Paris a appelé samedi les responsables politiques libanais à "traduire leurs engagements en actes" et à former un gouvernement conformément aux modalités auxquelles ils s'étaient engagés devant le président français, Emmanuel Macron, rappelant à ces dirigeants que "c'est leur responsabilité qui est en jeu".
"Alors que le Liban traverse une crise sans précédent, la France regrette que les responsables politiques libanais ne soient pas encore parvenus à tenir les engagements qu'ils ont pris le 1er septembre 2020 selon le calendrier annoncé", a indiqué la porte-parole de la diplomatie française, Agnès von der Mühll, lors d'un point presse. "Nous appelons instamment l'ensemble des forces politiques libanaises à prendre leurs responsabilités et à s'accorder sans délai sur la formation par (le Premier ministre désigné) Moustapha Adib d'un gouvernement de mission qui soit à même de lancer les réformes nécessaires pour répondre aux aspirations du peuple libanais", a-t-elle ajouté. Elle a dans ce cadre souligné que les forces politiques libanaises "doivent traduire leurs engagements en actes", comme Paris "le leur rappelle constamment". "C'est leur responsabilité qui est en jeu", a-t-elle affirmé. Et de souligner que "la France se tient pour sa part aux côtés des Libanais, comme elle l'a toujours fait". La porte-parole ne s'est pas prononcée sur les conséquences qu'aurait un échec de la mise sur pied rapide du cabinet.
L'appel du GIS
Toujours sur le plan international, le Groupe international de soutien au Liban (GIS) a appelé les autorités à former "rapidement un gouvernement efficace et crédible". "Les responsables libanais doivent agir pour répondre aux différents besoins du Liban", a-t-il plaidé, dans un communiqué publié samedi. Ce groupe international, créé en 2013, comprend les Nations Unies, la Chine, la France, l'Allemagne, l'Italie, la Russie, le Royaume-Uni, les États-Unis, ainsi que l'Union européenne et la Ligue arabe. "Le GIS appelle les responsables libanais à agir de manière décisive dans un esprit de responsabilité, en donnant la priorité à l'intérêt national. Il les appelle également à former rapidement un gouvernement efficace et crédible, capable de mener des réformes essentielles pour répondre aux défis auxquels fait face le Liban et aux aspirations et besoins légitimes du peuple libanais", ajoute le groupe. Il conclut en appelant une nouvelle fois à "protéger le droit de manifester de manière pacifique", alors que les manifestations antipouvoir sont réprimées dans la violence par les forces de l'ordre et l'armée.
"Faire fructifier" l'initiative française
De leur côté, les anciens présidents du Conseil Saad Hariri, Nagib Mikati, Fouad Siniora et Tammam Salam ont appelé vendredi soir le Premier ministre désigné, Moustapha Adib, à former "le plus rapidement possible" le futur gouvernement, en maintenant "toutes ses prérogatives". "L'initiative française constitue une opportunité importante qu'il faut faire fructifier en se dépêchant de former le futur gouvernement", ont souligné les anciens Premiers ministres dans un communiqué publié à l'issue d'une réunion à la Maison du Centre.
Ils ont estimé que la formation du cabinet était nécessaire pour "éloigner le Liban de l'effondrement, des dissensions et des différents périls qui menacent" le pays. "Nous remercions la France pour son soutien et le lancement de son initiative politique", ajoute le texte, qui appelle à la formation d'un cabinet qui soit conforme au "mandat" prévu "dans la forme et le fond" par Paris. Les anciens présidents du Conseil ont dans ce cadre invité M. Adib à "s'attacher à toutes ses prérogatives pour former le plus rapidement possible un gouvernement, en coordination avec le président de la République et dans le respect de la Constitution".
Les ministères régaliens aux minorités
De son coté, le Courant patriotique libre (CPL, aouniste), a suggéré "d'expérimenter une répartition des ministères dits régaliens entre les confessions minoritaires, et plus spécifiquement les druzes, les alaouites, les arméniens et les minorités chrétiennes". "Le CPL réitère son attachement à la formation rapide d'un gouvernement capable, productif et efficace qui pourra mettre en application le programme de réformes attendu", a souligné le parti dans un communiqué publié à l'issue d'une réunion, par visioconférence, de son bureau politique. Dans ce cadre, il a souligné qu'il ne posait aucune condition ni n'avait aucune revendication concernant le futur cabinet, mais qu'il refusait qu'un ministère soit réservé à une confession ou partie spécifique.
Dans la tradition des tractations gouvernementales libanaises, les quatre ministères dits "régaliens", à savoir les Affaires étrangères, la Défense, les Finances et l'Intérieur - le ministère de la Justice n'a pas ce statut - sont équitablement répartis entre chrétiens (un maronite et un grec-orthodoxe) et musulmans (un sunnite et un chiite).
Vendredi, le président Macron était entré en contact par téléphone avec son homologue libanais, Michel Aoun, et les deux hommes avaient évoqué l'importance de poursuivre les efforts pour assurer la naissance du cabinet, "le plus rapidement possible". M. Macron a également contacté au téléphone plusieurs responsables politiques libanais afin de s'enquérir des tractations portant sur la formation de l'équipe ministérielle.
Conformément à l'engagement pris par les différentes formations politiques lors de la visite à Beyrouth du président français, le 1er septembre, Moustapha Adib était censé former, dans un délai de quinze jours, un cabinet "de mission" composé de spécialistes indépendants en respectant le principe de la rotation des portefeuilles. Cette mission bute toutefois sur les demandes du mouvement Amal et du Hezbollah, qui réclament notamment de nommer eux-mêmes le futur ministre des Finances qui devrait être, selon eux, chiite. Alors qu'une percée semblait avoir été enregistrée dans les tractations autour de ce point, le Premier ministre désigné avait annoncé jeudi qu'il allait s'accorder un peu plus de temps pour mener à bien sa mission. Cette décision était intervenue alors que la France avait accordé dans la matinée de jeudi un nouveau délai pour la mise sur pied du cabinet, jusqu'à dimanche.
commentaires (20)
Pour l’instant il savent traduire "commissions". Pour le reste il faudra attendre une génération ou deux...
Gros Gnon
11 h 15, le 21 septembre 2020