Rechercher
Rechercher

Liban - Déchets

Répit d’un mois à Costa Brava, rouverte aux déchets aujourd’hui

Le ministre Mahmoud Qmati affirme à L’OLJ que les dus des municipalités accueillant les décharges seront versés en grande partie de manière imminente.


Des ordures empaquetées dans la décharge de Costa Brava, située à proximité de l’Aéroport international de Beyrouth. Nasser Trabulsi/Photo d’archives

Ces deux derniers jours, les ordures commençaient déjà à s’amonceler dans les différents quartiers de Baabda, de Aley et du Chouf. Cela fait depuis mercredi matin que la fédération des municipalités de la banlieue sud interdit l’accès de la décharge aux camions venant de Beyrouth (qui envoie 200 tonnes à ce site) et de trois autres cazas, ne permettant que l’entrée des ordures de la banlieue sud et de Choueifate à la décharge côtière gouvernementale. Ce sans qu’aucune autorité n’intervienne pour empêcher ce blocage. La crise aurait pu durer, mais elle a été résolue hier temporairement grâce aux contacts effectués par le ministre d’État pour les Affaires du Parlement, Mahmoud Qmati (bloc du Hezbollah), avec le Premier ministre Saad Hariri.

M. Qmati a révélé à L’Orient-Le Jour ce que les municipalités ont confirmé peu après : la décharge sera rouverte aux déchets des autres cazas durant un mois, à l’issue duquel de nouvelles tractations auront lieu pour voir où en est le plan gouvernemental de gestion des déchets. À la clé, deux points essentiels : la nécessité de trouver une solution durable à la gestion des déchets dans la région de Beyrouth et du Mont-Liban (ces municipalités estimant qu’elles supportent un lourd fardeau sans voir le bout du tunnel), et le versement progressif des montants dus et promis aux municipalités qui accueillent des décharges par le gouvernement (huit millions de dollars par an et par municipalité), et qui sont impayés depuis deux ans.

M. Qmati a précisé qu’« une importante partie de ces montants dus seront versés de manière imminente aux municipalités qui accueillent les décharges, nommément Choueifate et la banlieue sud pour Costa Brava, et Bourj Hammoud et Jdeidé pour la décharge au nord de la capitale ». Il a également souligné que les autres questions restent ouvertes au débat, notamment les solutions temporaire et à long terme, qui permettraient d’alléger le poids du fardeau que supporte le littoral de Choueifate. Il évoque notamment « une décision du Conseil des ministres à propos de la construction d’une troisième décharge pour desservir cette région », étant donné la saturation précoce des deux décharges côtières (celle de Bourj Hammoud-Jdeidé devrait arriver à saturation fin août et celle de Costa Brava a déjà été agrandie).

Quoi qu’il en soit, cet épisode aura marqué les esprits, montrant la précarité des solutions actuellement mises en œuvre par le gouvernement pour la gestion des déchets de la zone la plus peuplée du Liban, à savoir Beyrouth et le Mont-Liban.

Une question taraude néanmoins les esprits : des municipalités ont-elles le droit de fermer l’accès à une décharge gouvernementale desservant plusieurs cazas ? Et cette menace de refermer la décharge dans un mois si les pourparlers ne sont pas jugés satisfaisants n’est-elle pas une épée de Damoclès brandie contre une large frange de la population ? Interrogé sur cette question par les médias, Mohammad Dergham, président de la fédération des municipalités de la banlieue sud, assure « ne pas avoir enfreint la loi ». « Le contrat de la décharge stipule qu’à partir d’août 2019, étant donné que d’autres solutions auraient dû être en place à cette date, le nombre de tonnes entrant dans la décharge ne devrait plus excéder les 1 000 tonnes, c’est-à-dire les déchets de la banlieue sud et de Choueifate, poursuit-il. C’est le gouvernement qui n’a pas respecté ses engagements, pas nous. »


(Lire aussi : Fermeture de Costa Brava : on est dans le flou)


Un épisode lié à l’incinération ?
Le plan d’urgence mis en place en 2016 pour régler la grave crise des déchets qui avait envahi d’ordures les rues de plusieurs villes du pays, dès juillet 2015, atteint ses limites alors que la « feuille de route » du ministère de l’Environnement n’a pas encore été discutée en Conseil des ministres (voir L’OLJ du 14 juin). Or, durant la réunion qui a rassemblé mercredi les ministres Qmati, Fady Jreissati (Environnement) et Ali Hassan Khalil (Finances), présidée par le Premier ministre Saad Hariri et en présence des représentants des municipalités, il a été question d’une « feuille de route » pour résoudre le problème de Costa Brava. M. Qmati précise qu’il s’agit pratiquement de celle du ministère, qui propose l’établissement de décharges sur tout le territoire à moyen terme, et celle de deux incinérateurs centraux à long terme (suivant les résultats d’études d’impact environnemental).

