Rechercher
Rechercher

Nos Lecteurs ont la Parole

C’est tout le système libéral qui est en danger

Depuis le déclenchement, ou plutôt depuis l’éclatement au grand jour, de la crise « dite » économique, un terme, jusqu’ici propre au jargon de nos « figaros », revient sur toutes les lèvres, le « haircut ».

Il ne s’agit plus d’une coupe de cheveux « tendance » mais d’un grignotage, voire d’un « risque » de charcutage des dépôts ouverts auprès des banques de la place.

Économistes, financiers, fiscalistes, banquiers et autres professionnels avisés ou amateurs profanes ont décrit, chacun à sa manière, par des « chiffres et des lettres » le mécanisme académique du « haircut » calqué sur certains systèmes ou puisé dans les manuels et les ouvrages.

Mais comme le disait Honoré de Balzac : « Tout cela est bien, mon ami, mais revenons à la réalité et parlons d’Eugénie Grandet » (La Comédie humaine).

Nous entendons souvent parler du « secteur bancaire », dans son ensemble, comme s’il s’agissait d’une entité autonome dotée d’une personnalité morale distincte à qui il fallait demander de rendre des comptes.

Il n’en est rien.

À ceux qui avancent cette notion de « haircut » nous dirons, tout simplement, qu’ils ne sont pas sans savoir que les dépôts ouverts auprès des banques sont, tout aussi bien, régis par des conventions spécifiques passées « individuellement » entre ces dernières et leurs clients, les « déposants », lesquelles constituent la « charte des parties » ; mais aussi, et surtout, par une législation en vigueur.

Faut-il leur rappeler, à ce propos, qu’en vertu de l’article 307/alinéas /1/et /3/ du code de commerce libanais, la banque qui reçoit en dépôt une somme d’argent doit la restituer en quantité équivalente à la première réquisition du déposant ou dans les conditions de délai ou de préavis fixées dans le contrat. Cela concerne aussi bien le principal que les intérêts générés.

Il ne s’agit donc pas d’un choix laissé aux banques mais d’une obligation. Et nous sommes bel et bien en présence d’un texte de loi. Les autorités gouvernementales, monétaires, judiciaires et autres restent les garantes de la bonne application.

Certes, entreprendre des réformes, combattre la corruption et récupérer les deniers publics, « égarés dans la nature », sont une obligation et une priorité ; la classe dirigeante en a fait son « slogan » et sa « feuille de route ». Mais ce n’est certes pas auprès du déposant, « maillon faible », qu’il convient d’aller les récupérer ; il n’est nullement tenu pour responsable de leur dilapidation.

Les dirigeants le savent pertinemment et savent aussi bien où les retrouver.

Nous leur dirons : il est grand temps que vous aiguisiez vos « lames » car il ne s’agit plus d’une simple « coupe de cheveux » mais d’un « rasage de très près » qu’il convient que vous y apportiez.

Que l’État cherche à s’immiscer dans les rapports entre particuliers, en l’occurrence entre la banque et son client, est une mesure qui va à l’encontre de la législation en vigueur, voire de tout un système libéral. En admettre le contraire nous conduirait à nouveau dans les dédales d’une fâcheuse expérience qui remonte au siècle dernier, plus spécifiquement la « loi sur les loyers » des immeubles bâtis, dont les retombées continuent à se faire ressentir jusqu’à nos jours.

En revanche, s’il devait y avoir immixtion de la part des instances gouvernementales, elle ne peut s’entendre que par une aide et un appui à apporter aux « déposants » dans leur totalité (la loi n’ayant pas opéré une classification des comptes par ordre de volume), en vue de la sauvegarde et de la récupération de leurs dépôts par tous les moyens.

Les représentants de divers ordres et syndicats de professions libérales et ceux des fonds sociaux, dont la CNSS, réunis en date du 9 avril 2020 à l’initiative du bâtonnier de l’ordre des avocats de Beyrouth, Melhem Khalaf, sont montés au créneau et en sont le porte-étendard.

La classe dirigeante est-elle consciente du préjudice que cela peut causer à l’un des piliers, qualifié jusque-là de « fleuron », de notre économie ?

Est-elle consciente que c’est tout un système libéral qui est mis en danger ?

Reprendre confiance ne sera plus chose aisée !

Nous espérons qu’elle sera de bonne inspiration.

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour.

Depuis le déclenchement, ou plutôt depuis l’éclatement au grand jour, de la crise « dite » économique, un terme, jusqu’ici propre au jargon de nos « figaros », revient sur toutes les lèvres, le « haircut ».Il ne s’agit plus d’une coupe de cheveux « tendance » mais d’un grignotage, voire d’un « risque » de...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut