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Société - Contestation

Devant le Palais de justice et ailleurs, colère, sit-in et coupures de routes

De nombreuses manifs ont eu lieu pour protester contre les arrestations, les atteintes aux libertés, les conditions sociales dégradées et... la réunion de Baabda.


Devant le Palais de justice et ailleurs, colère, sit-in et coupures de routes

Lors d’une manifestation, hier, sur la route du palais présidentiel. Photos João Sousa

Plusieurs manifestations ont eu lieu hier à Beyrouth, ainsi que dans d’autres régions du pays, en parallèle à la tenue de la réunion de dialogue national très controversée à Baabda, sur invitation du président de la République, Michel Aoun. Le désespoir grandissant des protestataires qui font face, depuis le 17 octobre dernier, à l’indifférence, l’incompétence et/ou l’impuissance des autorités et aux dérives de la classe au pouvoir s’est cristallisé à travers des heurts survenus devant le Palais de justice de Beyrouth entre les forces de l’ordre et les familles de certaines jeunes personnes interpellées cette semaine, la plupart. Rassemblées pour protester contre l’arrestation depuis le début de la semaine d’un total de 34 militants, dont la plupart sont accusés d’avoir pris part aux violences survenues dans le centre-ville de Beyrouth les 11 et 12 juin derniers, les familles ont menacé de recourir à des mesures d’escalade si elles n’obtenaient pas gain de cause.

Des échauffourées ont alors éclaté entre les parents des jeunes interpellés et les forces de l’ordre qui cherchaient à disperser la foule par la force. Visiblement désespéré, le père d’un des détenus s’est aspergé d’essence avant de tenter de s’immoler par le feu, mais il a finalement été empêché de le faire par les militants présents sur place. Des vidéos tournées sur les lieux et diffusées sur les réseaux sociaux montrent des mères en pleurs affichant les photos de leurs fils détenus, témoignant ainsi de l’ampleur de la répression affichée dernièrement par les forces de l’ordre à l’encontre des contestataires. Parmi les jeunes interpellés, 21 personnes issues de la Békaa et qui risquent de faire l’objet de poursuites, onze jeunes arrêtés avant-hier à Chanay (caza de Aley) alors qu’ils bloquaient une route, un militant arrêté il y a quelques jours à Jounieh et un autre interpellé mercredi soir au centre-ville de Beyrouth dans des circonstances floues.

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Interrogé par L’Orient-Le Jour, Naël Qaëdbey, membre du comité des avocats pour la défense des manifestants, confirme avoir remarqué dernièrement des agissements inquiétants de la part des services de sécurité. « Ce que nous voyons dernièrement montre que nous nous dirigeons de plus en plus vers un État policier. Avant, il y avait des arrestations lors des manifestations. Maintenant, il y a des convocations qui ne sont pas toujours sérieuses, surtout concernant la nature du crime imputé aux personnes convoquées. On arrête par exemple quelqu’un pour atteinte à la personne du président, alors qu’il n’en est rien. Il arrive même qu’on accuse un militant d’avoir tenté de tuer un militaire, si ce dernier a été blessé lors d’une manifestation, déplore l’avocat. Sans oublier la torture de nombreuses personnes interpellées en marge des manifestations. Nous avons documenté plusieurs cas de torture et nous avons porté plainte dans le cadre de certaines affaires mais personne n’a été inquiété pour l’instant. Nos plaintes sont restées lettre morte », souligne Me Qaëdbey. Ses propos intervenaient deux jours après une intervention musclée du patriarche maronite, Béchara Raï, dans laquelle il avait dénoncé une dérive vers l’État policier.


Un homme a tenté de s’immoler par le feu hier, devant le Palais de justice de Beyrouth. Photo João Sousa


Arrestations arbitraires

Parallèlement à la réunion de Baabda, un rassemblement en faveur de la liberté d’expression a été tenu sur la place Samir Kassir dans le centre-ville de la capitale, en signe de protestation contre les « arrestations arbitraires », selon un collectif de journalistes.

