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Liban - Déchets

Yacoubian dénonce une opération de marketing autour des incinérateurs

La question de la gestion des déchets ménagers était au centre d’une réunion de la commission parlementaire des Travaux publics.

Paula Yacoubian au cours de sa conférence de presse au siège du Parlement. Photo fournie par le Parlement

Paula Yacoubian, députée de Beyrouth issue de la société civile, très engagée sur le dossier du traitement des déchets, a de nouveau critiqué hier les projets de construction d’incinérateurs au Liban, et plus spécifiquement dans la capitale. Cette option, privilégiée par la nouvelle loi sur la gestion des déchets adoptée en novembre dernier par le Parlement, est qualifiée de « dangereuse » par une grande partie de la société civile.

« Nous sommes face à une opération de marketing pour promouvoir les incinérateurs », a déclaré Mme Yacoubian lors d’une conférence de presse au siège du Parlement à l’issue d’une réunion de la commission des Travaux publics qui a examiné le dossier des ordures ménagères à Beyrouth. Elle a également nié qu’il y ait eu une passe d’armes avec l’ancien Premier ministre et député Tammam Salam, également membre de cette commission. « J’ai juste demandé qu’une autre voix soit entendue », a précisé la députée.

La réunion d’hier, présidée par le député Nazih Najm, s’est tenue en présence du ministre de l’Environnement, Fady Jreissati, du mohafez de Beyrouth Ziad Chbib, du président du conseil municipal Jamal Itani, et des représentants du Conseil du développement et de la reconstruction et d’autres ministères.

À L’Orient-Le Jour, Mme Yacoubian a précisé « avoir demandé que deux opinions soient exprimées dans de telles réunions, afin que les députés se fassent une idée précise du sujet ». Elle a précisé que, dans cette réunion élargie destinée à aborder en profondeur ce sujet, il aurait mieux valu faire entendre la voix des experts qui ne sont pas favorables à l’installation d’incinérateurs dans des zones surpeuplées, et qui ont des arguments pour en prouver les risques. « Or n’ont été invités à cette réunion que des techniciens venus expliciter le plan de la municipalité de Beyrouth, ainsi que les fonctionnaires favorables à cette option, notamment du ministère de l’Environnement, dit-elle. J’ai protesté contre le fait que d’autres experts auraient dû être présents, comme ceux de la Coalition des déchets ménagers, qui peuvent débattre de cette question en connaissance de cause. »

Et d’ajouter : « Nous avons eu droit à une vidéo visionnée par le président du conseil municipal de Beyrouth sur l’incinérateur en Suisse. Or notre argument, c’est que notre gestion nationale du dossier ne nous permet pas d’opter pour une technologie complexe comme celle des incinérateurs, ce qui augure d’une véritable catastrophe. Et nous ne sommes pas en Suisse ! »


(Pour mémoire : « Il n’y aura pas d’incinérateurs, alors réfléchissez aux alternatives », lance Paula Yacoubian)



« Pourquoi ce choix ? »

La municipalité de Beyrouth, rappelons-le, a décidé de prendre en main la gestion de ses déchets, et a opté pour l’installation d’un incinérateur avec production d’énergie. La région visée n’a pas été divulguée, mais il est plus que probable que la municipalité compte installer cet incinérateur à la Quarantaine, ce qui, selon les détracteurs du projet, exposera Achrafieh, Bourj Hammoud et d’autres zones de Beyrouth et du Metn à une grave pollution, en cas de mauvaise gestion. Les craintes portent sur les émissions – qui peuvent être cancérigènes si elles ne sont pas contrôlées – mais aussi sur les résidus toxiques inévitables après l’incinération, et qui sont un casse-tête même dans les pays où la gestion des déchets ménagers est le plus avancée.

« L’Union européenne se dirige vers davantage de réglementations sur l’incinération, et le nombre d’incinérateurs se réduit de plus en plus en France, alors pourquoi ce choix au Liban ? » s’indigne Mme Yacoubian. Elle rappelle qu’un plan fondé sur le tri à la source et les choix adaptés aux déchets libanais avait été élaboré en 2016 au ministère de l’Environnement, se demandant pourquoi il a été totalement abandonné.


(Pour mémoire :  L’adoption d'un projet de loi en commission relance le débat sur l’incinération des déchets)


De son côté, Nazih Najm (courant du Futur) a assuré que les députés étaient attachés à l’environnement et au peuple libanais, accusant sa collègue, sans la nommer, de « démagogie ». « Si vous rejetez les incinérateurs aussi bien que les décharges, comment nous débarrasserons-nous de 7 000 à 8 000 tonnes produites chaque jour au Liban ? » a-t-il dit. « Il faut régler le dossier des déchets en prenant le temps et avoir l’esprit ouvert », a-t-il ajouté, soulignant que le ministre de l’Environnement « pourrait prendre des mesures nécessaires mais impopulaires » sur ce dossier, et qu’il n’était pas hostile au choix des incinérateurs. M. Najm a souligné que « deux ou trois réunions se tiendront la semaine prochaine afin qu’il y ait une décision qui soit utile au peuple libanais ».


Pour mémoire

« Non aux incinérateurs et aux décharges côtières, oui à un plan écologique »

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commentaires (4)

Il faut mettre les incinérateurs au sud de Beyrouth

Eleni Caridopoulou

12 h 38, le 29 mars 2019

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Commentaires (4)

  • Il faut mettre les incinérateurs au sud de Beyrouth

    Eleni Caridopoulou

    12 h 38, le 29 mars 2019

  • C,EST NORMAL... LA CORRUPTION EST TOUJOURS EN MARCHE ET LES CORROMPUS LIBRES ENCORE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 10, le 06 mars 2019

  • Le tri à la source ne marchera jamais au Liban pour deux raisons fondamentales: 1. Il faut un minimum de civisme. No comment. 2. Il n’y a pas de flux financier, et donc notre caste politique ne saura pas très bien comment ponctionner la quote-part qui lui est due (il faut bien qu’ils vivent, non?).

    Gros Gnon

    08 h 21, le 06 mars 2019

  • C'est tellement triste d'entendre des contre-vérités sur ce dossier crucial de santé public qu'est le déchet. Il n'est pas difficile de consulter les chiffres en France concernant les incinérateurs. Il y a dans ce pays plus de 120 incinérateurs pour une centaine de départements. Le plus petit est d'une capacité de 8700 tonnes par an dans le pas-de-Calais (de memoire) et les plus gros d'une capacité de plus de 300 000 tonnes par an. Rajoutons à ceci, le tri est très développé. Cela veut dire que la quasi-totalité du pays opte pour les incinérateurs ... Est ce qu'en France il y a plus de cancers qu'au Liban ? Est ce qu'il y a plus de pollution ou de mauvaises odeurs qu'au Liban ? À ma connaissance je ne crois pas. J'apprécie hautement les positions et les point de vus de Mme Yacoubian notamment pour sa sincérité et courage en politique, je lui souhaite réussite dans tant d'autres dossiers, mais pour les incinérateurs elle se trompe je suis désolé. Ahhh la tâche dans notre pays est immense. Courage à toutes et à tous.

    Sarkis Serge Tateossian

    01 h 06, le 06 mars 2019

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