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Liban - Haute tension

Les habitants de Mansouriyé en appellent aux scientifiques

« Les études invoquées par la ministre de l’Énergie et de l’Eau, Nada Boustani, sont obsolètes », estime Raja Noujaim.

Les lignes aériennes de haute tension, vivement rejetées par des habitants de Mansouriyé. Photo ANI

Les opposants aux projets d’installation de lignes de haute tension à Mansouriyé, Aïn Saadé, Beit Méry, Aïn Najm, Aïnout et Daychouniyé semblent plus que jamais déterminés à ne pas baisser les bras face à la décision du gouvernement d’aller de l’avant dans l’exécution de ce projet à proximité de leurs domiciles et écoles. Faisant appel cette fois à des scientifques, leurs représentants ont tenu hier une conférence de presse au Club de la presse au cours de laquelle ils se sont penchés, études scientifiques à l’appui, sur les conséquences graves que pourrait avoir sur la santé, selon eux, l’installation de câbles de 220 kilovolts (kV).

Prenant en premier la parole, Carole Ibrahim, habitante de Aïn Najm et militante de longue date contre ce projet, a indiqué que le but de la conférence de presse était de « répondre aux propos de la ministre de l’Énergie et de l’Eau, Nada Boustani, et à ceux d’Electricité du Liban (EDL), selon lesquels il n’y a pas de danger d’élever les lignes de haute tension au-dessus du sol ». « Dans la plupart des pays du monde, on enfouit les lignes sous terre et on les isole lorsqu’il s’agit de les installer à proximité des régions résidentielles », a-t-elle affirmé, déclarant que « cette solution, la meilleure possible, est également adoptée à Beyrouth ».

Mme Boustani avait indiqué le 10 mai dernier, lors d’une conférence de presse tenue aux côtés du directeur d’EDL, Kamal Hayek, que le projet ne faisait pas courir de risques de santé aux habitants de la région. « Les études internationales ont montré que l’installation de lignes de haute tension n’avait aucune conséquence sur la santé des riverains », avait-elle déclaré, affirmant s’appuyer sur « les conclusions de plusieurs études techniques conduites ces dernières années ».

Au cours de leurs interventions hier, Ramzi Nammour, spécialiste en biologie terrestre et en pollution électromagnétique, Rachid Rahmé, médecin à l’hôpital du Sacré-Cœur, et Mounir Rached, spécialiste en énergie, ont affirmé, eux, que des études scientifiques dans les pays développés ont démontré le danger important pour la santé humaine que représente la proximité des lignes de haute tension. Selon les résultats de ces recherches, les conséquences se traduisent par une augmentation de maladies, notamment le cancer, dont la leucémie et le cancer infantile, ainsi que par des taux élevés de dépression, de démence précoce et de maladies thyroïdiennes.



(Lire aussi : A Mansouriyé, les habitants lésés changent de stratégie mais pas d’objectifs)



Pour sa part, Raja Noujaim, un militant de la société civile qui s’oppose depuis longtemps à l’installation des câbles, a qualifié d’« obsolètes » les études adoptées par le ministère de l’Énergie et de l’Eau, faisant également observer que « des recherches récentes prouvent les effets néfastes de l’exposition à la haute tension ».« Les ministères de l’Énergie et de l’Eau, des Télécommunications, de la Santé et de l’Environnement ont été informés des résultats d’une conférence scientifique tenue à Tripoli durant le mois en cours, qui s’est articulée autour des effets de la pollution électromagnétique sur les sociétés », a en outre indiqué l’activiste. « Nous attendons de voir ce qu’ils vont en faire », a-t-il dit. M. Noujaim a par ailleurs mis en garde contre une situation similaire qui pourrait survenir dans d’autres régions du pays. « Le plan d’électricité signé par tous les responsables de l’État et tous les partis et forces politiques stipule dans son article 5 que de nombreuses régions, notamment Tyr, Zahrani, Bsalim, Deir Nbouh, Deir Ammar, Zouk, Adma, Jounieh, Damour et Jiyé, seront exposées à des lignes de haute tension comme celle de Bsalim-Aramoun ». « Des lignes de 20 kV sont installées sous terre, tandis que des lignes de 220 kV passent au-dessus de la tête des gens plutôt que d’être ensevelies par des moyens hautement technologiques », s’est en outre indigné M. Noujaim.

Carole Ibrahim, contactée par L’Orient-Le Jour, indique à ce sujet que « selon les normes européennes, chaque kilovolt nécessite un éloignement d’un mètre des zones d’habitation, autrement dit un câble de 200 kilovolts impose de l’installer à 200 m de ces zones ».



(Lire aussi : Nouveau sit-in des habitants à Aïn Najm)



Pétition
Jeudi, des habitants des régions concernées avaient signé une pétition réclamant l’arrêt immédiat des travaux d’installation des lignes aériennes de haute tension. « Nous adressons cette pétition à toutes les parties compétentes, tant locales qu’internationales, pour exprimer notre refus de voir le ministère de l’Énergie et EDL mépriser nos vies et exposer nos enfants et nos familles dans les écoles, les maisons, les centres de travail et les lieux de culte aux dangers des champs électromagnétiques », indique le texte, appelant le gouvernement à procéder à l’installation souterraine de la ligne à l’instar de ce qui a été fait à Beyrouth et sa banlieue, à Tripoli et d’autres régions où sont enfouis sous terre plus de 200 km de câbles de haute et très haute tension à côté de dizaines de milliers de constructions habitées.

« Cette réalité inhumaine et même contraire à la loi, à la Constitution et à la déclaration des droits de l’homme, qui ne respecte pas les normes scientifiques internationales et locales, constitue un crime contre l’humanité inadmissible dans tout État qui respecte et protège son peuple », poursuit le texte.

La pétition évoque en outre la conférence organisée par le syndicat des ingénieurs à Tripoli le 23 mars dernier, intitulée « La pollution électromagnétique et ses effets sur la santé des sociétés », et qui résume l’essentiel des recommandations préventives récentes pour se protéger des champs électromagnétiques émanant des lignes de haute tension. À ce sujet, Mme Ibrahim indique à L’OLJ que « ces champs ne doivent pas dépasser le seuil de 0,4 microteslas », alors que, dit-elle, la ministre de l’Environnement et EDL affirment qu’ils peuvent atteindre 100 microteslas. « Or, poursuit la militante, ce dernier chiffre est valable seulement en cas de passage dans une région exposée aux champs électromagnétiques et non en cas d’habitation dans une telle zone ».



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