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Culture - VIRUS

La voile

Depuis qu’elle est au ralenti, la planète revêt soudain une taille humaine. Elle nous apparaît comme à nos yeux d’enfant : sous forme de globe, pivotant au gré d’un doigt d’un pays à l’autre, de l’Arctique à l’Antarctique. Tout se passe comme si la géographie était frappée de nanisme par le virus; comme si l’immensité du monde était absorbée par son soudain silence, comme si, entre lui et nous, les distances n’étaient plus ce qu’elles étaient. Ce renversement d’échelle, cette sensation de commune forteresse, m’ont ramenée instinctivement au Rivage des Syrtes de Julien Gracq. À « cette petite cellule de vie assoupie, tremblante à l’extrême bord du désert ». Rien que cette phrase : « Du fond de la pénombre de ce réduit suspendu en plein ciel, dans cet encadrement nu de pierres cyclopéennes, je voyais osciller jusqu’à l’écœurement une seule nappe sombre et éblouissante d’un bleu diamanté, qui nouait et dénouait comme dans une grotte marine des maillons de soleil au long des pierres grises (…) J’attendais, sans me le dire, un signal qui puiserait dans cette attente démesurée la confirmation d’un prodige. Je rêvais d’une voile naissant du vide de la mer. » Ne sommes-nous pas, tous, arabes, européens ou chinois, riches ou pauvres, jeunes ou vieux, chacun chacune chez soi, en train de rêver à une voile naissant du vide de la mer ?


NDLR : cette capsule intitulée « Virus » contiendra, jour après jour, durant le confinement, des fragments de pensée, des citations, des instants pris au vol.

Depuis qu’elle est au ralenti, la planète revêt soudain une taille humaine. Elle nous apparaît comme à nos yeux d’enfant : sous forme de globe, pivotant au gré d’un doigt d’un pays à l’autre, de l’Arctique à l’Antarctique. Tout se passe comme si la géographie était frappée de nanisme par le virus; comme si l’immensité du monde était absorbée par son soudain...

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