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Culture - Exposition

Ahmad Kleige, peintre de l’intranquillité

À la croisée du figuratif et de l’abstraction, l’artiste s’approprie le langage de la couleur pour mieux faire passer son message. À la galerie Janine Rubeiz*, il développe une œuvre révoltée et inquiète dans un éclaboussement de lumière qu’il veut rédemptrice.

Dans son œuvre exposée à la galerie Janine Rubeiz, Ahmad Kleige parvient à capter dans les regards les tristes rêves pétris de doutes et de paradoxes. Photo DR

« Aujourd’hui, c’est le besoin qui règne et qui courbe sous un joug tyrannique l’humanité déchue », disait Friedrich Schiller (1795).

L’œuvre d’Ahmad Kleige – exposée à la galerie Janine Rubeiz – témoigne de sa fascination pour l’homme, pour ses failles et pour sa volonté de puissance à toujours aller plus loin. Porté par le soin d’éveiller la conscience collective aux maux qui secouent la planète, l’artiste d’origine syrienne le place au centre de son œuvre et tente de lui restituer sa dignité et sa liberté de choix. Le combat permanent de chaque être humain reste son ultime préoccupation. Son œuvre est étonnante parce qu’elle est en même temps une plongée vertigineuse dans les abîmes d’une condition humaine poussée jusque dans ses derniers retranchements et un entrecroisement de chemins qui s’ouvre pour l’artiste sur tous les possibles heureux.

Un labyrinthe qui conduit à l’intérieur de soi, vers une sorte de sanctuaire où se cache le mystère de la condition humaine. Car Ahmad Kleige reste un homme confiant dans cette capacité que possède l’être humain à se dépasser et à braver l’impossible.


Surtout ne pas s’arrêter

Né à Alep en 1964, Ahmad Kleige fait des études de chimie avant de se consacrer entièrement à l’art. Diplômé du Fathi Mohammad Fine Arts Center en 1987, il s’établit d’abord au Liban pour ensuite s’installer avec sa famille en Hollande. Il est actuellement membre de la Fondation Taylor (basée à Paris, l’association fondée en 1844 a pour but de développer la connaissance des arts grâce à l’entraide des artistes) et de Arti-Shock Gallery aux Pays-Bas.

L’ensemble de ses toiles présentées dans l’exposition « Labyrinths of the Souls » se répartit en trois volets. D’abord, une série de personnages qui portent en eux le germe de l’exode et qui semblent dire :

« Je pars sans savoir où je vais. » Sauf que l’artiste leur a tracé un chemin bien défini, celui qui consiste à traverser l’indicible, mais sans jamais y perdre son âme. Des enfants qui s’agrippent à l’ombre de leur mère, des femmes qui semblent résignées à attendre et d’autres qui soudain surgissent dans un réalisme déconcertant et qui semblent fixer le visiteur. Serait-ce le passage de cette touche blanche dans ce florilège de couleurs qui suggère la part de rêve ? Ensuite, une série de portraits s’offrent à voir dans un rapport de résilience et de puissance qui les lient entre elles. Le visage réduit à quelques traits essentiels occupe toute la surface du tableau. Il est le motif central de l’œuvre, où le regard se perd dans le vide et en même temps semble chercher un point d’horizon. Ces portraits n’existent pas comme une réalité objective, mais uniquement en fonction du contexte dans lequel ils s’incorporent.

Un contexte qui renvoie tantôt aux victimes de guerre dont on placarderait les photos dans la rue, tantôt aux portraits dans les demeures du défunt. Et pour finir, à la sortie de la galerie, un portrait dans une facture surprenante, comme un clin d’œil qui semble annoncer le travail de l’artiste qui va suivre.


La douleur a une couleur

Sa matière est dense et profonde, et Ahmad Kleige parvient à capter dans ces regards les tristes rêves pétris de doutes et de paradoxes. Tout en simplifiant les formes, en accentuant les proportions et en intensifiant les couleurs dans une association pure et une juxtaposition des couleurs primaires et complémentaires, il oppose le bleu à l’orange, le rouge au vert et le jaune au violet, et applique ses couleurs à l’aide d’un pinceau grossier sans faire de fine transition. Entre figuration et abstraction, sa palette se déploie dans le fond en gris et noir, et offre en surface des rouges flamboyants et des couleurs qui semblent vouloir tenir tête au désespoir. Son œuvre est traversée par un symbolisme, celui de l’éternelle partance, fortement teintée d’un expressionnisme qui semble le plus souvent se conjuguer au féminin.

Car l’artiste tient la femme en estime dans ce qu’elle a de force intérieure et de ressources infinies. La couleur n’est pas un but en soi, mais un moyen pour transcender la douleur. Étalée, fouillée, écrasée, il l’utilise en aplats ou en coups de pinceau violents dans un geste que l’on imagine frénétique et spontané, comme si l’artiste, dans son désir de traduire un ressenti, était soumis à un exercice, celui de la course contre le temps, celle même que ses personnages tentent de faire, comme pour échapper à une destinée inéluctable.

Galerie Janine Rubeiz

Imm. Majdalani, avenue Charles de Gaulle, Raouché. Jusqu’au 16 août 2019.


Pour mémoire

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« Aujourd’hui, c’est le besoin qui règne et qui courbe sous un joug tyrannique l’humanité déchue », disait Friedrich Schiller (1795).L’œuvre d’Ahmad Kleige – exposée à la galerie Janine Rubeiz – témoigne de sa fascination pour l’homme, pour ses failles et pour sa volonté de puissance à toujours aller plus loin. Porté par le soin d’éveiller la conscience...

commentaires (1)

FAUT LAISSER LES COMMENTAIRES ET CRITIQUES AUX SPECTATEURS ET CLIENTS. UNE OEUVRE PRE-COMMENTEE ET EXPLIQUEE N,EN EST PAS UNE !

LA LIBRE EXPRESSION

07 h 09, le 23 juillet 2019

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Commentaires (1)

  • FAUT LAISSER LES COMMENTAIRES ET CRITIQUES AUX SPECTATEURS ET CLIENTS. UNE OEUVRE PRE-COMMENTEE ET EXPLIQUEE N,EN EST PAS UNE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 09, le 23 juillet 2019

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