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À La Une - Pandémie

Ces vies perdues derrière les chiffres du coronavirus

Plus de 50.000 personnes ont succombé à la maladie dans le monde : jeunes et âgés, hommes et femmes, patients et soignants. Voici l'histoire de cinq victimes, directes et indirectes, du virus en Europe.

Enterrement d'une victime du coronavirus à Tegucigalpa, au Honduras, le 31 mars 2020. REUTERS/Jorge Cabrera

L'ampleur de la pandémie de Covid-19, dont le nombre de décès enfle d'heure en heure, obscurcit parfois les tragédies individuelles. Plus de 50.000 personnes ont succombé à la maladie dans le monde : jeunes et âgés, hommes et femmes, patients et soignants. Voici l'histoire de cinq victimes, directes et indirectes, du virus en Europe.


Diego Blanco, 46 ans : "Je ne vais pas mourir"

Diego Blanco est mort chez lui le 13 mars. Ambulancier, il travaillait dans un hôpital de Bergame, épicentre de la pandémie en Italie. Testé positif au Covid-19 début mars, il est isolé à son domicile, son état de santé ne semblant pas alarmant. Le jour avant sa mort, il murmure à sa femme, Maruska Capoferri : "Va te coucher, ma chérie, je ne vais pas mourir." "Mais tu crois que tu es en train de mourir ?" lui demande-t-elle, à moitié ironique. "Ne me fais pas cette blague, hein ?" Elle quitte alors la chambre. Quand Maruska revient deux heures plus tard pour contrôler l'état de santé de Diego, il était "trop tard", raconte-t-elle au journal l'Eco di Bergamo. Son mari est mort d'une crise respiratoire soudaine et aiguë, suivie d'un arrêt cardiaque. "Je lui ai fait un massage cardiaque", se souvient-elle. Après leur arrivée, les ambulanciers "ont essayé de l'intuber. Mais il n'y avait rien à faire". "Pour lui, aider les autres était une mission", dit Maruska, mère d'Alessio, sept ans. La famille est parmi les premières à avoir reçu une indemnisation annuelle de 20.000 euros de l'Etat en tant que proches d'une victime d'un accident du travail. Diego Blanco ne fumait pas, ne buvait pas et n'avait pas d'autres pathologies. "Je ne l'aurais jamais cru", explique Maruska, qui se console en se disant que d'autres malades atteints du coronavirus meurent seuls. "Il m'a dit au revoir", dit-elle.



(Lire aussi : Coronavirus : des symptômes variables, mais caractéristiques)



Julie A., 16 ans : "On n'aura jamais de réponse" 

Tout a commencé avec une simple toux. Une semaine plus tard, le mercredi 25 mars, Julie est morte du coronavirus à Paris, faisant d'elle la plus jeune victime française de la pandémie. "On n'aura jamais de réponse", déplore Sabine, la mère de la jeune fille, à l'AFP. "Elle avait juste une toux", répète-t-elle. Julie tente d'abord de se soigner avec du sirop, mais commence ensuite à ressentir des essoufflements. Sa mère la conduit lundi chez le médecin, qui décide d'appeler le Samu. Ils emmènent la jeune fille vers l'hôpital le plus proche, à Longjumeau, dans l'Essonne. Un test au Covid-19 est en cours. Dans la nuit, Julie, en insuffisance respiratoire, est transférée à l'hôpital Necker pour enfants, à Paris. Deux autres tests sont menés. Julie est admise en réanimation mardi. "J'ai mal à mon cœur", dit-elle alors à sa mère. Les résultats des deux derniers tests au Covid-19 se révèlent toutefois négatifs. Sabine rentre chez elle. Tard dans la soirée, un appel : le premier test était en fait positif au Covid-19, l'état de Julie se dégrade, elle doit être intubée. "Depuis le début, on nous dit que le virus ne touche pas les jeunes. On l'a cru, comme tout le monde", explique la sœur aînée de Julie, Manon. Un peu après minuit, Sabine reçoit un nouvel appel de l'hôpital, lui disant de venir "vite". Elle et Manon se précipitent à Paris, mais Julie est morte à leur arrivée. "Sa peau était encore tiède", se rappelle Sabine.


