Rechercher
Rechercher

Campus - COMPÉTITION

Patriarcat, féminisme ou mariage précoce : six étudiants de la LAU primés pour leurs écrits

Les étudiants de l’Université libano-américaine participaient à la compétition Mary Turner Lane, organisée par l’Institut arabe pour les femmes (AiW).

« Les articles primés étaient bien documentés, discutaient de sujets et de questions novateurs, très bien écrits, structurés avec un flux d’idées fluide  », affirme Myriam Sfeir, directrice de l’AiW. Ci-dessus, les lauréats avec le président de la LAU, le Dr Joseph Jabra.

Dans le cadre de la compétition Mary Turner Lane organisée à la LAU par l’Institut arabe pour les femmes (AiW), 58 étudiants ont présenté des textes, dans les deux catégories de la compétition, sous forme de comptes rendus de recherche, d’essais et de textes créatifs ou journalistiques. Venant de toutes les disciplines, les participants ont abordé la thématique du genre et des femmes, abordant les questions du patriarcat, du féminisme, de l’égalité des genres, des droits des femmes dans les zones sortant d’un conflit, de la crise des réfugiés, des inégalités et discriminations juridiques, politiques et économiques, ou encore de la violence domestique, du harcèlement sexuel, des meurtres d’honneur et des mariages forcés.

Pour Myriam Sfeir, directrice de l’Institut arabe pour les femmes de la LAU (AiW), il s’agit, à travers cette compétition, « d’encourager les étudiants à aborder différents problèmes en adoptant la perspective du genre, mais aussi de mettre en lumière l’AiW et de susciter une prise de conscience sur l’importance de mener des recherches dans le domaine des études sur le genre et les femmes ». Six lauréats ont été récompensés lors d’une cérémonie qui s’est tenue au mois de juin. Parmi les étudiants primés, Carla Richa s’est inspirée de son vécu familial pour rédiger son texte « Document de réflexion : mon expérience personnelle avec ma grand-mère et ma mère », alors que la jeune diplômée en journalisme et multimédia était encore étudiante en 2e année à la LAU. « Ma grand-mère et ma mère ont été élevées dans un environnement favorable aux femmes et étaient vraiment fortes comparées à la situation de la société à l’époque. Elles ont réussi à une époque où les Libanaises avaient à peine une voix », explique la jeune lauréate qui rend hommage à ces « femmes spéciales » dans sa famille. « C’est la maison dans laquelle j’ai grandi, ce sont les femmes qui m’inspirent au quotidien, l’environnement qui a fait de moi ce que je suis aujourd’hui. Donc écrire c’est aussi analyser ma vie. »

Produire ce texte a ainsi été vital pour Carla Richa qui appelle à « renoncer au patriarcat », en prônant le féminisme « pour vivre pleinement ». La jeune femme qui dédie aujourd’hui son texte à sa grand-mère, décédée il y a quelques mois, est confiante : « Il suffit d’être patient, de croire en nous et de nous motiver les unes les autres. Et le temps viendra où les femmes, surtout les femmes libanaises, se lèveront et seront aussi indépendantes et performantes que quiconque. »Étudiante en éducation, Tala Lakiss a reçu un prix pour son écrit « Barbe bleue : un conte de fées ». « Les contes contiennent des messages biaisés parce qu’ils ont été écrits à une époque où les normes de la société étaient ce que nous considérons aujourd’hui inacceptables. En les lisant à nos enfants, nous transmettons ces normes », affirme Tala, qui avoue avoir été traumatisée, à 8 ans, par l’histoire de Barbe bleue racontée par le maître à l’école. « Mon professeur a dit : “La morale de l’histoire est de ne pas être curieux. La curiosité est un mauvais trait”. Mais la curiosité est une bénédiction, la meilleure arme contre la passivité. Elle libère les enfants de l’automatisation », explique cette étudiante qui souhaite que l’enseignement des contes de fées soit repensé d’une manière plus moderne. Et d’ajouter : « J’ai choisi ce sujet parce que je ne veux plus d’enfants terrifiés dans une salle de classe et plus d’enseignants tuant la créativité. »