Le ministre lui-même a déclaré, à l’issue de la réunion, qu’il a été question de solutions à long terme, condition sine qua non de la levée du blocus sur la décharge, évoquant les techniques de « désintégration thermique » et d’incinération (toutes deux par combustion) et soulignant la nécessité de ne pas aller plus avant dans les détails « pour ne pas susciter d’oppositions ». Ce qui fait dire à certains que cet épisode pour le moins inattendu de fermeture partielle de la décharge de Costa Brava tiendrait finalement du coup de pouce en faveur de la solution controversée de l’incinération.

M. Qmati assure à L’OLJ, en réponse à une question, « ne pas privilégier l’incinération ou une technologie en particulier, mais préconiser une décision immédiate concernant une solution à long terme, quelle que soit la solution recommandée par les experts et adoptée par le gouvernement ».



(Lire aussi : Plan de Jreissati pour la gestion des déchets : le ver est-il dans le fruit ?)


Solutions durables
Cependant, les références à l’incinération au cours de cette affaire ne sont pas passées inaperçues auprès de fervents détracteurs de l’adoption de cette technologie aussi complexe et potentiellement polluante qu’onéreuse. Paul Abi Rached, président du Mouvement écologique libanais, se demande ainsi si « cette nouvelle bombe des déchets n’est pas utilisée pour faire passer des projets ou des marchés quelconques, ou encore pour imposer les incinérateurs aux Libanais ». « Si l’on s’en tient aux chiffres avancés dans la feuille de route du ministère, enfouir les seuls déchets inertes, qui composent 20 % du total, permettra à la décharge de Costa Brava de durer six ans », poursuit-il.

La députée Paula Yacoubian a, pour sa part, écrit un tweet virulent sur le sujet : « Le dossier des déchets est pareil à celui de l’électricité. (Ils) en connaissent très bien les solutions, mais elles sont simples et passent par des mesures environnementales peu chères qui ne rempliront pas les poches de la mafia. »

Pour sa part, le ministre de l’Éducation Akram Chehayeb, également député de Aley, a rappelé que sa région a supporté les déchets de toute la région durant de longues années, appelant « à des solutions réellement durables, que nous allons promouvoir au sein de la commission ministérielle chargée du dossier des déchets ».

Pour sa part, la Coalition civile des déchets ménagers a fustigé, dans un communiqué, la gestion des déchets qui, jusque-là, s’est limitée à des plans d’urgence mis en place de manière partielle. Elle préconise une véritable solution fondée sur une connaissance de la composition des déchets et une répartition de base en plusieurs catégories, une philosophie de réduction de la production des ordures, la construction de centres de tri et de traitement biologique, puis de décharges réglementaires. « Des technologies simples et bon marché en somme, se fondant sur une décision politique en faveur de solutions durables », souligne le communiqué.


Lire aussi
Odeurs nauséabondes sur le Grand Beyrouth : quand s’attaquera-t-on aux racines du problème ?

Pas d’alternatives à l’agrandissement des décharges, affirme Jreissati

F. Jreissati : Nous aspirons à traiter 80 % et à n’enfouir que 20 % des déchets

Ces deux derniers jours, les ordures commençaient déjà à s’amonceler dans les différents quartiers de Baabda, de Aley et du Chouf. Cela fait depuis mercredi matin que la fédération des municipalités de la banlieue sud interdit l’accès de la décharge aux camions venant de Beyrouth (qui envoie 200 tonnes à ce site) et de trois autres cazas, ne permettant que l’entrée des ordures...

commentaires (2)

CE TITRE... COMME SI ON ANNONCAIT LA REOUVERTURE D,UN GRAND RESTAURANT !

LA LIBRE EXPRESSION

19 h 52, le 26 juillet 2019

Tous les commentaires

Commentaires (2)

  • CE TITRE... COMME SI ON ANNONCAIT LA REOUVERTURE D,UN GRAND RESTAURANT !

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 52, le 26 juillet 2019

  • Ainsi donc, un pays qui n'est meme pas foutu de regler les problemes des ordures menageres, et qui les entasse en bon ordre pres de l'aeroport pour acceuillir les touristes veut aller a la conquete de l'espace? C est beau les fanfaronades....

    IMB a SPO

    15 h 26, le 26 juillet 2019

Retour en haut