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À La Une - tensions

La Grèce renforce sa présence en Méditerranée pour contrer la Turquie

"Vous entraînez le pays dans des aventures qui dépassent sa capacité et changent la politique étrangère suivie depuis des décennies", fustige l'ex-Premier ministre Alexis Tsipras.

Le porte-avion français Charles de Gaulle, en Méditerranée, le 8 février 2019. Une frégate grecque participe depuis début février 2020 à la mission de ce porte-avion dans l'est de la Méditerranée, afin d'appuyer les opérations antjihadistes en Syrie et en Irak, mais aussi d'assurer la stabilité dans la région. Photo d'archives AFP / VALERY HACHE

La Grèce s'engage depuis peu sur le terrain de la défense aux côtés de ses alliés français et américains en Méditerranée, espérant obtenir leur soutien face à la Turquie voisine et attirer leurs investissements.

Sur fond de tensions en Méditerranée orientale, le gouvernement conservateur a, en un seul mois, renforcé sa coopération stratégique avec Paris, relancé un accord militaire avec Washington et décidé de l'envoi de missiles Patriot en Arabie Saoudite. En outre, une frégate grecque participe depuis la semaine dernière à la mission du porte-avion français Charles-de-Gaulle dans l'est de la Méditerranée. L'objectif officiel de cette mission est d'appuyer les opérations antjihadistes en Syrie et en Irak, mais aussi d'assurer la stabilité dans la région.

Lors du vote récent au Parlement d'un accord de défense gréco-américain, le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis s'est félicité du "renforcement de l'alliance stratégique avec les Etats-Unis", soulignant par ailleurs que la coopération militaire avec la France "n'a jamais été meilleure".

Elle vient s'ajouter aux récentes démarches diplomatiques d'Athènes contre les accords controversés signés entre Ankara et le gouvernement libyen de Tripoli, qui redessinent les frontières maritimes en ignorant la présence des îles grecques. Dénoncés par l'UE, ces accords ont mis de nouveau à l'épreuve les relations gréco-turques, traditionnellement délicates. Outre la question du flux migratoire depuis les côtes turques vers les îles grecques, les deux voisins se heurtent de longue date sur des questions de souveraineté en mer Égée.

"La participation de la Grèce à la force européenne en Méditerranée est une nécessité sachant les provocations de la Turquie et ses tentatives de s'imposer dans cette zone en dépit du droit international", indique à l'AFP Kostantinos Filis, directeur de recherches à l'Institut grec des relations internationales.

La Grèce cherche à "renforcer sa capacité de dissuasion contre ceux qui ont éventuellement des visées" dans la zone, déclare le porte-parole du gouvernement Stelios Petsas.


(Lire aussi : Face à la Turquie, Chypre s'équipe de missiles anti-aériens et anti-navires)


La France "allié idéal" 
Selon des diplomates, la France a encouragé la Grèce à être "plus autonome" et "à jouer un rôle plus actif dans les initiatives européennes de défense comme au Sahel", où est engagée la force française Barkhane. "La France est actuellement l'allié idéal pour la Grèce", qui veut tonifier son industrie de défense, observe Panayotis Tsakonas, professeur de droit international à l'Université d'Athènes et chercheur au centre grec de politique européenne, Eliamep. Cet expert rappelle que "les deux pays partagent la même position sur la situation en Méditerranée orientale". Il évoque les intérêts des sociétés françaises impliquées dans les forages d'hydrocarbures au large de Chypre, allié principal de la Grèce.

La Turquie, qui occupe depuis 1974 la partie nord de l'île et conteste le droit de Nicosie d'exploiter les gisements en Méditerranée, a empêché ces forages à plusieurs reprises, au grand dam des Occidentaux. En négociation pour l'achat de deux frégates françaises Belharra, Athènes espère construire certaines parties de ces bâtiments dans ses chantiers navals. Les deux pays prévoient de signer un accord "stratégique" fin février.


(Lire aussi : Libye, Méditerranée : Paris multiplie les charges contre Ankara)



"Pression" américaine 
La nouvelle politique de défense d'Athènes provoque toutefois de vives critiques de l'opposition de gauche, qui taxe le gouvernement conservateur d'aventurisme.
"Vous entraînez le pays dans des aventures qui dépassent sa capacité et changent la politique étrangère suivie depuis des décennies", a fustigé l'ex-Premier ministre Alexis Tsipras.
Le déploiement de missiles Patriot en Arabie Saoudite "s'inscrit dans le cadre d'une initiative conjointe avec les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni" pour "assurer la sécurité des sites énergétiques cruciaux", a rétorqué le gouvernement. Mais l'analyste Konstantinos Filis voit dans cette décision "une pression américaine" et "le risque" d'une implication grecque dans la brûlante question iranienne.

Pour Athènes, qui cherche à doper son économie en souffrance après une décennie de crise économique et de coupes drastiques dans le budget de la défense, il s'agit aussi d'attirer de nouveaux investissements de ses partenaires. Selon le gouvernement grec, les Etats-Unis vont investir 12 millions d'euros dans la base aérienne à Larissa, dans le centre de la Grèce, et 6 millions d'euros sur la base américaine de Souda, en Crète. En contrepartie, Athènes va moderniser sa flotte d'avions de chasse américains F-16 et a exprimé son intérêt pour des drones et de F-35.


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