Carlos Ghosn, accusé par le parquet de Tokyo de dissimulation de revenus, a minoré en connaissance de cause, à partir de 2009, une partie de sa rémunération après l'entrée en vigueur d'une loi l'obligeant à en divulguer le montant intégral, selon une source proche du dossier.
Toujours en garde à vue, le patron de l'alliance automobile Renault-Nissan-Mitsubishi est soupçonné d'avoir minimisé ses revenus chez Nissan d'un milliard de yens par an (7,7 millions d'euros) sur la période d'avril 2010 à mars 2015, dans des documents publics remis par la société aux autorités financières nipponnes. Il avait été interpellé dans la soirée du 19 novembre.
Or, d'après la source interrogée jeudi par l'AFP, qui a souhaité gardé l'anonymat, les faits ont commencé dès l'exercice 2009/2010 en raison de l'entrée en vigueur d'une loi imposant aux administrateurs les mieux payés de divulguer leurs rémunérations.
"Tout d'un coup, M. Ghosn s'est retrouvé obligé de publier ses revenus (qui s'élevaient à l'époque à 2 milliards de yens) et, à partir de ce moment-là, il a commencé à les diviser en deux parties : un montant déclaré, un autre non déclaré censé en théorie lui être versé au moment où il se retirerait du groupe", assure cette source proche des enquêtes de Nissan et du parquet.
(Lire aussi : Affaire Carlos Ghosn : quel avenir pour Renault-Nissan-Mitsubishi?)
Le Franco-Libano-Brésilien aurait "demandé à ses assistants de s'assurer" que les revenus qui devaient lui être versés ultérieurement soient masqués aux autres divisions de la compagnie. "Des documents existent, signés par Carlos Ghosn", mentionnant les différentes sommes, qui étaient conservés dans le secrétariat, au secret, ajoute la même personne. Les montants annuels non déclarés ont grandi au fil du temps, atteignant sur l'exercice 2017-2018 la somme de 1,7 milliard de yens, précise-t-elle.
Le but de la manœuvre, selon la presse, aurait été d'éviter les critiques des actionnaires et des employés, dans un pays où les PDG perçoivent des émoluments plus modestes qu'ailleurs.
Greg Kelly, bras droit de M. Ghosn arrêté en même temps que lui, a reconnu l'existence d'un tel mécanisme mais il a déclaré aux enquêteurs avoir "consulté les experts de l'Agence des services financiers sur la question et s'être vu répondre qu'il n'y avait pas de problème", a rapporté jeudi le quotidien Yomiuri Shimbun, sans nommer ses sources. Carlos Ghosn dément également "tout acte illégal", disant s'en être remis à M. Kelly, lui-même avocat, ajoute le journal.
En outre, l'agence de presse japonaise Kyodo a rapporté jeudi que le parquet de Tokyo veut prolonger la détention de l'homme d'affaires. Le procureur adjoint de Tokyo avait auparavant déclaré à la presse ne pas pouvoir indiquer si la détention de Carlos Ghosn serait prolongée. Une telle prolongation serait conforme à la loi japonaise, avait précisé Shin Kukimoto, ajoutant qu'elle ne poserait aucun problème.
La période de détention de 10 jours de Carlos Ghosn s'achèvera vendredi. Le parquet japonais peut demander l'autorisation de prolonger cette détention pour un maximum de 10 jours supplémentaires, au terme desquels il devra décider de l'inculper ou de le libérer.
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commentaires (2)
Pauvre Carlos Ghosn, ne pense qu'à te sortir vivant de ce guêpier et une fois dehors le monde sera de nouveau à toi. Sauf si on te fait signer un acte ou qu'on te menace de ne plus agir pour le compte d'autres industries .
FRIK-A-FRAK
12 h 56, le 29 novembre 2018