Situées au nord de la ville de Baalbeck, les « Moghar el-Taheen » (ou grottes de farine) étaient tombées dans l’oubli et leur entrée n’était plus qu’un amoncellement de détritus. Ces grottes, ainsi nommées en raison de l’altération du calcaire réduit en poudre fine, étaient une carrière de pierre avant d’être transformées en cimetière vers la fin de l’époque romaine. Le site offre une dizaine de grottes enchevêtrées avec des sous-sols et des portes dotées de dessins aux motifs géométriques. Caractérisées par une architecture funéraire, les caves renferment des arcsolia (pluriel d’arcosolium), type de tombe où le mort, reposant dans un sarcophage ornemental rocheux ou dans un cercueil de matière périssable, est enterré sous une arche taillée dans la roche. Sur le site, les techniques d’extraction de pierre sont toujours visibles ainsi que les traces de certains canaux d’extraction creusés dans la roche pour faciliter le transfert des pierres.
(Lire aussi : Ce qui se passe quand le patrimoine libanais est menacé...)
Selon Hussein F. Hassan, professeur associé des sciences de l’alimentation et de la technologie et chef associé du département des sciences naturelles à la LAU-Byblos, et fondateur de l’ONG Le vivre-ensemble et le développement (Al-Taayouch wal Inmaa), le site, saisi par l’objectif de l’expert allemand Todor Vigan au début du XXe siècle, avait déjà été « nettoyé » de ses vestiges. Les jeunes qui s’aventuraient à l’intérieur prenaient leurs jambes à leur cou en découvrant des ossements humains. Vite, la rumeur a circulé que le lieu était habité par des fantômes. Progressivement, il va disparaître sous les déchets générés par les habitants installés à proximité. La quantité d’ordures déversées à l’intérieur des « Moghar el Taheen » a débordé vers l’extérieur, formant ainsi des monticules de détritus, d’excréments et de boue où les rats festoyaient jour et nuit.
(Lire aussi : Les royaumes oubliés reviennent sur le devant de la scène)
Devant ce spectacle déplorable et désolant, Hussein F. Hassan et les membres de l’ONG Le vivre-ensemble et le développement, notamment Mohammad Solh et Michel Ghossein, avec le soutien du président de la municipalité de Baalbeck Fouad Ballouk, décident de faire revivre ce patrimoine. Un financement de 180 000 dollars leur est alors fourni par UN-Habitat et l’Agence italienne pour la coopération au développement. Le grand nettoyage est lancé : les tracteurs sont mis à l’œuvre pour ramasser les tonnes d’ordures ménagères déversées au fil des années. Même les jeunes gens du quartier, alléchés par les billets verts, vont retrousser leurs manches et participer à l’œuvre en astiquant les grottes, sous la surveillance de la Direction générale des antiquités (DGA). Le quartier a changé d’habits pour revêtir ceux de la propreté. Les façades des maisons et les murets des jardins ont été badigeonnés et la route menant aux grottes entretenue. Mises en valeur, trois de ces grottes seront ouvertes au public à partir de demain dimanche et pourront bientôt servir à des activités culturelles.
Lire aussi
Des musées pour découvrir l’histoire du Liban autrement
commentaires (5)
Walla bravo. Et ces grottes polluaient aussi les nappes phréatiques. Double succès.
PPZZ58
10 h 13, le 14 juillet 2019