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Lifestyle - La Mode

« Gemma », le bouquet minéral de Sélim Mouzannar

En dépit de la crise et de la juste colère qui gronde au Liban, il importe de soutenir les créateurs et producteurs de ce pays qui poursuivent leur quête d’excellence et luttent pour préserver les emplois qui restent. Sélim Mouzannar fait partie de ces battants. Par ailleurs activiste de la non-violence, le joaillier caracole, avec sa collection « Gemma », en tête du peloton de ses pairs à l’international.

Sélim Mouzannar, joaillier de l’émotion. Photo DR

Dès qu’il parle de gemmes, Sélim Mouzannar devient lyrique. Pour cet enfant du Souk des bijoutiers, né sous les derniers feux de ce qu’à juste titre on appelait l’âge d’or de Beyrouth, initié par son père aux arcanes d’un métier qui a fini, non sans douleur, par lui entrer dans la peau, les gemmes sont littéralement, par magie et par étymologie, les bourgeons de la terre. Nul comme lui, qui a connu en Birmanie le dur travail des mineurs sous la menace des Khmers, les mains et les yeux en sang pour une étincelle de rubis, ne sait les risques encourus pour faire rendre à la roche son secret de lumière. Lui qui dit préférer « un beau spinelle rouge à un vilain rubis birman de même volume » révolutionne le métier en balayant l’injuste hiérarchie communément établie entre les pierres. Seuls comptent pour lui l’émotion, le coup de cœur, le tempérament et la petite flamme propre à chaque gemme. Pour lui, la comparaison entre ces fleurs minérales est aussi absurde que la comparaison entre une rare fleur champêtre et une rose de jardin. Au final, entre les différents types de tailles, l’équilibre des contrastes et des rayonnements, et l’écrin que depuis quelques années, ayant formé ses ateliers à cette technique délicate, il leur confectionne dans l’émail, Sélim Mouzannar traite les pierres en horticulteur amoureux.

Joaillier de l’émotion

Pionnier du renouveau de la taille falamanki, coupe mise à la mode au cours de la Renaissance flamande, à une époque où la demande sur le diamant était telle, en l’absence de techniques de précision, qu’il était nécessaire de réduire la culasse pour obtenir davantage de pierres, Mouzannar fait de ce savoir-faire traditionnel sa signature. Se détournant des pierres trop orgueilleuses, il préfère au flamboiement criard de ces dernières le murmure mélodieux, la petite musique qu’il obtient par son art consommé de la taille. Sa collection Gemma, lancée en 2019, en témoigne. Célébrée dans la presse spécialisée et les meilleurs titres internationaux, cette collection met tout simplement en reliefw les valeurs et le savoir-faire exceptionnel du joaillier de l’émotion. « C’est difficile à expliquer ou à définir, mais tout ce qui sort de nos ateliers, toujours en équilibre entre l’intemporel et la fantaisie, dégage à la fois de la force et de la quiétude », relève Sélim Mouzannar. Amoureux de la mer et de l’eau dont les réflexions ne sont pas sans lien avec celles des minéraux, le joaillier avoue porter un faible à la taille émeraude en rectangle, qui « restitue le plus fidèlement possible la couleur de la pierre avec une réflexion qui n’agresse pas l’œil ». Il ajoute : « C’est mon expérience et ma vie dans les pierres et dans les ateliers qui font que l’objet joaillier dégage de l’émotion. Et le bijou le plus parfait, sans émotion, resterait plat et insignifiant. » Et de citer ces pierres qui l’attendrissent, tanzanite, aigue marine, tourmaline vert chromé, d’une couleur presque irréelle, saphirs padparadscha (ou fleur de lotus en cinghalais) avec leurs nuances de rose orangé, topazes impériales… C’est de tout cela qu’est constituée la collection Gemma : des pierres aux facettes étagées de manière à domestiquer la lumière, entourées de bordures d’émail de couleurs contrastées et relevées d’une pointe de diamant qui en rehausse le reflet juste ce qu’il faut.

On l’aura compris, Sélim Mouzannar, qui dès l’enfance a connu le privilège de baigner dans l’atmosphère particulière des artisans de l’or de Beyrouth, s’implique avec passion dans chaque étape de la confection, du dessin à l’étude des volumes, de la taille à l’anticipation du reflet, du sertissage au résultat final. Par-dessus tout, il fait partie de ces vaillants qui portent aux capitales du monde l’image d’un Liban raffiné et d’une philosophie au plus près de la nature, pacifique et soucieuse d’authenticité, reflet fidèle des soulèvements que connaît aujourd’hui le pays.


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commentaires (1)

Bien jolie cette bague.

Christine KHALIL

20 h 56, le 20 janvier 2020

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Commentaires (1)

  • Bien jolie cette bague.

    Christine KHALIL

    20 h 56, le 20 janvier 2020

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