Dans le nouveau gouvernement, il reviendra une fois de plus à Walid Joumblatt de faire pencher la balance dans un sens ou dans l’autre. Photo d’archives
S’il comprend l’écrasante majorité des formations politiques du pays, le nouveau gouvernement est dépourvu de toute majorité claire, sui generis. Il est somme toute un rassemblement de minorités politiques. Les seules majorités qui pourraient se constituer en son sein seraient donc ce que l’on peut appeler des « majorités ad hoc », au cas par cas, qui changent selon les dossiers.
Cet équilibre politique précaire n’est autre que le résultat du morcellement du paysage politique libanais, résultant d’abord du compromis présidentiel de 2016, qui a fait exploser le clivage 8/14 Mars, et ensuite de la nouvelle loi électorale, qui a accentué ce morcellement. Cela étant dit, il convient de noter, dans le cadre des combinaisons d’alliances possibles, que comme c’était déjà le cas dans le cabinet précédent, le partenariat entre le courant du Futur et le Courant patriotique libre, déjà avéré sur un nombre de sujets (nominations, électricité, etc.), continuera de dominer le Conseil des ministres et même de bénéficier parfois de la majorité absolue (dépendamment du comportement des deux « jokers » intégrés à la part présidentielle que sont les ministres druze, proche de Talal Arslane, et sunnite, représentant le 8 Mars).
Cette majorité ad hoc est en effet formée des neuf ministres gravitant dans l’orbite du chef de l’État et du parti qu’il a fondé, auxquels il faut ajouter les deux « jokers », ainsi que des six ministres du Futur.
(Lire aussi : Gouvernement : le « miracle » a eu lieu, mais tout reste à faire)
Le tiers de blocage
Sauf que sur certaines questions d’ordre stratégique, d’autres combinaisons seraient possibles, d’où l’importance que revêt le tiers de blocage, dans la mesure où celui ou ceux qui le détien(nen)t peuvent bloquer ou même renverser le gouvernement. Tout aussi important est le rôle qui revient une fois de plus au chef du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt, de faire pencher la balance dans un sens ou dans l’autre. Ainsi, en dépit d’une éventuelle convergence entre le Futur (6 ministres) et les Forces libanaises (4), ces deux partis ne pourraient détenir le tiers de blocage que si le PSP (2) se joint à eux, élevant le total à 12.
De même, les forces gravitant dans l’orbite du 8 Mars ne pourraient atteindre le tiers de blocage que grâce à… Walid Joumblatt, même si les deux « jokers » présidentiels sunnite et druze s’allient à eux sous l’effet d’un forcing du Hezbollah, sachant que les ministres de ce camp sont répartis de la façon suivante : six relevant du tandem Amal-Hezbollah, un des Marada, auxquels s’ajouteraient le sunnite et le druze dépendant théoriquement du chef de l’État. Ce n’est qu’avec leurs deux collègues du PSP qu’ils seraient en mesure d’avoir le tiers de blocage (avec 11 ministres). Il va sans dire qu’il est plus probable, statistiquement, de voir Moukhtara se rallier à Meerab et à la Maison du Centre plutôt qu’à Ghobeiri.
Mais de l’autre côté, il n’est pas exclu que le camp aouniste soit tenté de rejoindre quelquefois le 8 Mars sur certains dossiers, en dépit des tensions réelles entre les deux parties, éclatées au grand jour pour ce qui est des rapports avec le mouvement Amal et les Marada, plus souterrains en ce qui a trait au Hezbollah. À la lumière de tout ce qui précède, il serait donc prématuré de conclure, d’ores et déjà, sur le fait que telle ou telle partie exerce son hégémonie sur le nouveau gouvernement. Ce ne sera que dans les prochaines semaines, voire les prochains mois, que l’on pourra mesurer avec plus de certitude l’évolution des équilibres politiques en son sein.
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commentaires (7)
Déjà l'un des deux jokers intégrés à la part présidentielle Hassan Mrad vient d'assurer à 12h28 qu'il représente la "Rencontre consultative" pro-syrienne... Attendons le deuxième joker qui n'a pas encore dit son dernier mot.
Un Libanais
13 h 42, le 01 février 2019