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À La Une - Conflit

Arrêt des frappes sur la région d'Idleb après l'annonce d'une trêve

"Il s'agit d'une ruse probablement à l'instigation de la Russie pour renforcer la crédibilité (...) des pourparlers d'Astana", estime un analyste.

Un quartier de la ville d'Idleb, tenue par les jihadistes, dévasté par les frappes aériennes et les bombardements, le 14 mars 2019. Photo d'archives AFP / Muhammad HAJ KADOUR

Le régime syrien et son allié russe ont cessé vendredi leurs raids sur des zones de la région d'Idleb en Syrie dominées par les jihadistes, au lendemain de l'annonce d'une trêve par le pouvoir dans cette région meurtrie par trois mois de bombardements quasi-quotidiens.

Depuis fin avril, l'armée de l'air syrienne bombarde la province d'Idleb (nord-ouest) et des zones adjacentes aux mains des jihadistes ou des rebelles dans les provinces d'Alep, de Hama et de Lattaquié, causant la mort de près de 790 civils selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Ce sont les jihadistes du groupe Hayat Tahrir al-Cham (HTS, ex-branche syrienne d'el-Qaëda) qui contrôlent la grande partie de la province d'Idleb. D'autres groupes jihadistes et rebelles y sont également présents.

"Un calme prudent règne depuis que les aviations syrienne et russe ont quitté le ciel d'Idleb jeudi peu avant minuit (21h00 GMT)", a indiqué le directeur de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane, en faisant également état d'un arrêt des combats au sol. Des tirs ont été néanmoins signalés avec des obus lancés sur le nord de Hama par les forces prorégime et des roquettes sur Lattaquié tirées par les rebelles, selon l'OSDH. L'agence officielle Sana a fait état d'un mort et de trois blessés à Lattaquié.

Jeudi soir, le régime de Bachar el-Assad a proclamé une trêve en la conditionnant à l'application d'un accord conclu en septembre 2018 entre la Russie et la Turquie pour créer une "zone démilitarisée" dans la région d'Idleb. Celle-ci doit séparer les territoires tenus par les jihadistes et les rebelles des zones attenantes contrôlées par le régime. Cet accord n'avait pas été entièrement respecté, les jihadistes ayant refusé de se retirer des localités appelées à faire partie de cette zone tampon.
La Russie, qui affirme cibler des "terroristes" dans la région d'Idleb, a salué l'initiative du régime.




(Lire aussi : Le partenariat russo-turc à l’épreuve de la bataille d’Idleb)



Avertissement des jihadistes
Dans une première réaction, les jihadistes du groupe HTS ont, eux, averti qu'ils riposteraient à toute violation de la trêve par l'adversaire. "Tout bombardement ou agression" contre Idleb et ses environs "aboutira à la rupture du cessez-le-feu de notre part", a prévenu HTS dans un communiqué.

L'annonce de la trêve a coïncidé avec la tenue à Nur-Sultan, la capitale du Kazakhstan, du 13e cycle de négociations sur la Syrie, parrainées par la Russie, la Turquie, qui appuie des groupes rebelles, et l'Iran, un autre soutien de M. Assad. L'émissaire de la Syrie à Nur-Sultan, Bachar Jaafari, a estimé que le cessez-le-feu est "un test des intentions de la Turquie" et de son respect des "accords sur le désarmement des terroristes".

Appuyé par Moscou et Téhéran, le régime syrien a reconquis plus de 60% du territoire. Outre Idleb, de vastes régions dans l'Est et le Nord-Est lui échappent et restent aux mains de forces kurdes soutenues par Washington. Des négociations ont été engagées par le régime concernant le sort des zones kurdes, mais sont restées jusque-là sans progrès.

Pour l'analyste Samuel Ramani, Bachar el-Assad "ne tolérera pas qu'Idleb soit en dehors de sa sphère d'influence". "Je ne vois pas le cessez-le-feu durer" longtemps, affirme ce spécialiste du conflit syrien chercheur à l'université d'Oxford. "Il s'agit d'une ruse probablement à l'instigation de la Russie pour renforcer la crédibilité des pourparlers" au Kazakhstan, a-t-il dit.



(Lire aussi : Trois mois d’horreur dans la province d’Idleb)



"Combien de trêves?"
Vendredi, les habitants de la région d'Idleb étaient pour le moins dubitatifs. "Le régime n'est pas crédible et nous ne lui faisons absolument pas confiance parce qu'il a plus d'une fois violé les trêves", affirme Abou Mohamad, un habitant d'Ariha, dans la province d'Idleb. "Combien de trêves et de (réunions) ont déjà eu lieu? Ils sont malhonnêtes. A chaque trêve, ils prennent une région et nous dupent", renchérit Abou Abdo, qui a perdu sa femme et ses deux enfants durant la guerre.

Pour l'analyste Nawar Oliver du centre Omran basé en Turquie, les groupes anti-Assad sont désormais au pied du mur. "S'ils n'acceptent pas (la trêve), la Russie continuera de bombarder des zones civiles et de commettre des massacres", a-t-il dit. Et même s'il acceptent, "ils sont incapables de faire confiance à la Russie".

En trois mois de violences dans la région d'Idleb, plus de 400.000 personnes ont été déplacées, d'après l'ONU. Des établissements de santé et des dizaines d'écoles ont été endommagées.

Déclenchée en 2011 par la répression de manifestations prodémocratie, la guerre en Syrie a fait plus de 370.000 morts et déplacé des millions de personnes.



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