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Des vagues dans le bain

Coup gratuit, coup suspect de malveillance, même s’il a pu enfiévrer les réseaux sociaux, que ces révélations publiées hier par le New York Times. L’objet en était les largesses (près de 16 millions de dollars) qu’aurait consenties Saad Hariri à une jeune mannequin sud-africaine, spécialisée dans la présentation de maillots de bain : et plus précisément de bikinis, ces maillots de bain deux-pièces qui firent sensation lors de leur lancement, et qui tiraient leur nom de l’atoll de l’océan Pacifique où les Américains testèrent leurs bombes A et H.


Or parlant de bombe, ces prétendues révélations ne sont en réalité qu’un pétard mouillé. Il y a des années en effet que ces mêmes prodigalités ont été rapportées par des feuilles à cancans ; et si l’affaire connaît un regain d’intérêt (pour qui veut bien lui en accorder !) c’est parce que la bénéficiaire de ces largesses a épisodiquement des démêlés avec la justice de son pays, pour avoir omis de déclarer ses rentrées et de s’acquitter des impôts. Pourquoi, dès lors, cette évocation de la prodigalité du Premier ministre libanais et de la vigilance du fisc sud-africain, à laquelle se livre une aussi prestigieuse publication ? Pourquoi, surtout, maintenant ?


Le fait est que le rappel de cette affaire survient à un moment des plus inopportuns pour le chef du gouvernement, un moment où notre pays se débat dans une grave crise économique et financière. Aussi l’idée même de tous ces millions dévolus à des cadeaux princiers a-t-elle évidemment de quoi faire bien mauvaise impression sur nombre de citoyens en proie à la vie chère et à l’incertitude du lendemain.


Il n’en reste pas moins que l’on pourrait aisément trouver ailleurs matière plus adéquate à ironie ou récrimination. Sans même qu’il ait à invoquer son droit à l’intimité de la vie privée, Saad Hariri dispose amplement, que l’on sache, des moyens lui autorisant de telles libéralités. Bref rappel donc, à l’adresse des blogueurs, surfeurs et autres justiciers qui s’en donnaient à cœur joie hier sur internet : notre pays a le triste privilège d’abriter une collection de scandales politico-financiers à nulle autre pareille. Pour clamer son ras-le-bol, il n’y a qu’à puiser à volonté dans le tas grouillant des magouilles et prévarications diverses qui ont saigné à blanc le Trésor public : brigandage organisé, et même souvent hallucinant d’insolence ; brigandage dont on ne voit pas encore la fin, tant tardent à venir les réformes réclamées aussi bien par le peuple que par le programme d’assistance CEDRE.


Assez tiré sur le bikini, il y a tant de feuilles de vigne à arracher aux pillards de la République !


Issa GORAIEB
igor@lorientlejour.com

Coup gratuit, coup suspect de malveillance, même s’il a pu enfiévrer les réseaux sociaux, que ces révélations publiées hier par le New York Times. L’objet en était les largesses (près de 16 millions de dollars) qu’aurait consenties Saad Hariri à une jeune mannequin sud-africaine, spécialisée dans la présentation de maillots de bain : et plus précisément de bikinis, ces...