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Économie - Focus

Le ministère libanais des Télécoms à nouveau interpellé pour sa gestion

Le secteur a connu une année mouvementée marquée notamment par une instruction du parquet financier.

Le frontispice du ministère des Télécoms, à Beyrouth. Photo P.H.B.

Antoine Habchi, député Forces libanaises de Baalbeck-Hermel, a fait parvenir hier au ministre des Télécoms une nouvelle note d’information sur le statut légal du bureau de la téléphonie mobile (au sein de son ministère) ainsi que sur les recettes recueillies auprès des deux opérateurs de téléphonie mobile, Alfa et Touch, et la manière dont elles sont dépensées.

M. Habchi a également réclamé la liste des bénéficiaires d’environ 5 000 lignes gratuites qui étaient notamment attribuées à diverses catégories de hauts fonctionnaires sur les dix dernières années. Ces lignes ont en principe été supprimées suite à une décision du Conseil des ministres en mai, après que le ministère des Télécoms eut mis le dossier en avant. Le député FL a enfin requis des informations détaillées sur les véhicules appartenant à Ogero, entre autres requêtes. Contacté, le ministère n’a pas fait de commentaires.

Ce n’est pas la première fois cette année que le ministère des Télécoms est interpellé sur sa gestion. L’année a en effet été riche en actualité pour ce secteur, qui est l’une des principales sources de revenus de l’État malgré des recettes en baisse du fait du développement des logiciels de messagerie instantanée qui permettent de passer des appels vocaux et vidéo.


Immeuble de Touch et taxe WhatsApp
Le ministère dédié a d’abord changé de main avec l’arrivée de l’homme d’affaires Mohammad Choucair. Lié au courant du Futur du Premier ministre sortant Saad Hariri, ce dernier remplace alors un membre de la formation, Jamal Jarrah, nommé fin 2016. Premier fait insolite, le nouveau ministre décide de conserver ses casquettes de président de la Fédération des Chambres de commerce ainsi que des organismes économiques (une organisation patronale), ou encore de la Chambre de commerce de Beyrouth et du Mont-Liban.

Au milieu de l’été, Mohammad Choucair va ensuite être au centre de la polémique concernant l’acquisition de l’ensemble immobilier accueillant le siège social de l’opérateur mobile Touch au centre-ville, des locaux que l’opérateur louait depuis 2017. Il défend alors cette opération qu’il chiffre à 75 millions de dollars et qu’il présente comme une mesure avantageuse pour les finances de l’État qui devient propriétaire des locaux. La transaction est en revanche critiquée par plusieurs voix, dont celle d’un député indépendant de Baalbeck-Hermel et membre de la commission parlementaire des Télécoms, Jamil Sayyed, qui la qualifie d’opaque en évoquant un coût réel de 105 millions de dollars. Le dossier a fait l’objet d’une enquête parlementaire qui a englobé plusieurs affaires liées aux télécoms.

À l’automne, Mohammad Choucair va enfin être le catalyseur de la révolte populaire qui secoue le pays depuis le 17 octobre en décidant de faire payer les utilisateurs qui passent des applications comme WhatsApp, Skype ou encore Viber. Les manifestants ont commencé à bloquer les routes du pays quelques heures après l’annonce de la mesure, dont le ministre a fini par annoncer le retrait au cours de la même soirée, sans toutefois réussir à calmer une rue survoltée, dans un contexte de crise économique et financière qui s’est accélérée en 2019.



(Lire aussi : La seule option est de prolonger les contrats de Touch et Alfa, dit Choucair)



Contrat Alfa et Touch
Au-delà de la personne même du ministre, c’est davantage la gestion du secteur des télécoms dans son ensemble qui s’est retrouvée sous les feux des projecteurs. La commission parlementaire des Télécoms, qui est dirigée par le député Hussein Hajj Hassan (Hezbollah), a en effet consacré plusieurs séances pour passer au crible la gestion du ministère, d’Ogero, l’office chargé de la gestion de la téléphonie et l’internet fixe, ainsi que des opérateurs de téléphonie mobile à qui il est globalement reproché de coûter trop cher et de dépenser trop. Le dossier a atterri chez le procureur financier Ali Ibrahim, qui a lancé des poursuites contre Imad Kreidiyé, directeur général d’Ogero, ainsi que les directeurs des compagnies Alfa, Marwan Hayek, et Touch, Emre Gurkan, qui gèrent les réseaux de téléphonie mobile dans le pays. Le parquet général a, lui, transféré au Parlement le dossier pour que ce dernier décide de poursuivre ou non trois anciens ministres des Télécoms accusés de dilapidation et/ou de détournement de fonds publics : Jamal Jarrah, Nicolas Sehnaoui et Boutros Harb.

