Rechercher
Rechercher

Santé - Cardiologie

L’insuffisance cardiaque, une pathologie encore peu connue

Les nouvelles avancées thérapeutiques dans la prise en charge de la maladie ont été présentées lors d’une conférence tenue récemment à l’Hôtel-Dieu de France.

L’hypertension artérielle, en plus du diabète, de l’hypercholestérolémie et du tabagisme, est un des principaux facteurs de risque de l’insuffisance cardiaque. Photo Bigstock

Fatigue généralisée, essoufflement, sensation d’étouffement, œdèmes des membres inférieurs… Autant de symptômes communs à plusieurs pathologies, mais qui pourraient signaler une insuffisance cardiaque, une maladie encore peu connue. Elle toucherait près de 2 % de la population mondiale, d’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS). « Au Liban, nous ne disposons pas de chiffres exacts, mais la maladie est tout aussi importante que dans les pays occidentaux, en raison de la haute prévalence des maladies cardiovasculaires, comme le diabète, l’hypertension artérielle, l’hypercholestérolémie, auxquels s’ajoute le fléau du tabagisme », précise à L’Orient-Le Jour le Dr Rabih Azar, chef du département de cardiologie à l’Hôtel-Dieu de France (HDF). Selon le ministère de la Santé publique, la pathologie affecterait près de 70 000 personnes au Liban.

« L’insuffisance cardiaque est un fléau mondial de santé publique qui survient lorsque le cœur est incapable de pomper la quantité de sang nécessaire au bon fonctionnement des différents organes du corps humain », explique de son côté le Dr Toni Abdelmassih, directeur de l’unité de l’insuffisance cardiaque du HDF et chef du groupe de travail sur l’insuffisance cardiaque à la Société libanaise de cardiologie.

L’insuffisance cardiaque se traduit par une « fatigue inhabituelle généralisée accompagnée d’essoufflement à l’effort à un stade précoce de la maladie, puis au repos lorsqu’elle est à un stade avancé », poursuit-il, en marge de la deuxième conférence annuelle du département de cardiologie du HDF sur les innovations dans la prise en charge de l’insuffisance cardiaque, organisée récemment en coopération avec la faculté de médecine de l’Université Saint-Joseph et la Société libanaise de cardiologie.

« Les patients se plaignent d’insomnies et se trouvent contraints à mettre plusieurs oreillers sous la tête pour réduire la sensation d’étouffement et pouvoir dormir, ajoute le Dr Abdelmassih. Dans certains cas, des œdèmes sont observés au niveau des pieds, accompagnés d’une rétention d’eau. Dans des cas rares, les patients toussent et crachent du sang. Un manque d’appétit, un vertige et une tachycardie peuvent également être ressentis. »

Le diabète, l’hypertension artérielle, l’hypercholestérolémie et le tabagisme sont les principaux facteurs de risque de l’insuffisance cardiaque, qui reste longtemps asymptomatique, en plus d’une consommation excessive d’alcool et du tabagisme. « Tous ces facteurs entraînent une obstruction des coronaires (artères du cœur) causant un infarctus du myocarde », souligne le Dr Abdelmassih, notant que « certains agents de chimiothérapie, certaines infections, les anomalies des valves cardiaques et les maladies propres au muscle cardiaque pourraient favoriser une insuffisance cardiaque ».

Maladie évolutive

L’insuffisance cardiaque est une maladie évolutive qui « au stade terminal cloue le patient au lit », déplore le Dr Abdelmassih, notant qu’à l’échelle mondiale, cette pathologie est la cause la plus fréquente d’hospitalisation des personnes âgées de plus de 65 ans. « D’où l’importance de sensibiliser à la maladie pour une meilleure prévention et une meilleure prise en charge précoce, insiste-t-il. La prévention est simple et efficace. Elle est basée sur un mode de vie équilibré avec au menu une alimentation faible en sucre, matières grasses et sel, une consommation modérée d’alcool et bien sûr une activité physique régulière à raison d’au moins trente minutes trois fois par semaine. Il est important aussi que le diabète et l’hypertension artérielle soient bien contrôlés. Le tabagisme est également à bannir. »

