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À La Une - Conflit

En Syrie, la mort sans bruit et sans effusion

Le conflit qui secoue la région depuis 2011 a quitté la Une des journaux après la défaite territoriale de l'EI en mars. L'indignation des débuts a fait long feu et les ONG désespèrent de réveiller la communauté internationale.

Bombardements sur Khan Cheikhoun, dans la province d'Idleb, en Syrie, le 6 juin 2019. AFP / Anas AL-DYAB

Après Alep et la Ghouta, le drame de la guerre syrienne se rejoue à Idleb sous les yeux d'une communauté internationale muette et impuissante face aux enfants qui meurent de nouveau sous les bombes, aux hôpitaux qui volent en éclats, au flot des déplacés.

Le conflit qui secoue la région depuis 2011 a quitté la Une des journaux après la défaite territoriale du groupe État islamique (EI) en mars. L'indignation des débuts a fait long feu et les ONG désespèrent de réveiller la communauté internationale.

"Le monde entier regarde le massacre qui se déroule et le passe sous silence. L'ONU n'a pas bougé le petit doigt", accuse Mohammad Zahed Al-Masri de l'Alliance des ONG syriennes (SNA).

Depuis fin avril, le régime de Bachar el-Assad et son allié russe bombardent les secteurs jihadistes de la province d'Idleb (nord-ouest), la dernière qui échappe encore à son contrôle avec le Nord-Est kurde. Plus de 300 civils ont été tués selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) et plus de 270.000 personnes déplacées, d'après l'ONU. Au moins 23 hôpitaux et cliniques, mais aussi plusieurs écoles, ont été touchés par les bombardements.



(Lire aussi : Les raids meurtriers à Idleb, prélude à une offensive majeure ?)



"Service minimum"
Parfois, un dirigeant occidental s'insurge d'un tweet. "Le Monde observe cette boucherie. Quel est l'objectif, qu'est-ce que vous allez obtenir? ARRÊTEZ!", a lancé dimanche l'Américain Donald Trump. "La situation humanitaire en Syrie est critique et aucune option militaire n'est acceptable", avertissait le 7 mai le président français Emmanuel Macron.

"Mais qu'est-ce qu'un tweet du président ?", pointe un diplomate, déplorant ce "service minimum" d'Occidentaux sans prise sur le cours des événements.

La Russie, arbitre de la crise, affirme viser des "terroristes" à Idleb, en grande partie contrôlé par Hayat Tahrir al-Cham (HTS, ex-branche syrienne d'el-Qaëda). Début mai, Moscou s'est opposé à une initiative du Conseil de sécurité de l'ONU pour faire baisser la tension dans la province. "Les Américains sont coincés, ils n'arrivent pas à s'insérer dans un dialogue avec les Russes parce que les Russes ferment la porte", analyse une source diplomatique française. De son côté, le président Macron a tenté, sans grand succès, d'instaurer un dialogue avec Moscou via un groupe de contact réunissant six pays.

Pour l'heure, le régime - freiné par l'accord conclu entre Moscou et Ankara, parrain de groupes rebelles, en septembre 2018 - n'a pas annoncé une offensive à proprement parler contre HTS. Mais il poursuit ses bombardements et livre des combats au sol, laissant présager une volonté de reconquête de la province. "On sait que les Russes et Assad ont décidé qu'il fallait (passer à l'acte)", souligne la source diplomatique française.


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"Ligne rouge"
Pour Michel Duclos, ancien ambassadeur de France en Syrie et conseiller spécial de l'Institut de réflexion Montaigne, la communauté internationale est rongée depuis longtemps par un "sentiment d'impuissance". Et "dans ce cas, vous préférez détourner les yeux", dit-il. "Mais il y a aussi une décroissance de l'indignation, d'Alep (2016) à la Ghouta (banlieue de Damas, 2018) à Idleb", déplore l'auteur de "La longue nuit syrienne", en se demandant si l'on n'assiste pas in fine à une "accoutumance devant les drames humanitaires", de la Syrie au Yémen.

Les États-Unis et la France mettent avant tout le régime en garde contre toute attaque chimique à Idleb, agitant la menace de frappes aériennes si cette "ligne rouge" était franchie, comme en 2018 à la Ghouta.

Et les Européens redoutent l'exode de centaines de milliers de réfugiés de la poche d'Idleb, où s'entassent trois millions de personnes, vers le Vieux continent via la Turquie. "C'est une menace insupportable pour la stabilité de la région et indirectement pour notre propre sécurité", résumait fin mai le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian à l'Assemblée nationale.



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