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Liban - Parcelle 740 / Bachoura

Vestiges à Beyrouth : Ghattas Khoury attribue à « une faille dans les démarches procédurales » la décision du Conseil d’État

Le ministre de la Culture affirme à « L’Orient-Le Jour » qu’il n’a toujours pas été notifié du jugement.

Le ministre de la Culture, Ghattas Khoury, a attribué hier à une faille dans les démarches procédurales la décision du Conseil d’État de suspendre ses décisions concernant le démantèlement du mur d’enceinte archéologique sur la parcelle 740 de Bachoura (Beyrouth), affirmant à L’Orient-Le Jour qu’en tout état de cause, son ministère se conformera au jugement, et plus généralement, à toute décision judiciaire.

M. Khoury avait autorisé en mars une société anonyme de promotion immobilière, Alia & Co, à démanteler le mur et à le réintégrer une fois achevés les travaux de construction de sous-sols sur le terrain. Ce qui a poussé l’Association pour la préservation du patrimoine libanais (APPL) à présenter à son encontre un recours pour excès de pouvoir, basé sur une loi en vertu de laquelle le démantèlement ne peut s’effectuer qu’à travers une décision de la Direction générale des antiquités (DGA), ou, lorsque les découvertes sont importantes, en application d’une décision du ministre de la Culture, fondée sur une proposition du directeur général des Antiquités.

« L’arrêt du Conseil d’État ordonnant la suspension de mes décisions est basé sur le fait que le dossier administratif comportant les plans, études et cartes sur lesquels je me suis appuyé pour rendre ces décisions est incomplet », indique M. Khoury à L’OLJ, soulignant que dans le dispositif de son arrêt, le Conseil d’État lui a demandé de lui soumettre tous ces documents.


(Lire aussi : Le Conseil d’État suspend une décision du ministre de la Culture de démanteler des vestiges à Beyrouth)


Se conformer aux décisions de justice

« J’avais envoyé ce dossier le 4 novembre dernier, mais apparemment, le Conseil d’État n’en a pas pris livraison », indique M. Khoury, soulignant que le problème réside dans la communication entre son ministère et l’organisme judiciaire, qui « s’effectue à travers la section du contentieux au sein du ministère de la Justice ». « Nos échanges se font au moyen de correspondances à travers ce service, lequel semble n’avoir pas encore fait parvenir les documents », estime-t-il, attribuant cela à « une faille dans les démarches procédurales, comme elle existe dans toutes les administrations ». Le ministre de la Culture, qui, dit-il, souhaite l’introduction de l’électronique dans tous les services de l’État, indique qu’il est entré hier en contact au téléphone avec le président du Conseil d’État, Henri Khoury, pour lui montrer son désir de coopérer. Il lui a ensuite envoyé le dossier administratif de manière informelle, en attendant de joindre aujourd’hui la section du contentieux afin de lui demander de faire parvenir au Conseil d’État le dossier qu’il présume être en sa possession. « Nous nous préoccupons d’œuvrer avec transparence et sommes attachés à nous conformer à toutes les décisions de justice », indique à cet égard le ministre de la Culture.

De source sûre, on apprend que c’est le 11 décembre que le Conseil d’État a transmis à la section du contentieux une copie de son jugement. La notification aurait ensuite été faite au ministère de la Culture, sous le numéro 1375, indique une source proche de l’APPL. Une affirmation que réfute le ministre de la Culture, qui indique que « les plis notifiés qui parviennent à la DGA portent des numéros qui commencent par 6000 ». « À moins que le pli ait été envoyé par erreur au ministère de la Justice », ajoute M. Khoury, s’engageant à vérifier cela dès aujourd’hui.

Interrogé par L’OLJ sur le point de savoir pourquoi il a chargé une commission d’ingénieurs de rédiger un rapport sur le site archéologique plutôt que de confier cette charge à la Direction générale des antiquités (DGA), comme l’édicte la loi, Ghattas Khoury affirme que « les membres de la commission sont des archéologues dont les noms ont été proposés par la DGA ».