Jusqu’au début des années 1990, « le traitement de l’insuffisance cardiaque était symptomatique et consistait à administrer au patient des diurétiques pour réduire les œdèmes et l’essoufflement, sans pour autant prolonger la survie du patient », constate le Dr Azar. « Dans la seconde moitié de cette décennie, une avancée majeure a été notée avec la découverte de nouveaux médicaments qui bloquent le système rénine-angiotensine (système de régulation endocrinienne et enzymatique) et le système nerveux sympathique (système qui gère l’activité des organes viscéraux et les fonctions automatiques de l’organisme, comme la respiration ou le battement du cœur). Ces médicaments ont prouvé être efficaces non seulement pour améliorer les symptômes de l’insuffisance cardiaque, mais aussi pour réduire la mortalité de façon significative. Aucune autre importante avancée n’a été signalée jusqu’à il y a quelques années, quand une association de deux médicaments, dont l’un bloque le système rénine-angiotensine et l’autre inhibe une enzyme appelée nerpilisine, s’est avérée supérieure aux anciens médicaments. Il y a quelques semaines, un médicament, utilisé initialement dans le traitement du diabète, s’est révélé très efficace pour réduire la morbidité et la mortalité de l’insuffisance cardiaque, indépendamment de son effet sur le diabète. Le patient ayant une insuffisance cardiaque bénéficie donc actuellement de plusieurs médicaments dont l’efficacité est prouvée. »

Avancées thérapeutiques

En plus des médicaments, le traitement de l’insuffisance cardiaque comprend une série d’interventions percutanées (par cathétérisme) sur les artères, les valves et le système électrique du cœur. « Les artères coronaires doivent être ouvertes et capables d’irriguer le muscle cardiaque », fait remarquer le Dr Azar. « Dans le cas contraire, on pratique des angioplasties avec la mise d’un ressort, ajoute-t-il. Souvent, dans l’insuffisance cardiaque, la valve mitrale est atteinte. De ce fait, le sang est régurgité dans les poumons au lieu d’être orienté vers l’aorte et les organes vitaux. Une intervention percutanée, appelé mitraclip, permet de remédier à ce problème sans chirurgie cardiaque. Elle est efficace, selon les résultats d’une étude américaine baptisée Coapt. »

Le Dr Azar note, en outre, qu’à un stade avancé, l’insuffisance cardiaque cause un dysfonctionnement du système électrique du cœur, entraînant un arrêt cardiaque. « Pour ces patients, la pose d’un défibrillateur implantable (une batterie intracardiaque qui monitore l’activité électrique) permet de limiter ce problème responsable de 40 % des mortalités cardiaques, précise-t-il. Dans certains cas, l’activité électrique du cœur devient désynchronisée, c’est-à-dire que certaines parties du cœur commencent à travailler indépendamment les unes des autres. Les spécialistes ont recours à des approches thérapeutiques pour traiter cet asynchronisme cardiaque. »

« Malheureusement, toutes ces interventions sophistiquées restent coûteuses et ne sont pas entièrement couvertes par les tiers payants », relève le Dr Azar, avant d’ajouter qu’il « n’est pas rare que toutes ces approches thérapeutiques échouent. Le patient doit alors recourir à la transplantation cardiaque, qui n’est pas souvent possible, à cause de la rareté des donneurs et de la complexité de la chirurgie. Dans ces cas, la médecine propose aux patients une pompe externe qui assiste le cœur, une sorte de cœur artificiel mécanique ».

Le Dr Azar conclut en insistant sur la prévention qui reste essentielle pour protéger son cœur.


Pour mémoire

Un nouveau test permet de détecter un infarctus à un stade encore précoce

Fatigue généralisée, essoufflement, sensation d’étouffement, œdèmes des membres inférieurs… Autant de symptômes communs à plusieurs pathologies, mais qui pourraient signaler une insuffisance cardiaque, une maladie encore peu connue. Elle toucherait près de 2 % de la population mondiale, d’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS). « Au Liban, nous ne disposons...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut