Un bus anti-Brexit devant le Parlement de Westminster, à Londres, le 15 janvier 2019. AFP / Oli SCARFF
Quand
Le vote commencera à 19 heures GMT (21h, heure de Beyrouth) ce soir, mais pourrait durer longtemps. Initialement prévu en décembre, le vote avait été reporté à la dernière minute par Theresa May pour éviter une défaite annoncée et tenter d'obtenir des "assurances" supplémentaires des dirigeants européens.
Que contient l’accord
L'accord proposé par May inclut la garantie que les droits des citoyens de l'Union européenne vivant au Royaume-Uni et des citoyens britanniques vivant dans les pays de l'UE seront protégés. L'accord comprend également une période de transition, qui devrait s'achever le 31 décembre 2020. Durant cette période, le Royaume-Uni profitera de la plupart des avantages de son adhésion à l'Union, notamment le libre-échange avec les autres pays-membres. Mais cet accord commercial n’est pas final avec l’UE : des discussions détaillées au niveau de ce sujet sont encore à venir. L'accord de Brexit signifie que le Royaume aura jusqu'à la fin de 2020 pour conclure un accord commercial.
Combien de vote faut-il pour le texte soit adopté ?
Le vote se fera à la majorité simple, et donc le nombre de voix nécessaires dépendra des abstentions et du nombre de députés absents.
Qui devrait voter quoi ?
- Les pour
Les "fidèles" de Theresa May : La majorité des 317 députés conservateurs devrait soutenir le plan de la Première ministre. Pragmatiques, il s'agit soit de députés pro-Brexit ou europhiles modérés dont la plus grande crainte est de sortir de l'UE sans accord du tout.
- Les électrons libres
Bien que le Parti libéral-démocrate figure parmi les plus europhiles, l'un de ses députés, Stephen Lloyd, a rompu avec la ligne du parti en s'engageant à défendre l'accord de Brexit négocié par Theresa May. Plusieurs députés travaillistes comme Caroline Flint ou Kevin Barron, élus dans des circonscriptions ayant voté pour le Brexit, ont aussi annoncé qu'ils voteraient pour l'accord afin d'éviter le risque d'une sortie de l'UE sans accord.
- Les contre
L'European Research Group (ERG) : Cette alliance de députés conservateurs europhobes est farouchement opposée à l'accord. Composée de 60 à 85 députés, l'ERG compte les anciens ministres Boris Johnson et David Davis. Ils sont favorables à un accord de libre-échange sur le modèle canadien voire à un départ brutal de l'UE, sans accord avec les 27.
Le Parti travailliste : La plupart des 257 députés travaillistes sont pro-européens et s'opposeront, conformément à la ligne du parti, à l'accord négocié par la Première ministre. Le parti plaide pour un maintien dans l'union douanière européenne, qui abolit les droits de douane entre pays membres et établit une politique commerciale commune vis-à-vis de pays tiers.
Le SNP : Les 35 députés du parti national écossais (SNP) sont résolument favorables à l'UE et contre l'accord de Brexit. Le parti veut que le Royaume-Uni, ou tout au moins l'Écosse, reste dans le marché unique et l'union douanière. Faute de quoi la cheffe du SNP et Première ministre écossaise, Nicola Sturgeon, a promis d'organiser un autre référendum sur l'indépendance de l'Écosse.
Le DUP : Le petit parti nord-irlandais ultra-conservateur, dont les 10 députés offrent à Theresa May une courte majorité absolue au Parlement, est pro-Brexit et s'oppose au projet d'accord, qui selon lui remet en cause l'intégrité économique et politique du Royaume-Uni. En cause, la solution dite de "backstop" (filet de sécurité), destinée à éviter une frontière terrestre entre l'Irlande du Nord et la République d'Irlande après le Brexit, en prévoyant un alignement réglementaire de la province britannique sur l'UE, ce qui lui conférerait un statut spécial.
Les conservateurs pro-UE : Une douzaine de députés conservateurs ont fait campagne contre le Brexit lors du référendum du 23 juin 2016 et restent fermement opposés à celui-ci, défendant l'organisation d'un second référendum. Ils ont exclu de soutenir l'accord négocié par Theresa May.
- Les incertains
Les travaillistes pro-Brexit: Un petit groupe de députés du Labour ont défendu le Brexit, à contrepied de la ligne du parti. Ils pourraient soutenir l'accord de Brexit au Parlement, sauf s'ils préfèrent soutenir un départ de l'UE sans accord.
Et après ?
Le Parlement vote l'accord, sortie ordonnée
Si l'accord est voté au Parlement, scénario qui semble peu probable, une sortie ordonnée s'ensuivra. S'ouvrira une période de transition post-Brexit prévue pour durer jusqu'à fin 2020 pendant laquelle presque rien ne changera. L'accord règle la question de la facture que devra régler Londres à l'UE pour honorer ses engagements et définit les droits des citoyens expatriés.
Le point le plus controversé concerne le "backstop". Ce "filet de sécurité" prévoit la création d'un "territoire douanier unique" englobant l'UE et le Royaume-Uni, avec un alignement plus poussé pour l'Irlande du Nord, qui s'appliquerait en cas d'échec des négociations à venir sur la future relation commerciale entre Londres et les 27.
Le Parlement rejette l'accord: "no deal", second référendum ?
Si le texte est rejeté par la chambre des Communes, l'un des scénarios envisageables est celui d'un Brexit sans accord, avec le spectre d'un effondrement de la livre et d'une montée en flèche du chômage. Les relations économiques entre le Royaume-Uni et l'UE seraient alors régies par les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), et une multitude de contrôles douaniers et réglementaires devraient être mis en place en urgence.
Cependant, la menace d'un "no deal" semble avoir été contrecarrée la semaine dernière par les députés, avec l'adoption d'un amendement obligeant l'exécutif à présenter sous trois jours, en cas de rejet de l'accord, un "plan B" amendable.
- Nouvelles élections
Elles devraient être précédées d'une motion de censure, que compte déposer le Labour si Mme May perd le vote de ce soir. Toutefois, si une bonne centaine de députés tories ont essayé de renverser Theresa May en décembre, il n'est pas dit qu'ils s'allient à l'opposition travailliste pour une manœuvre qui pourrait leur faire perdre le pouvoir. Si les travaillistes l'emportent, ils comptent négocier un nouvel accord avec Bruxelles.
- Report du Brexit
Reporter le Brexit via une extension de l'article 50 du Traité de l'UE, qui régit le départ d'un État membre, apparaît de plus en plus comme une éventualité crédible, y compris si Theresa May emporte le vote au Parlement car il ne lui resterait que peu de temps pour faire passer la législation nécessaire avant la sortie de l'UE, le 29 mars.
L'organisation d'un second référendum ou d'élections législatives anticipées nécessiterait aussi de repousser la date du Brexit. Une centaine de députés européens de différents bords politiques s’étaient engagés lundi à soutenir une demande de report de Londres.
Pour mémoire
May met en garde contre un rejet « catastrophique » de l’accord
LE RENARD BRITANNIQUE NE SE LAISSE PAS PRENDRE...
20 h 36, le 15 janvier 2019