Une vingtaine de groupes issus de la « thaoura » (le soulèvement du 17 octobre) ont constitué un front commun qu’ils ont présenté hier après-midi, en même temps que leur programme d’action, « plan alternatif », à l’heure où le pays s’enfonce dans une crise politique, sociale et économique sans précédent.
Le Bloc national, Beyrouth Madinati, Li Hakki, Al-Marsad al-Shaabi, Tahalof Watani et plusieurs autres groupes de la société civile implantés dans l’ensemble des régions libanaises se sont retrouvés, place des Martyrs, pour une conférence de presse durant laquelle ils ont appelé au départ de la classe politique au pouvoir et à la formation d’un « gouvernement de transition restreint, composé de personnalités indépendantes et doté de pouvoirs législatifs exceptionnels, avec un plan d’action précis établi sur base d’un calendrier-programme ». « Ce gouvernement, expliquent-t-ils dans leur présentation, doit s’engager à respecter la Constitution et le projet d’établissement d’un Etat civil. Il devra être formé sur base des critères définis par les représentants des groupes de la révolution » pour le choix des ministres. Leur appel à un gouvernement de transition fait écho à celui que le patriarche maronite, le cardinal Béchara Raï, avait lancé plus tôt dans la journée, dans son homélie dominicale à Dimane. Il avait réclamé la mise en place d’un « gouvernement restreint de transition avec des pouvoirs déterminés ».
« Le pouvoir a perdu toute légitimité après le 17 octobre et a été enterré sous les cendres le 4 août (lors de la double explosion meurtrière du port de Beyrouth) », expliquent les révolutionnaires dans un communiqué de presse qui retrace les grandes lignes de leur programme.
Les militants appellent à une série de mesures et de réformes dont, notamment, la mise en place d’un gouvernement qui ne soit pas formé de personnalités politiques, l’organisation de législatives anticipées et une enquête « indépendante » pour déterminer les responsabilités après le cataclysme du 4 août. Le groupe dit rejeter tous les gouvernements qui pourraient émaner du pouvoir en place, quelle que soit leur forme. « Nous demandons un gouvernement de transition, restreint et indépendant et bénéficiant de prérogatives exceptionnelles pour légiférer », expliquent les militants, en affirmant refuser d’être représentés dans les équipes ministérielles concoctées par les forces politiques contres lesquelles ils s’élèvent.
Plus tôt dans la journée, la tribune installée par les groupes de la « thaoura », en prévision de leur conférence de presse, avait été vandalisée par quelques dizaines de personnes qui seraient affiliées au Hezbollah et au mouvement Amal. Selon des photos et des vidéos qui ont circulé sur les réseaux sociaux, des jeunes, vêtus de noir et brandissant des bannières de Achoura, commémorée hier, sont arrivés à bord de mobylettes dans le centre-ville de Beyrouth. Plusieurs d’entre eux ont alors cassé des chaises, des écrans, et d’autres équipements installés par les militants anti-pouvoir.
« Le pouvoir en place a prouvé son échec »
Prenant la parole durant l’événement, l’avocat et militant Wassef Haraké est revenu sur les agressions de la matinée et a insisté sur la volonté des activistes de continuer leur lutte pour un changement au sein de la classe politique, malgré les intimidations auxquelles ils font face. « Ce qui s’est passé aujourd’hui prouve que les forces confessionnelles protègent le régime en place. Ceci montre la justesse de notre choix de faire face au pouvoir en place », a lancé M. Haraké. « Nous organisons ce mouvement à la veille des consultations parlementaires contraignantes. Nous voulons faire face à un système qui tente de se régénérer de la même manière », a-t-il ajouté.
Plusieurs figures de la société civile se sont ensuite succédé à la tribune pour détailler le « plan de sauvetage » proposé et pour appeler les Libanais à y adhérer. Ce plan appelle à freiner l’écroulement du pays, à entamer sa reconstruction après les explosions, à mettre en place un système d’aides sociales, à demander des comptes à la classe dirigeante et à remettre l’économie vacillante sur pied. Les militants appellent également à la mise en place d’un plan d’urgence administratif, sécuritaire et environnemental, ainsi qu’à l'élaboration d’un nouveau pacte social non confessionnel et à l’émergence d’une nouvelle classe politique.
« Le pouvoir en place a prouvé son échec en ce qui concerne la protection des Libanais et de leurs biens. Il les a tués et les a appauvris », peut-on lire dans le communiqué des militants. « Ce qui implique aujourd’hui la nécessité d’une transition vers un Etat qui détienne le droit exclusif de la défense du pays face à l’ennemi israélien et face à toute autre agression », ajoute le texte, dans une critique claire à l’arsenal militaire du Hezbollah.
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Ça fait rire
Hitti arlette
21 h 38, le 01 septembre 2020