Tim Galley, 47 ans : "Il était tout seul" 

Tim Galley est l'une des plus jeunes victimes du Covid-19 en Grande-Bretagne. Il est décédé le 24 mars à son domicile de Wrexham, au pays de Galles. Il a été retrouvé dans son lit par un voisin chargé de le surveiller, selon sa petite amie Donna Cuthbert. "Je ne peux simplement pas supporter l'idée qu'il était tout seul", déclare-t-elle au média local North Wales Live. Tim avait développé des symptômes dix jours plus tôt, explique Donna. Autoconfiné, il a refusé de solliciter une aide médicale afin de laisser la priorité aux personnes les plus vulnérables. Les autorités sanitaires britanniques ont enjoint aux personnes avec des symptômes apparents de coronavirus de s'auto-isoler pendant une semaine et de ne réclamer une assistance médicale que si leur état se détériore nettement. "Tim a suivi les directives et pris les précautions, mais ce virus cruel l'a quand même emporté", a écrit Donna sur Facebook. "Mon cœur est brisé en morceaux et mes enfants sont vraiment dévastés", a-t-elle ajouté. L'histoire de Tim Galley a entraîné des centaines de messages de sympathie. Employé dans une banque, il a été décrit par un ami comme "une personne aimable et appréciée de tous".


(Lire aussi : « Je n’aurais jamais imaginé que je puisse être contaminée par le coronavirus »)



Sara Bravo Lopez, 28 ans : "Très jeune"

Avant d'être emportée par le coronavirus, Sara Bravo Lopez était une jeune médecin de famille dans une petite ville du centre de l'Espagne, deuxième pays le plus endeuillé par le Covid-19 après l'Italie. Elle "est morte du coronavirus, très jeune, à 28 ans, ce qui n'est pas normal", a indiqué à l'AFP un porte-parole de l'hôpital Mancha Centro de Alcázar de San Juan, où elle décédée le 28 mars. Sara soignait des patients à Mota del Cuervo, commune de 6.000 habitants située entre Madrid et Valence. "Elle était très aimée par ses voisins du village et au centre de santé par ses camarades", a ajouté le porte-parole. "Elle a gagné l'affection et la considération de voisins et de collègues grâce à ses valeurs humaines, à son remarquable engagement et à son attitude professionnelle au service de ses patients", a aussi salué l'hôpital sur Facebook. Comme Sara, plus de 12.000 soignants ont été contaminés par le Covid-19 en Espagne où le personnel de santé demande d'urgence plus de lits et de matériel sanitaire pour combattre la pandémie.


(Lire aussi : Raymond Sayegh, convalescent, raconte la grande solitude des malades du coronavirus)


 Wojciech Rokita, 54 ans : le suicide d'un médecin

En Pologne, où l'épidémie reste relativement limitée, le coronavirus a aussi tué par ricochet : le suicide d'un médecin respecté, contaminé et visé par des messages haineux l'accusant d'avoir infecté d'autres personnes, a soulevé beaucoup d'émotion. Le professeur Wojciech Rokita, directeur d'une clinique de gynécologie-obstétrique réputée au Centre hospitalier régional de Kielce (centre), qui venait de rentrer d'un voyage en Suisse, a ressenti des symptômes de contamination à la mi-mars. Il a été mis en quarantaine, son état était jugé bon. Tant son hôpital que les autorités régionales ont assuré qu'il n'avait eu aucun contact avec les patients ou le personnel. Mais d'après les médias locaux, quatre infirmières de la clinique des maladies infectieuses où il avait subi des prélèvements ont également été mises en quarantaine. Un média local a affirmé - sans toutefois mentionner son nom - qu'avant de se faire examiner, il s'était rendu chez un concessionnaire automobile. Une vague de commentaires haineux sur internet a suivi. La direction de l'hôpital a annoncé sa mort le 18 mars, précisant seulement qu'elle n'était pas due "directement" au Covid-19. Il a ensuite été établi que le gynécologue s'était suicidé. Selon ses proches, son geste était dû aux accusations sur le web. Sa famille et la branche locale de l'ordre des médecins ont annoncé qu'ils allaient porter plainte contre X, et plainte pour complicité contre le média concerné.



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