Ce type d’arrestations est devenu monnaie courante ces derniers mois, le pays était soumis à un inquiétant climat de répression des libertés. Des militants antipouvoir, des journalistes ou des internautes critiques des autorités sont souvent interrogés ou même détenus par les services de sécurité. L’une des porte-parole du collectif Journalistes pour la liberté, qui organisait ce rassemblement, a interpellé les autorités. « Nous mettons en garde les responsables réunis au palais de Baabda (...) contre cette dérive vers la répression des libertés (...). La responsabilité de toute agression contre les journalistes incombe aux autorités. Les journalistes ne serviront pas de boucs émissaires (...). Gare à l’atteinte aux valeurs fondatrices du Liban », a déclaré la porte-parole, en référence notamment à des agressions mercredi soir contre des photographes de presse couvrant les manifestations sur le Ring Fouad Chéhab.

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D’autres rassemblements ont été organisés ailleurs dans le pays. Ainsi, à Nabatiyé, au Liban-Sud, un sit-in a eu lieu devant le sérail pour protester contre la situation économique du pays et l’envolée du dollar face à la livre. Sur un autre plan, des activistes se sont rassemblés devant le sérail de Jounieh pour protester contre la détention du militant Dany Farah, interrogé depuis hier soir dans la foulée des incidents de Jounieh. Par ailleurs, des routes ont été coupées dans la région de Baalbeck. En soirée, des manifestants ont bloqué la circulation à Tripoli, au niveau de la place el-Nour. De même à Beyrouth où des militants ont coupé la route au niveau du Ring.


Une femme brandit la photo d’un des 34 militants interpellés par les forces de sécurité cette semaine. Photo Joao Sousa


« Dégagez ! »
Plus tôt dans la journée, une manifestation a été organisée sur la route menant au palais présidentiel au moment où se déroulait la réunion de Baabda. Les contestataires ont brandi des slogans appelant au départ de la classe dirigeante. Ces manifestants ont été rejoints par quelques personnes venues réclamer l’application de la résolution 1559 du Conseil de sécurité de l’ONU portant sur le désarmement des milices, et qui vise principalement le Hezbollah. Selon des témoins présents sur place, ces derniers ont rapidement quitté la manifestation, à la demande des autres contestataires qui souhaitaient se concentrer sur les demandes à caractère socio-économique. Lors d’une manifestation organisée le 6 juin à Beyrouth, des heurts avaient eu lieu sur le Ring, à Beyrouth, entre manifestants antipouvoir et partisans du tandem chiite, après que certains eurent brandi des slogans en faveur de l’application de la 1559.

« Nous sommes là pour dire “non à la répression des libertés”. Nous sommes fatigués, nous sommes dans la rue car nous réclamons de l’aide, pas pour subir la répression. Mais nous ne nous tairons pas », a confié Rania, une manifestante de 36 ans, à L’Orient-Le Jour. « Notre seule demande concerne cette classe corrompue, et non pas les armes illégales », a-t-elle ajouté. « Laissez-nous tranquilles, tous sans exception », a lancé une autre manifestante, Sylvia, à l’adresse des responsables. Pour le cheikh druze Chawki Hatoum, venu du village de Kfar Selouane, sur les hauteurs du Metn-Sud, cette classe politique « a affamé le peuple. Assez de mensonges ! Dégagez ! », a-t-il lancé, excédé.


Plusieurs manifestations ont eu lieu hier à Beyrouth, ainsi que dans d’autres régions du pays, en parallèle à la tenue de la réunion de dialogue national très controversée à Baabda, sur invitation du président de la République, Michel Aoun. Le désespoir grandissant des protestataires qui font face, depuis le 17 octobre dernier, à l’indifférence, l’incompétence et/ou...

commentaires (2)

La censure, l'autoritarisme et l'obscurantisme rôdent! La vie et la survie des libanais compte, Application de la 1559 avant tout!

TrucMuche

13 h 34, le 26 juin 2020

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Commentaires (2)

  • La censure, l'autoritarisme et l'obscurantisme rôdent! La vie et la survie des libanais compte, Application de la 1559 avant tout!

    TrucMuche

    13 h 34, le 26 juin 2020

  • GARE A LA REVOLUTION QUI GRONDE. L,EXPLOSION EST PROCHE.IL Y A DES VOYOUS MANIPULES ET BIEN CONNUS A QUELS CAMPS ILS APPARTIENNENT PRETS A METTRE LE FEU AUX POUDRES DANS LE PAYS POUR ESSAYER D,Y ASSEOIR LEUR MAINMISE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 20, le 26 juin 2020

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