
Zeinab Husseini du temps où elle respirait la vie. Photo DR
Zeinab Husseini n’avait que 14 ans. Elle venait d’une famille pauvre et démembrée. Ses parents étaient séparés et habitaient l’un à Chyah, l’autre à Choueifate. Il y a une semaine, l’adolescente a été sauvagement assassinée, brûlée vive dans un appartement du quartier populaire de Beit Sebahi à deux pas de la municipalité de Bourj Brajneh, dans la banlieue sud de Beyrouth. Un quartier où tout le monde se connaît, où rien ne peut se dérouler sans que le voisinage soit au courant. Trois individus d’une même famille, M.S., son fils A.S. et Aa. S., un de leurs proches, « sont soupçonnés d’être impliqués dans la mort de l’adolescente, sur fond de conflit lié à une affaire de drogue et de proxénétisme », ont rapporté vendredi 18 septembre les services de renseignements de l’armée libanaise. Mis en état arrestation, ils sont toujours sous enquête. Et dans l’attente de la publication des résultats de l’enquête et de l’acte d’accusation, les rumeurs les plus folles alimentent la chronique, affirmant que Zeinab aurait été prise dans les filets d’un réseau de prostitution et de drogue. On raconte entre autres que l’adolescente aurait quitté le domicile paternel 12 jours avant sa mort et qu’elle n’en était pas à sa première fugue. Elle se serait réfugiée d’abord chez sa mère à Choueifate puis chez un homme de la famille Sebahi à Bourj Brajneh. Un individu qualifié de séducteur macho, voire de voyou, par nombre d’habitants, qui sillonnait le quartier à bord de vieilles voitures de collection, sono hurlante. C’est là qu’elle aurait été tuée par Aa. S., qui aurait incendié l’appartement où se trouvait la jeune fille pour cause de conflit avec les deux autres individus, dit-on.
Wassef Haraké défendra les droits de la victime
En l’absence de la moindre information officielle et de nombreux chaînons manquants, les rumeurs prennent le dessus sur l’horreur qu’a endurée l’adolescente, sur son histoire personnelle, sur les circonstances de son assassinat et sur les raisons qui l’ont poussée à se rendre dans cet appartement. Ce qui a poussé l’avocat Wassef Haraké, de la contestation populaire, à annoncer avoir été chargé par la famille de Zeinab de défendre les droits de la jeune victime. « C’est la mission morale et humanitaire la plus importante que je porte pour obtenir justice et sanctionner ceux qui ont tué Zeinab », a-t-il dit sur sa page Facebook. L’avocat a surtout mis en garde contre les rumeurs et fausses informations qui risquent de porter encore plus préjudice à la malheureuse. « Après avoir péri, assassinée, la jeune victime doit une fois de plus payer le prix de l’injustice sociale, de l’absence de l’État et des rumeurs malfaisantes », a-t-il déploré.
La seule certitude pour l’instant est le rapport du médecin légiste, Hussein Chahrour, qui a pratiqué l’autopsie le 16 septembre à l’hôpital al-Rassoul al-aazam. « La peau de la jeune défunte était carbonisée de la tête aux pieds, révèle ce dernier à L’Orient-Le Jour. Elle était si brûlée qu’elle en était craquelée. D’où l’impossibilité de dire si elle a été violée ou battue. » « En revanche, la malheureuse n’avait pas les mains liées, contrairement à ce que racontaient certaines rumeurs », précise-t-il. Le docteur Chahrour soutient par contre que lorsque l’incendie s’est déclaré, la jeune fille était encore en vie. « Dans sa trachée-artère, nous avons trouvé des résidus de fumée noire, ce qui signifie qu’elle respirait encore lorsqu’elle a été immolée », observe-t-il.
Une éducation répressive
L’assassinat de Zeinab attend d’être élucidé et de voir les criminels sanctionnés. Mais au-delà des circonstances de cet horrible meurtre, l’affaire suscite de nombreux commentaires et interrogations liés aux droits de l’enfance. La directrice de l’Union pour la protection de l’enfance au Liban (UPEL), Samira Sukkar, qualifie le crime « d’inhumain et d’insoutenable », et appelle les autorités à « sanctionner les criminels ». « Sans une justice décisive et ferme, les assassins continueront de penser qu’ils ont le droit de porter atteinte à l’enfance », martèle-t-elle. Elle n’en rappelle pas moins que « derrière la grande majorité des affaires qui concernent des mineurs, se situe une éducation répressive sans dialogue ni confiance ». « D’où la nécessité de changer les mentalités », insiste-t-elle, dénonçant le manque d’intérêt des autorités pour les droits spoliés de l’enfance.
