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Économie - Crise

Le président du syndicat des boulangers démissionne, en pleine guerre avec le ministère de l’Économie

Le ministre de l’Économie, Raoul Nehmé, effectuant une tournée dans des boulangeries, le 21 avril 2020. Photo Twitter/@RaoulNehme

Le président de la fédération des syndicats des boulangeries au Liban, Ali Ibrahim, a présenté hier sa démission, seulement deux mois après avoir été nommé à ce poste, succédant à son père Kazem Ibrahim.

Cette décision inattendue s’inscrit dans un contexte de conflit concernant la fixation du prix du pain entre le syndicat et le ministre de l’Économie et du Commerce, Raoul Nehmé, qui a participé hier à une tournée des inspecteurs du ministère visant à contrôler les prix dans plusieurs boulangeries. Un bras de fer qui intervient enfin à un moment où le pays traverse la pire crise économique et financière de ces dernières décennies.

Dans le communiqué publié pour relayer sa décision, l’ancien président du syndicat a dénoncé « l’insouciance des responsables » qu’il accuse de ne pas « avoir trouvé de solution au secteur » qui réclame une hausse des prix – qui sont plafonnés par le ministère. Selon lui, la filière pâtit depuis la fin de l’été 2019 de la dépréciation de la livre, le taux ayant atteint hier 3 250 livres pour un dollar acheté, une inflation liée au resserrement de la circulation du billet vert dans l’économie.

Les boulangers font partie des premières filières, avec les minotiers, les importateurs de carburant et ceux de produits pharmaceutiques, à avoir tiré la sonnette d’alarme depuis les premiers signes de la dépréciation de la livre, poussant la BDL à mettre en place début octobre un mécanisme qui permet de fournir des dollars au taux officiel de 1 507,5 livres pour un dollar aux minotiers, afin qu’ils puissent importer du blé. Le but de la manœuvre est de ne pas répercuter la hausse du prix du dollar sur le prix des biens essentiels, comme le pain.

Après un retour relatif au calme, le débat a été relancé un mois après la nomination, fin janvier, du nouveau ministre de l’Économie, Raoul Nehmé, qui a rapidement annoncé son intention de créer une commission qui fixe le prix du pain en fonction de celui des matières premières servant à sa fabrication.

Mensonge sur le prix

Or selon une source au ministère, les boulangers ne payent que le sucre, la levure, le sel et les sacs nylons en dollars, mais l’ensemble de ces produits ne représente qu’une infime partie de leur fabrication (ils peuvent payer la farine aux minotiers en livres).

Un argumentaire repris par le ministre lors de sa tournée hier avec les équipes de la Protection du consommateur partis inspecter le prix et le poids du pain vendu dans plusieurs points de vente dans la périphérie de la capitale. Pas moins de quatorze procès-verbaux ont été dressés à l’issue de cette sortie – médiatisée – du ministre.

Les boulangers doivent vendre la « rabta » (sac) de pain blanc d’un kilo à 1 500 livres. Mais selon Raoul Nehmé, « huit boulangeries ont passé un accord pour fixer le poids du paquet de pain à 900g, alors que dans certaines régions, le paquet est vendu à 1 750 livres libanaises ». Le ministre a également rappelé que les boulangers payent « les salaires, l’eau et l’électricité » en livres, considérant leurs revendications injustifiées. Quant au sac en nylon, Raoul Nehmé les accuse de mentir sur le prix d’achat, qui s’élève à 2,2 dollars le kilo, au lieu des 2,6 dollars déclarés, et souhaite donc obtenir les factures.

Selon une étude menée par le ministère, les boulangers obtiennent une marge de 22 % sur chaque sac de pain vendu dans leurs locaux et de 12 % lorsque l’opération commerciale a lieu chez un revendeur (supérette et supermarché), considérant le dollar à 3 200 livres. Ce qui explique pourquoi le ministère a refusé d’augmenter le prix de gros (prix entre la boulangerie et un intermédiaire), selon une source interne. De plus, cette mesure aurait pour conséquence l’augmentation du prix du pain dans les zones rurales, où le pouvoir d’achat est plus faible que celui de la capitale Beyrouth, où se concentrent la majorité des boulangeries. Provoquant ainsi la colère des boulangers, ils ont donc annoncé jeudi qu’ils n’allaient plus vendre de pain en dehors de leurs locaux, avant de se rétracter dimanche. Une réunion avec le ministère est prévue demain et est maintenue malgré la démission du président du syndicat des boulangers.

Le président de la fédération des syndicats des boulangeries au Liban, Ali Ibrahim, a présenté hier sa démission, seulement deux mois après avoir été nommé à ce poste, succédant à son père Kazem Ibrahim. Cette décision inattendue s’inscrit dans un contexte de conflit concernant la fixation du prix du pain entre le syndicat et le ministre de l’Économie et du Commerce, Raoul...

commentaires (3)

Franchement les supermarchés et les supérettes peuvent se dispenser de cette marge de 250LL sur le paquet de pain libanais au profit des boulangeries. Ils font assez de marge sur les autres produits

Lecteur excédé par la censure

19 h 48, le 22 avril 2020

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Commentaires (3)

  • Franchement les supermarchés et les supérettes peuvent se dispenser de cette marge de 250LL sur le paquet de pain libanais au profit des boulangeries. Ils font assez de marge sur les autres produits

    Lecteur excédé par la censure

    19 h 48, le 22 avril 2020

  • Dicton importé à faible coût "comme un elephant dans un rayon de Crystal" au taux de change actuel on peut le dire en libanais "èm el déb ta yor'oss..." Notre état démantèle tout même les boulangeries et les syndicats... Mon fils a voulu réparer son ordinateur, le voilà avec un tas de pièces et de vis à la recherche d'un nouvel ordi... Il a appris sa leçon...et notre Gouvernement??

    Wlek Sanferlou

    14 h 36, le 22 avril 2020

  • "...seulement deux mois après avoir été nommé à ce poste, succédant à son père Kazem Ibrahim." C'est hereditaire chez les syndicats aussi? Pauvre mioche, juste 2 mois...

    Fadi Chami

    08 h 09, le 22 avril 2020

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