L’image est presque banale. Elle montre un chef d’État dans la rue, prenant dans ses bras une femme éplorée pour la consoler. C’est un cliché que l’on voit couramment, de par le monde plus ou moins civilisé, aussitôt après des accidents, des catastrophes naturelles, des moments difficiles. Hier, à Gemmayzé, au cœur d’une ville blessée, piétinée, humiliée, meurtrie, cette image n’avait pourtant rien de commun. Question de contexte… La scène se déroule un siècle moins quelques semaines après la proclamation du Grand Liban par un digne représentant de la France, le général Henri Gouraud, et dans la rue qui porte encore son nom. On y voit un autre digne représentant de la France rééditer par son geste cet acte fondateur. Exagération? Non, car d’abord il y a la symbolique très forte de l’image, qu’on la voie sous l’angle historique de la « tendre mère » enlaçant son enfant ou bien, pour rester moderne, sous celui de l’ami fidèle qui est toujours là quand les autres ont déserté. Mais au-delà de cette symbolique, il y a quelque chose de plus fort encore qu’exprime cette femme en se jetant dans les bras d’Emmanuel Macron. Il y a le portrait en négatif du pouvoir libanais en place, totalement absent de cette image qui rassemble, une fois de plus, la France et ce qui fait l’essence du Liban. Ce n’est guère Michel Aoun que la jeune femme embrasse, c’est Emmanuel Macron… Derrière, Michel Aoun est, lui, copieusement hué par des manifestants. Triste devenir pour un homme qui, il y a trente ans, drainait les foules, en dépit ou peut-être à cause de son aventurisme. Quarante-huit heures après l’infâme tragédie, aucun des « hauts » responsables de ce que l’on ose encore nommer l’État libanais n’a voulu ou pu aller réconforter les survivants des quartiers sinistrés de Gemmayzé, de Mar Mikhaël, de Rmeil, de Saïfi, de Jeïtaoui et d’Achrafieh, qui ressemblent par endroits au Berlin de mai 1945, au moment de l’entrée des Russes. Le chef de l’État, il est vrai, s’est rendu sur les lieux de l’épicentre du drame, au port. Mais cette visite accentue le caractère dérisoire de la démarche, dans la mesure où il ne pouvait y avoir là de survivants à réconforter. Du coup, on comprend qu’on n’ait pas voulu pousser plus loin la tournée, par crainte de l’accueil hostile. Qu’est-il donc arrivé au « mandat fort » pour lequel la plus haute institution de l’État, la présidence de la République, a été grossièrement prise en otage pendant deux ans et demi ? S’il a jamais existé, il doit bien avoir sombré dans l’océan profond des dérives du consensualisme, de la corruption, du clientélisme et des exigences et injonctions du parti-État, lui-même inféodé à ses maîtres iraniens ?
Mais tout cela n’est rien. Même la crise financière, la saga grotesque de l’électricité, la gestion désastreuse des déchets et toutes les autres marques de l’incurie politicienne et administrative ne sont rien devant l’infamie du mardi 4 août 2020 pour laquelle il faudra sérieusement payer, surtout si elle est suivie d’une autre infamie, consistant à sanctionner les petits, déjà lâchés entre eux, afin que les grands soient protégés. Mais il n’y a plus de grands. Pas même la milice iranienne, dont il convient ici de souligner que la présence, l’influence et les intérêts opaques au port de Beyrouth sont notoires… Alors accident ou attentat, bombe ou missile, Israël ou le hasard, peu nous chaut ! Voilà à peu près le message que les survivants sinistrés de Beyrouth ont tenté de faire parvenir à Emmanuel Macron et à la communauté internationale. L’État libanais, le vrai, n’est pas, ne peut pas être ce monstre qui est en place aujourd’hui. Ignorez-le, contournez-le, faites comme s’il n’existait pas. Et d’abord qu’on ne le laisse surtout pas mener seul l’enquête sur les explosions du 4 août, et que l’aide internationale ne soit pas accordée par son biais. Sur ces derniers points comme sur d’autres, Emmanuel Macron a montré hier soir qu’il avait franchi un pas décisif.
Avant Alun tout n’était rose certes, mais il a pris le soin de donner le coup de massue fatale a son pays en s’alliant avec le diable et racler les fonds des caisses publiques pour que son gendre et sa famille change de statut social et accède à la haute bourgeoisie alors qu’ils ne sont que des ploucs et le resteront pour le restant de leur vie entachée de vol et de trahison.
11 h 14, le 08 août 2020