Les restrictions bancaires, qui ont affecté la circulation du dollar depuis fin août et dopé par ricochet son prix dans les bureaux de change, ont par ailleurs eu des répercussions sur la politique tarifaire des opérateurs mobiles qui facturent leurs services aux usagers dans cette devise suite à une décision remontant au début des années 1990 – une singularité jamais remise en question depuis.

En novembre, Mohammad Choucair a décrété que les distributeurs pouvaient régler en livres au taux officiel (1 507,5 livres pour un dollar, 1 515 pour les transactions bancaires, contre plus de 2 000 chez les changeurs) les cartes prépayées qu’ils achètent aux opérateurs de téléphonie mobile Alfa et Touch, et qui leur étaient facturées jusqu’ici en dollars. Mi-novembre, un tribunal saisi par l’Association de protection des consommateurs a par ailleurs imposé aux opérateurs de téléphonie mobile et fournisseurs de services internet d’émettre leurs factures et de faire payer les cartes de recharge en livre au taux officiel, une décision qui n’a toujours pas été suivie d’effet. Pour l’heure, les abonnés peuvent néanmoins encore payer leur facture en livres au taux normal bien qu’elles soient facturées en dollars.

Enfin, les derniers jours de l’année pourraient être décisifs pour l’avenir des deux opérateurs mobiles dont les contrats qui arrivent à échéance le 31 décembre pourraient être une nouvelle fois renouvelés unilatéralement par l’État, une procédure d’exception devenue habituelle depuis fin 2015 et l’annulation, par la direction des adjudications, de l’appel d’offres devant remettre ces marchés publics en jeu. Alfa est géré par l’égyptien Orascom depuis 2009, et Touch par le koweïtien Zain depuis 2004.


Pour mémoire
Affaire des Télécoms : Oueidate transfère le dossier instruit par le procureur financier au Parlement)


Trois ex-ministres des Télécoms et les directeurs d'Ogero, Alfa et Touch dans le viseur du procureur financier

Antoine Habchi, député Forces libanaises de Baalbeck-Hermel, a fait parvenir hier au ministre des Télécoms une nouvelle note d’information sur le statut légal du bureau de la téléphonie mobile (au sein de son ministère) ainsi que sur les recettes recueillies auprès des deux opérateurs de téléphonie mobile, Alfa et Touch, et la manière dont elles sont dépensées. M. Habchi a...

commentaires (2)

ET QU,EN EST-IL DES GRANDES TETES DONT LA GESTION FUT ET EST PITEUSE ET CONTRE LA CONSTITUTION ? VONT-ILS S,EN ECHAPPER COMME TOUJOURS ?

LA LIBRE EXPRESSION

12 h 08, le 24 décembre 2019

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Commentaires (2)

  • ET QU,EN EST-IL DES GRANDES TETES DONT LA GESTION FUT ET EST PITEUSE ET CONTRE LA CONSTITUTION ? VONT-ILS S,EN ECHAPPER COMME TOUJOURS ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 08, le 24 décembre 2019

  • Ce n'est qu'un des dossiers comportant des dysfonctions et une opacité qui a permis à certains dirigeants de s'enrichir directement, soit en se servant à la source, soit indirectement par des avantages parallèles, et tout ça sur le dos du contribuable qui pliait sous les charges injustes. A quant une totale transparence mettant à la transparence tous les ministères et leurs responsables à tous les niveaux. Ça serait un bon début pour calmer la colère du peuple.

    Citoyen

    10 h 19, le 24 décembre 2019

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