Le contrôle du corps de la femme
Également primée, Fadia Habib, master en études interdisciplinaires sur le genre, a participé à la compétition afin « d’exprimer les soucis des femmes », et « de mener un travail de sensibilisation » sur les mariages précoces. Intitulé « L’enfance volée », son compte rendu de recherche aborde le sujet du mariage précoce des jeunes Syriennes réfugiées. « Les femmes sont bien des fois utilisées comme monnaie d’échange, leur honneur est ce qui compte le plus, il est lié à leur virginité et leur corps, et les hommes essaient de les contrôler en utilisant l’excuse de l’honneur, explique cette activiste et féministe. Beaucoup de gens disent que les raisons du mariage précoce sont la pauvreté ou la recherche de la protection, mais on comprend que c’est enraciné dans les notions patriarcales, notamment le contrôle du corps de la femme », poursuit Fadia Habib.

Le mariage des enfants est également la thématique qu’a analysée Muna Saeed, master en études interdisciplinaires sur le genre, dans « Genre, islam et cadres internationaux au Yémen » qui lui a valu un prix. « Malgré les quelques tentatives déployées par la communauté internationale d’utiliser une approche islamique et d’impliquer les chefs religieux, comme stratégie de promotion des droits des femmes, celle-ci n’a réussi à inclure aucun dirigeant féministe islamique et a échoué à appliquer la vision stratégique féministe de la transformation du genre et du pouvoir », note cette Yéménite, qui confie chercher un terrain d’entente entre l’identité musulmane des femmes yéménites et leur croyance en l’égalité des sexes. « Dans l’espoir de mettre fin à la pratique du mariage des enfants, nous ne devrions peut-être pas examiner la situation dans un contexte binaire », souligne Muna.

Pour sa part, avec « Paysage moral et autorité des femmes : vers un cadre transnational de responsabilités féministes », le lauréat Khaled Rajeh, étudiant en littérature anglaise, questionne certaines philosophies féministes qui peuvent parfois nuire à la femme arabe. « Les écoles féministes contemporaines (…) tendent à converger vers cet objectif particulier : inculquer un sens de l’autorité aux femmes afin qu’elles soient personnellement capables d’améliorer leurs conditions d’oppression. Comment savoir si une personne agit vraiment en accord avec ses propres décisions ou principes, et non pas simplement en agissant de la manière dont elle a été socialisée ? » se demande Khaled, faisant allusion aux femmes qui, se conformant aux normes culturelles imposées, agissent « de manière contraire à leurs intérêts ». À travers son texte, Khaled tente « de développer un nouveau cadre théorique pour les responsabilités féministes transnationales ».

En outre, Emma Harfouche, étudiante en psychologie, a reçu un prix pour son essai, « Une proposition moderne », qu’elle a écrit afin de contrer « le sexisme et la masculinité hégémonique dans la société actuelle ». « J’ai toujours été irritée par des schémas de pensée sexistes en rapport avec la politique. Ceci est mon accès de colère, ceci est mon cri », lance Emma, qui avoue avoir soumis son essai non pas dans l’espoir de gagne, mais « comme un acte de défi », voyant la nécessité de s’exprimer par le biais d’une plate-forme officielle et crédible. Dans sa conclusion, elle propose « d’une façon moqueuse des solutions réelles et tangibles », « obtenues grâce à une communication et à des pratiques parentales saines, ainsi qu’à de meilleurs lois et systèmes gouvernementaux ».

Les lauréats verront leurs textes publiés dans le journal universitaire de l’AiW, al-Raida. Rappelons que le prix Mary Turner Lane a été lancé en 2012 par Mary Ellen Lane, en l’honneur de sa défunte mère qui a créé le programme d’études sur les femmes de l’Université de Caroline du Nord à Chapel Hill.



Dans le cadre de la compétition Mary Turner Lane organisée à la LAU par l’Institut arabe pour les femmes (AiW), 58 étudiants ont présenté des textes, dans les deux catégories de la compétition, sous forme de comptes rendus de recherche, d’essais et de textes créatifs ou journalistiques. Venant de toutes les disciplines, les participants ont abordé la thématique du genre et des...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut