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Nos Lecteurs ont la Parole - par Jean-Baptiste HATT

Faire son devoir

Il me semble étonnant, effrayant même, de voir que faire son devoir et assumer les responsabilités propres à son activité est extraordinaire dans la société, du Liban-Sud à Byblos en passant par Beyrouth. Comment se fait-il que la réaction la plus fréquente face à la critique et à l’engagement journalistique soit de l’indignation et des reproches ? Il semble exister un clivage notable et ô combien terrible entre certaines parties de la population, non pas selon des critères de confession ou de rang social, mais d’ouverture d’esprit et d’exposition à des pensées différentes. Et cette fermeture, ce chauvinisme intellectuel doit être attaqué avec la même ardeur qui en a choqué tant.

Les événements récents qui ont animé la scène politique et sociétale ont été tout à fait révélateurs de ce phénomène, et outre leur nature triste, ils ont eu le mérite, je l’espère, de forcer les esprits chagrins à se révéler et les timides à faire face aux conséquences de leur inaction. Rappelons-les : l’affaire Mashrou’ Leila a vu se déchaîner un torrent de colère et de menaces à l’encontre du groupe et de leurs productions, se soldant par une censure de leur participation au Festival de Byblos ; l’annulation d’un show satirique au Liban-Sud ou encore les remous autour de l’affaire Qabr Chmoun.

Dans un premier temps, l’indignation – justifiée – et la réaction vive – à nouveau justifiée – de L’Orient-Le Jour après les évolutions de la polémique contre le groupe de rock ont été perçues par beaucoup comme une ingérence, un dépassement de fonction de la part du journal qui en un instant se serait soi-disant, et selon ces critiques, constitué autorité religieuse ou politique et se permettrait de juger l’avis des vrais entités religieuses sur le groupe. Quid ? C’est là que se distingueront les esprits ouverts qui, peut-être empreints de valeurs plus internationales et moins marquées par un confessionnalisme excessif, se rappelleront la charte de Munich de 1971 et le vrai rôle de la presse.

Le journaliste – il en est de son devoir – défend le droit à la critique : cela passe non seulement par exprimer son avis de manière précise, argumentée et assumée, mais plus fort encore, par la défense du droit à l’expression de tous. En conséquence, il s’agit de défendre le droit à la différence de Mashrou’ Leila, du show satirique au Liban-Sud, et de condamner les menaces et la violence d’instances qui se constituent abusivement juge, jurés et bourreau.

Comment le sens du devoir a-t-il disparu à ce point qu’un organe de presse soit accusé d’ingérence et d’expression outrancière ? À voir les événements autour de Qabr Chmoun, et la paralysie quasi totale d’un gouvernement aux antipodes de faire l’unanimité, il semble que s’est propagée aux plus hautes fonctions de la magistrature, lesquelles sont associées aux plus grandes responsabilités et théoriquement confiées aux plus grands hommes et femmes de la société libanaise, cette incapacité notoire à faire son devoir.


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour.

Il me semble étonnant, effrayant même, de voir que faire son devoir et assumer les responsabilités propres à son activité est extraordinaire dans la société, du Liban-Sud à Byblos en passant par Beyrouth. Comment se fait-il que la réaction la plus fréquente face à la critique et à l’engagement journalistique soit de l’indignation et des reproches ? Il semble exister un clivage...

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