réitéré son appel à l'ouverture d'un dialogue avec les contestataires.
"Un an après le début des mouvements populaires, ma main reste tendue pour que nous puissions travailler ensemble à répondre aux revendications en matière de réformes", a écrit le président Aoun sur le compte Twitter de la présidence, à l'attention du mouvement de contestation. "Il n'y a pas de réformes possibles en dehors des institutions", a-t-il ajouté, estimant qu'"il n'est pas trop tard".
Depuis le 17 octobre, le chef de l'Etat avait à plusieurs reprises appelé la contestation au dialogue, sans que les manifestants ne répondent à son appel. Depuis plus de deux ans, le pouvoir libanais a été incapable de lancer les réformes bien identifiées et nécessaires au redressement du Liban et à l'octroi d'une aide internationale désormais indispensable.
De son côté, la ministre sortante de la Justice, Marie-Claude Najm, a souligné, également sur Twitter, que "l'espoir persiste", et notamment "l'espoir de passer des petits états confessionnels à un Etat laïc et fédérateur".
Le député Chamel Roukoz, qui avait quitté dans les premiers jours du soulèvement le groupe parlementaire du Courant patriotique libre (fondé par Michel Aoun, son beau-père) afin de marquer symboliquement son rejet de l'establishment, a pour sa part estimé que "le 17 octobre a prouvé qu'il n'y a pas de plus forte volonté que celle du peuple". "Il n'y a pas de confession plus élevée que celle de la nation. Le 17 octobre a prouvé que l'unité des Libanais, sur un seul front, effraie les leaders politiques et fait trembler leur trône", a-t-il ajouté. "Vous avez brisé le mur de la peur et fait face à une classe dirigeante établie depuis des décennies, ne reculez plus, n'ayez pas peu, demain sera meilleur", a écrit M. Roukoz.
"Agir comme si de rien n'était"
Du côté des personnalités diplomatiques, le secrétaire d'Etat américain, Mike Pompeo, a pour sa part déploré le fait que les dirigeants libanais "continuent d'agir comme si de rien n'était". "Il y a un an, le peuple libanais est descendu dans la rue, réclamant des réformes, une meilleure gouvernance, et la fin de la corruption endémique qui a siphonné l'énorme potentiel du Liban. Leur message est clair et sans équivoque. Continuer d'agir comme si de rien n'était est inacceptable", a estimé le chef de la diplomatie américaine.
L'ambassadeur britannique à Beyrouth, Chris Rampling, a lui affirmé dans un message sur les réseaux sociaux que pour beaucoup de Libanais, l'espoir émergeant du soulèvement populaire "s'est transformé en désespoir" après une année ayant posé "des défis inédits", dont il a notamment cité "la pauvreté, la pandémie et la tragédie inqualifiable du 4 août". Pendant ces derniers mois "nous n'avons pas vu une seule avancée sérieuse de la part des autorités en ce qui concerne la transparence et le futur est trouble", a-t-il ajouté. Dans ces circonstances, M. Rampling a appelé les Libanais à "trouver un moyen de rétablir la stabilité", soulignant que "tout le monde sait ce qu'il faut faire", en référence aux réformes attendues de la part de l'Etat par la communauté internationale, afin de débloquer les aides financières.
L'ambassadrice de France, Anne Grillo, a, quant à elle, souligné qu'il "est de la responsabilité des forces politiques libanaises de répondre maintenant aux aspirations des Libanais". "Il y a un an, des milliers de Libanaises et Libanais, de toutes les régions, descendaient dans la rue. Ils demandaient des réformes pour une société plus juste, un meilleur vivre ensemble et des perspectives concrètes d'avenir", a-t-elle écrit, assurant que "la France est toujours prête à accompagner ce changement".
"Tout au long d'une année catastrophe, les griefs et les demandes légitimes des libanais n'ont pas été entendus", a déploré pour sa part le coordinateur spécial de l'ONU pour le Liban, Jan Kubis. "Tout cela a encore aggravé le manque de confiance des libanais envers leurs dirigeants."
Malgré l'engagement pris par tous les chefs de file politiques vis-à-vis du président français, Emmanuel Macron, pour former rapidement un nouveau gouvernement pour remplacer celui de Hassane Diab, tombé dans la foulée des explosions du 4 août, et lancer les réformes, aucune avancée n'a été enregistrée. Les consultations contraignantes, pour la désignation d'un nouveau Premier ministre, devaient se tenir jeudi mais ont été reportées d'une semaine par manque de soutien envers la candidature du leader sunnite et ex-président du Conseil Saad Hariri. Ce dernier souhaite mettre sur pied un gouvernement de spécialistes sans affiliation politique pour une durée limitée. Mais ce retour de M. Hariri à la tête d'une nouvelle équipe ministérielle est rejetée notamment par le CPL et les Forces libanaises, et critiquée par la rue, alors que le gouvernement de Saad Hariri avait démissionné peu de temps après le lancement du soulèvement d'octobre dernier.
Vendredi soir, le Quai d'Orsay a déclaré, au sujet du nouveau report des consultations parlementaires : C’est (aux forces politiques libanaises), et à elles seules, que revient la responsabilité de ce blocage prolongé, qui empêche toute réponse aux attentes exprimées par la population libanaise".
commentaires (19)
ELLE A ETE TENDUE MEME AVANT LE MANDAT ET ELLE LE RESTE.
LA LIBRE EXPRESSION. VERITES ! EQUITE !
19 h 43, le 18 octobre 2020