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À La Une - Turquie

Le Parlement autorise Erdogan à déployer l'armée en Libye

Donald Trump met en garde, dans une conversation téléphonique avec son homologue turc, contre toute "ingérence étrangère" susceptible de "compliquer" la situation en Libye.

Les députés turcs votant, le 2 janvier 2020 à Ankara, une motion permettant au président Recep Tayyip Erdogan d'envoyer des militaires en Libye. Photo REUTERS/Stringer

Les députés turcs ont voté jeudi une motion permettant au président Recep Tayyip Erdogan d'envoyer des militaires en Libye pour soutenir le gouvernement de Tripoli, une mesure qui risque d'aggraver le conflit fratricide déchirant ce pays.

Donald Trump a aussitôt mis en garde, dans une conversation téléphonique avec son homologue turc, contre toute "ingérence étrangère" susceptible de "compliquer" la situation en Libye.

Washington avait appelé en novembre le maréchal Khalifa Haftar, l'homme fort de l'Est libyen, à mettre fin à son offensive en vue de s'emparer de Tripoli, même si le président américain avait pu donner l'impression de le soutenir par le passé.

Au cours d'une session parlementaire extraordinaire, 325 députés ont voté pour et 184 contre la motion qui donne à l'armée turque un mandat, valable un an, pour intervenir en Libye, a déclaré le président de l'Assemblée nationale turque Mustafa Sentop. Reste à savoir désormais si le président Erdogan, auquel il appartient de décider, va effectivement dépêcher des troupes dans ce pays séparé de la Turquie par la Méditerranée ou si le soutien militaire prendra une autre forme, comme l'envoi de "conseillers".

Le gouvernement turc affirme agir en réponse à un appel à l'aide du Gouvernement d'union nationale (GNA) de Fayez al-Sarraj, confronté à l'offensive du maréchal Haftar.

L'envoi de troupes turques en Libye risquerait d'aggraver les conflits fratricides qui déchirent ce pays depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011, alimentés par des puissances régionales.

La Libye est en effet devenue le théâtre d'une lutte d'influence entre deux camps : d'un côté, la Turquie et le Qatar, qui appuient le GNA, reconnu par l'ONU; de l'autre, l'Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et l'Egypte, qui soutiennent le maréchal Haftar.

L'adoption de la motion "est une étape importante pour assurer la paix et la stabilité en Libye et défendre nos intérêts en Afrique du Nord et en Méditerranée", a commenté le porte-parole de M. Erdogan, Ibrahim Kalin, après le vote. Le vote du Parlement turc jeudi s'inscrit dans le cadre d'un rapprochement entre Ankara et le GNA, illustré par un accord de coopération militaire et sécuritaire et un accord controversé de délimitation maritime conclus fin novembre entre MM. Erdogan et Sarraj.


(Lire aussi : Vers un arbitrage russo-turc en Libye, "à la syrienne")


Armée "prête"

Mercredi, le vice-président turc Fuat Oktay a affirmé que l'armée turque était "prête" mais a souligné que la nature et l'ampleur du déploiement seraient déterminées par l'évolution de la situation "au sol". M. Oktay a ajouté qu'Ankara espérait que le vote du texte jeudi aurait un effet dissuasif. "Après le vote, si l'autre camp (favorable au maréchal Haftar) change d'attitude et dit +On se retire, on arrête l'offensive+, alors pourquoi y aller ?", a-t-il ainsi déclaré.

Les principaux partis de l'opposition ont voté contre le texte adopté jeudi, arguant qu'une intervention en Libye pourrait déstabiliser la région et entraîner la Turquie, qui a perdu plusieurs dizaines de soldats en Syrie, dans un nouveau bourbier.

Outre les difficultés propres au déploiement de troupes dans un pays qui n'est pas frontalier, contrairement à la Syrie où Ankara intervient actuellement, un déploiement en Libye s'accompagnerait d'un risque d'incidents avec la Russie.

Même si Moscou le dément, l'émissaire de l'ONU en Libye, Ghassan Salamé, et le président Erdogan affirment que des mercenaires russes sont engagés aux côtés des forces du maréchal Haftar qui s'efforcent depuis avril de s'emparer de Tripoli.


(Pour mémoire : La Turquie aurait envoyé des combattants syriens en Libye, selon l’OSDH)



Le président Vladimir Poutine doit se rendre mercredi en Turquie pour inaugurer un gazoduc avec son homologue turc, l'occasion pour les deux dirigeants de parler du dossier libyen.

Le soutien de la Turquie à M. Sarraj s'inscrit dans le cadre de l'affirmation croissante de la présence d'Ankara en Méditerranée orientale, théâtre d'une course aux forages d'hydrocarbures avec la découverte d'importants gisements ces dernières années.

En raison de l'accord maritime conclu en novembre qui étend considérablement son plateau continental, la Turquie a plus que jamais besoin du GNA pour faire valoir ses revendications en Méditerranée orientale où plusieurs pays comme la Grèce, Chypre et l'Egypte font front commun face aux initiatives turques.

Le vote au Parlement turc était initialement prévu pour la semaine prochaine mais le gouvernement a décidé de l'avancer en raison des difficultés rencontrées par le GNA à Tripoli, où l'offensive des forces pro-Haftar a redoublé d'intensité. Le Caire, qui soutient le maréchal Haftar, a "fermement" condamné le vote du Parlement turc jeudi, estimant qu'une intervention turque "aurait un impact négatif sur la stabilité de la Méditerranée".


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