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Économie - Dette

Un défaut de paiement de l’État libanais n’est pas inévitable, selon Goldman Sachs

La banque américaine considère que l’adoption d’une série de réformes budgétaires et une restructuration de la dette en livres seront suffisantes pour ajuster les finances publiques, sans que le pays n’ait à déclarer défaut sur sa dette en dollars.

Le profil des détenteurs de la dette en livres, soit principalement la BDL et les banques locales, facilite sa restructuration et réduit les risques de contentieux, selon Goldman Sachs. Photo d’archives

Malgré la crispation sur le marché secondaire extérieur de la dette, un défaut de paiement de l’État libanais n’est pas inévitable car la capacité du gouvernement à rembourser ses titres de dette en dollars – les eurobonds – est plus importante que ne le perçoivent les investisseurs, selon la banque d’investissement américaine Goldman Sachs.

Pourtant, comme le souligne l’économiste pour la zone MENA au sein de l’institution financière, Farouk Soussa, dans une note de recherche publiée hier, la crise politique et économique que connaît le Liban a accentué l’anticipation chez les investisseurs d’un défaut de paiement de l’État à moyen terme. Ainsi, les rendements des eurobonds arrivant à échéance en 2025 ont augmenté à 25 % ces dernières semaines sur le marché secondaire, tandis que les prix des contrats qui permettent de se couvrir contre le risque de défaut de l’État libanais, les Credit Default Swap (CDS), ont atteint 2 200 points de base. M. Soussa rappelle également que sur les six dernières semaines, les trois principales agences de notation ont dégradé la notation souveraine du Liban (CC pour Moody’s et Fitch et CCC pour Standard & Poor’s).

En dépit de ces signaux alarmants, Goldman Sachs considère que l’adoption d’une série de réformes budgétaires et une restructuration de la dette en livres seront suffisantes pour ajuster les finances publiques, et cela sans que le pays n’ait à déclarer défaut sur sa dette en dollars. Concernant les réformes budgétaires, Farouk Soussa estime que la part des recettes fiscales par rapport au PIB est basse (14 %) par rapport aux standards internationaux et que celle-ci pourrait être revue à la hausse (d’environ 2,5 points de pourcentage) à travers une augmentation de 6 points de la TVA à 17 %. Mais l’économiste reconnaît qu’aucune hausse des taxes ne peut être envisagée à court terme compte tenu du contexte économique et social actuel. M. Soussa suggère alors une amélioration de la collecte fiscale, dont la faisabilité est plus importante selon lui, et préconise une réforme du secteur de l’électricité et de la fonction publique : deux chantiers sans cesse repoussés par la classe politique au pouvoir.

S’agissant de la restructuration de la dette publique en livres, Goldman Sachs estime qu’elle est tout sauf « irréaliste » et prend comme scénario un échange par le gouvernement de l’ensemble des bons du Trésor existants par des nouveaux avec 1 % d’intérêt seulement. Ce scénario est privilégié par Goldman Sachs (par rapport à celui d’un défaut de paiement de l’État sur sa dette en dollars) pour plusieurs raisons : (1) près des deux tiers de la dette sont libellés en livres, (2) 100 % de la dette en livres est détenue par des résidents, dont la moitié par la Banque centrale et le reste principalement par les banques locales (tandis que 25 % des eurobonds sont détenus par des non-résidents), (3) le profil des détenteurs de la dette en livres facilite sa restructuration et réduit les risques de contentieux et (4) la réputation du pays sur les marchés internationaux sera préservée.


Soutenabilité de la dette en dollars
Goldman Sachs va plus loin en estimant que la soutenabilité de la dette en dollars n’est pas menacée, du point de vue de la balance des paiements, notamment la part des détenteurs non résidents des eurobonds est très limitée. Sur les 6,5 milliards de dollars que l’État devra rembourser en principal sur les trois prochaines années, seuls 1,5 milliard de dollars sont destinés à des non-résidents et se traduiront donc par une sortie de capitaux, relève Farouk Soussa. De plus, la contraction de la demande locale et les difficultés auxquelles font face les importateurs laissent présager une baisse drastique des importations à court terme. Tandis que les remises des expatriés vont perdurer et les mesures restrictives bancaires vont permettre de limiter le risque de fuite de capitaux. L’ensemble de ces facteurs feront que les réserves en devises de la BDL, même en baissant graduellement, totaliseront 10 milliards de dollars fin 2023, selon les estimations de Goldman Sachs.