Sur un autre plan, le ministre tient à préciser que le propriétaire de la parcelle 740/Bachoura a déjà restauré l’église et le jardin archéologique qui s’y trouvent, soulignant qu’il n’y aura aucune construction sur cette partie du site.

Quid de la suspension des travaux de démantèlement ? Est-elle déjà effective ? Selon une source judiciaire interrogée par L’OLJ, les travaux ne peuvent être suspendus qu’à partir du moment où le ministère de la Culture est notifié du jugement du Conseil d’État. Ghattas Khoury estime à ce propos qu’ils le seront une fois notifiés le propriétaire de la parcelle et la société de promotion immobilière.

Sur un tout autre plan, concernant l’intervention du député Jamil Sayyed dans le procès aux côtés de l’APPL, il semble que le Conseil d’État se prononcerait pour une absence de qualité à agir. Une source juridique souligne dans ce cadre à L’OLJ que le domaine d’action d’un député est confiné au sein du Parlement, à travers le vote de confiance au gouvernement ou les questions écrites adressées aux ministres.


(Lire aussi : L’hippodrome de Beyrouth n'est plus que l’ombre de lui-même)


Droit de réponse

En réaction à l’article paru hier dans L’OLJ, sous le titre « Le Conseil d’État suspend une décision du ministre de la Culture de démanteler des vestiges à Beyrouth », le bureau de presse de Ghattas Khoury nous a envoyé dans l’après-midi d’hier la réponse ci-après :

« Nous avons appris à travers la une du numéro de L’Orient-Le Jour daté du 17 décembre que le Conseil d’État a prononcé une décision dans laquelle il ordonne de suspendre l’exécution d’une décision du ministre de la Culture relative à la parcelle 740 de la zone foncière de Bachoura. Nous souhaitons que vous publiiez les clarifications suivantes :

“Le ministère de la Culture n’a pas été notifié à ce jour de l’arrêt rendu par le Conseil d’État pour agir en conséquence. Il a été informé par ouï-dire de la conclusion de ce jugement dans laquelle le Conseil d’État a ordonné le sursis à exécution des deux décisions du ministre de la Culture, et demandé au ministère de lui présenter sa réponse et lui soumettre un dossier administratif relatif au recours présenté.

“Le ministère de la Culture a dans ce cadre fait parvenir au Conseil d’État un dossier administratif et un dossier technique afin qu’il étudie la question et rende un jugement opportun.

“Le ministère de la Culture réitère son engagement à se conformer aux règles en vigueur et exécuter toutes les décisions émanant des institutions légales.” »


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LE TEMPS DES EXCUSES... ET DES ACCUSATIONS...

LA LIBRE EXPRESSION

09 h 36, le 18 décembre 2018

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Commentaires (2)

  • LE TEMPS DES EXCUSES... ET DES ACCUSATIONS...

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 36, le 18 décembre 2018

  • Ce qui est unique et inique dans cette histoire, c’est la façon avec laquelle le ministre de la culture essaye de se justifier en persistant dans son entêtement à continuer ce projet malgré le tollé général contre cette grave entorse à la préservation du patrimoine historique national...il y’a définitivement anguille sous roche! Il y a déjà 6 mois, lors de la parution de ce scandale et les mises en demeure, j’avais fait le commentaire que, lorsqu’un médecin se transforme en politicien par opportunisme et conseiller de Mr Hariri, il va très vite prendre les mauvaises habitudes de magouilles suspectes et corrompues de notre classe politique et abuser de son pouvoir et que le projet va être oublié et les travaux continuer comme de rien car, chez nous: le chien aboie et la caravane passe! Et c’est exactement ce qui s’est passé! Et notre ministre persiste et signe sans même se donner la peine, par décence et respect des gens, de simplement geler tout ce projet en attendant les décisions des experts! Allez, rien ne va changer de sitôt.

    Saliba Nouhad

    03 h 40, le 18 décembre 2018

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