Au cœur du drame de Zeinab, le conflit entre ses parents et ce besoin d’aller chercher protection chez des adultes qui ne sont pas membres de sa famille. « L’enfant paie malheureusement le prix des désaccords parentaux », constate de son côté Bassima Roummani Ballout, coordinatrice du département légal de l’association Himaya. Elle évoque à ce titre « le besoin croissant de nombre d’adolescents de trouver refuge dans les sextings (messages et vidéos à caractère sexuel), plus particulièrement en période de confinement lié au Covid-19 », avec tout ce que cette pratique peut entraîner comme « chantage et pratiques forcées ». En même temps, elle insiste sur la nécessité « de lever l’injustice contre la jeune défunte, victime de médisances et accusée de prostitution ». « Il est impératif de lui rendre justice », souligne-t-elle, invitant les autorités à élucider cette « affaire louche dans la banlieue sud de Beyrouth ».
C’est dans ce cadre que l’Unicef (Fonds des Nations unies pour l’enfance) joue le rôle d’observateur et de coordinateur avec ses ONG partenaires pour apporter le soutien nécessaire à la famille de la jeune victime. « Ce crime est inadmissible, et cette situation traumatisante. Nous nous assurons que tous les besoins de la famille de Zeinab sont assurés, comme le soutien psychosocial ou l’accès à la justice », explique la spécialiste de protection de l’enfance, Nisrine Tawilé. En même temps, vu les rumeurs de violences sexuelles qui ont circulé sur les réseaux sociaux, l’organisation onusienne se penche sur la sensibilisation contre les violences sexuelles faites aux filles. « La violence sexuelle est malheureusement un problème de société. Et seulement quelques cas parviennent aux ONG et à la justice », déplore-t-elle.
Zeinab aurait porté plainte contre son père, selon Kafa
Les associations féministes sont également montées au créneau au nom des femmes victimes de violence familiale et sexuelle. Selon Leila Awada, avocate de l’association Kafa qui lutte contre les violences faites aux femmes, « la malheureuse avait porté plainte contre son père depuis un certain temps pour violences », ce qui expliquerait ses fugues à répétition. « Pourquoi Zeinab a-t-elle fui la maison paternelle ? Pourquoi sa famille ne l’a-t-elle pas protégée ? » demande encore l’avocate, qui ne peut écarter la responsabilité parentale dans le drame. « Les associations de défense des droits de l’enfance et des femmes sont outrées par la légèreté avec laquelle les crimes liés aux filles et aux femmes sont traités », martèle Me Awada. Une légèreté qui se traduit par « la lenteur des autorités dans l’enquête » et la recherche « de circonstances atténuantes » qui innocentent les criminels. « Chose qui ne peut qu’encourager les féminicides », déplore-t-elle.
« Quelles que soient les circonstances de l’assassinat de la jeune Zeinab, une mineure a été tuée avec sauvagerie », dénonce pour sa part Ghida Anani, fondatrice de l’association Abaad qui milite contre les violences sexuelles faites aux femmes. Et ce crime est la preuve d’un « profond mal sociétal, de l’insécurité qui règne dans un pays en crise, de l’absence de limites, de justice et de responsabilité », constate la militante. Ce qui est non seulement « intolérable », mais particulièrement « alarmant ».
Zeinab Husseini n’avait que 14 ans. Elle venait d’une famille pauvre et démembrée. Ses parents étaient séparés et habitaient l’un à Chyah, l’autre à Choueifate. Il y a une semaine, l’adolescente a été sauvagement assassinée, brûlée vive dans un appartement du quartier populaire de Beit Sebahi à deux pas de la municipalité de Bourj Brajneh, dans la banlieue sud de...
commentaires (8)
Malgré le nombre d’articles de luxe dans son dressing, le nombre de carats de diamants qu’elle porte crânement, les voitures de marques qu’elle conduit..... la vie d’une femme au Liban vaut moins que les cosses de la pistache qu’elle vient de mâcher et qu’elle jette dans un cendrier....
JiJii
15 h 16, le 23 septembre 2020