Pour la banque d’investissement américaine, la capacité du gouvernement à éviter un défaut de paiement sur sa dette en dollars est donc tributaire de sa volonté politique à mettre en œuvre les réformes économiques nécessaires, malgré les risques que ces réformes puissent exercer sur la stabilité sociale. Il n’en demeure pas moins que l’incertitude par rapport aux perspectives politiques soulève des questions quant à la capacité de l’État à payer à long terme, toujours selon Goldman Sachs.



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Malgré la crispation sur le marché secondaire extérieur de la dette, un défaut de paiement de l’État libanais n’est pas inévitable car la capacité du gouvernement à rembourser ses titres de dette en dollars – les eurobonds – est plus importante que ne le perçoivent les investisseurs, selon la banque d’investissement américaine Goldman Sachs. Pourtant, comme le souligne...

commentaires (5)

Goldman ou ses clients détiennent probablement des Eurobonds en USD/ Liban - donc il conseille que le fardeau tombe uniquement sur la tête des détenteurs del a dette en LBP. C'est sympa!

Shou fi

14 h 42, le 20 décembre 2019

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Commentaires (5)

  • Goldman ou ses clients détiennent probablement des Eurobonds en USD/ Liban - donc il conseille que le fardeau tombe uniquement sur la tête des détenteurs del a dette en LBP. C'est sympa!

    Shou fi

    14 h 42, le 20 décembre 2019

  • les expatries ne sont pas dupes.Ils n'enverront plus leur argent au liban. Ils ont vu leurs depots et leurs economies disparaitre dans les banques Libanaises.Ils ne feront jamais confiance a l'Etat , au BDL ET aux Banques.

    EL KHALIL ABDALLAH

    13 h 10, le 20 décembre 2019

  • Les solutions pour la création de rentrées susceptibles de renflouer l’économie et la dette sont innombrables. Le plus important est de colmater la brèche qui a causée cette dette faramineuse, en l’occurence le retour de la confiance et l’arrêt définitif de la corruption et du gaspillage. Ceci fait on pourra alors envisager plus d’une solution sans pour autant toucher aux dépôts des épargnants. A titre d’exemple: - taxer les produits classés “non de nécessité” - imposer graduellement les salaires jusqu’à atteindre les 95% - imposer graduellement les intérêts sur dépôts - donner le choix aux créanciers de l’état d’encaisser á l’échéance un pourcentage de leur créance en règlement définitif (de 50% à 70%) ou d’en négocier sa restructuration telle qu’une période de grâce s’étendant sur ou deux années suivies d’un remboursement annuel du principal de la dette allant de 10% a 25% à un taux d’interêts réduit (de 0.50% á 2%) - proposer le BOT ou le leasing des secteurs défaillants tel que l’electricite, les ordures... Des études approfondies d’experts dévoileront certainement d’autres mesures plus appropriées. Le pays pourra subsister entre temps grâce aux avoirs de la BDL et des mesures temporaires tolérables et équitables de contrôle de change et des mouvements de capitaux Sur ce point positif je souhaite à tous de joyeuses fêtes et une excellente année PC

    Paul Chammas

    10 h 06, le 20 décembre 2019

  • AVEC UN GOUVERNEMENT ISSU DES DEUX MILICES IRANIENNES ET DE LEUR PARAVENT CPL TOUS LES DEFAUTS DE TOUTES SORTES SONT A EXPECTER.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 54, le 20 décembre 2019

  • “Les remises des expatriés vont perdurer et les mesures restrictives bancaires vont permettre de limiter le risque de fuite de capitaux.” Reallly??? Quel expat va être assez stupide pour envoyer ses économies “one way” dans un piège aussi gros? Au lieu d’élaborer des scénarios aussi fantaisistes, les analystes feraient bien de mettre le doigt sur la bouée de sauvetage qui se trouve en Méditerranée. À moins bien sûr que nos cher$ dirigeant$ au dessus de tout $oupçon souhaitent laisser à notre voisin du Sud ce privilège.

    El moughtareb

    00 h 41, le 20 décembre 2019

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