Deux semaines après le début du soulèvement populaire du 17 octobre, le chef des Kataëb, Samy Gemayel, s’est efforcé de saisir au vol les principales revendications des manifestants, notamment la tenue d’élections législatives anticipées pour renouveler la classe dirigeante. Avec son bloc parlementaire réduit (trois députés), il a présenté une proposition de loi revêtue du caractère de double urgence, visant à réduire le mandat de la Chambre issue des élections du 6 mai 2018, dans la perspective d’un scrutin anticipé en mai ou juin 2020.
Le Parlement, réuni mercredi au palais de l’Unesco, a cependant décidé de renvoyer le projet en commission pour un nouvel examen, après avoir considéré que le caractère de double urgence ne se justifiait pas. En dépit du fait que de nombreuses voix se sont jointes à M. Gemayel et son parti pour réclamer la tenue d’élections anticipés, seuls 21 députés au total ont fini par voter pour le maintien du caractère de double urgence de la proposition. Il s’agit des trois députés Kataëb : Samy Gemayel, Élias Hankache et Nadim Gemayel ; de trois membres nordiques du bloc du Futur : Dima Jamali (Tripoli), Sami Fatfat (Denniyé) et Tarek Merhebi (Akkar); de six députés des Forces libanaises : Ziad Hawat (Jbeil), Chawki Daccache (Kesrouan), Georges Adwan (Chouf), Georges Okaïs (Zahlé), Anis Nassar (Aley) et Pierre Bou Assi (Baabda) ; de trois joumblattistes : Bilal Abdallah, Fayçal Sayegh et Waël Bou Faour ; de trois des quatre membres du bloc Mikati : Nagib Mikati, Nicolas Nahas et Ali Darwiche (tous trois députés de Tripoli) ; de même que des indépendants Paula Yacoubian (Beyrouth), Eddy Demerjian (Zahlé) et Michel Moawad (Zghorta).Le projet semble ainsi avoir été renvoyé aux calendes grecques, selon certains observateurs.
S’agit-il d’un règlement de comptes avec l’opposition, dont les Kataëb se veulent le fer de lance ? « Qu’ils fassent ce qu’ils veulent », déclare Samy Gemayel dans un entretien accordé à L’Orient-Le Jour. Pour lui, le problème est beaucoup plus profond que les habituelles querelles liées à la politique politicienne. « Ce qui s’est passé prouve que ce Parlement ne veut permettre à personne de lui réclamer des comptes », s’alarme le député du Metn, avant de poursuivre : « Cela nous a également montré que, désormais, les gens devraient compter sur leurs propres forces et moyens de pression pour susciter le changement qu’il désirent parce que celui-ci ne peut plus avoir lieu à partir des institutions. » Mais pour autant, M. Gemayel n’entend pas, pas plus que ses deux collègues du bloc, démissionner de son mandat de député. « Cela ne déboucherait pas sur des législatives anticipées et ne ferait qu’étouffer la voix de l’opposition, ce qui permettrait (au pouvoir) de commettre des irrégularités à l’encontre du peuple. Nous ne leur offrirons pas ce cadeau », dit-il.
« Crime contre le peuple »
« Nombreux sont ceux qui voulaient reprendre en écho les revendications du mouvement de contestation. Au vu de cela, nous aurions dû être 50 députés à voter cette proposition de loi, et non pas 21 seulement », déplore le leader des Kataëb.
Ces propos de M. Gemayel sont clairement une pique adressée tant au courant du Futur qu’aux Forces libanaises, dont les rapports avec les Kataëb sont en dents de scie depuis la mise sur pied du compromis présidentiel de 2016. Ces deux formations, tout comme le bloc joumblattiste, n’auront au final mobilisé qu’une partie minoritaire de leurs effectifs parlementaires en faveur de la proposition de loi alors même qu’elles s’étaient montrées, à plusieurs reprises, favorables aux demandes de la rue en ébullition.
En tout état de cause, Samy Gemayel tranche la question une fois pour toutes : « Nous estimons que les protagonistes qui ont pris part au compromis présidentiel sont responsables du crime commis à l’encontre du peuple libanais », lance-t-il.
Pour ce qui est du Hezbollah, Samy Gemayel s’abstient de lui imputer la responsabilité de l’échec de sa proposition de loi. « Mais le Hezbollah est responsable de la situation actuelle du Liban dans la mesure où, depuis la présidentielle de 2016, il a isolé (le pays) de son entourage », dit-il.
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commentaires (11)
VERITE VRAIE EFFARANTE TELLE QU' ENONCEE SANS LANGUE DE BOIS PAR MR. GEMAYEL. TREVE DE CONNERIES ET DE BLA BLA. RESTE A TROUVER LA SOLUTION ET GUIDER CE CABINET OU UN AUTRE A L'APPLIQUER- AVEC TOUT L'APPUI NECESSAIRE.
Gaby SIOUFI
15 h 01, le 24 avril 2020