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Liban - Législatives

Recours : le Conseil constitutionnel a encore besoin de quelques mois

L’annulation de l’élection de certains députés est une forte probabilité, selon une source informée.


Le siège du Conseil constitutionnel. Photo d’archives

Plus de trois mois après la présentation des recours en invalidation devant le Conseil constitutionnel par des candidats défaits aux législatives de mai 2018 et dénonçant une manipulation du processus et des résultats électoraux dans plusieurs circonscriptions, notamment Beyrouth I et II et Baalbeck-Hermel (Békaa III), l’instance juridictionnelle poursuit ses enquêtes sans pour autant qu’on puisse espérer la publication de jugements avant le début de l’an prochain. Et ce en raison du travail de titan que les investigations imposent.

Hier, Élie Pano, qui a remporté le siège des minorités chrétiennes sur la liste du Courant patriotique libre (CPL) à Beyrouth I, et l’activiste Joumana Haddad (Koullouna Watani), donnée gagnante de ce même siège le soir des élections, mais dont la défaite a été annoncée le lendemain, ont été tous deux entendus par des rapporteurs, membres du Conseil constitutionnel, qui ont voulu s’informer de leurs versions respectives concernant le déroulement de l’opération électorale et du décompte des voix.

De son côté, Yéhia Chamas, candidat chiite défait à Baalbeck-Hermel par la liste du Hezbollah, s’est rendu hier à la séance du Conseil constitutionnel à laquelle il a été convoqué, affirmant devant le siège du CC avoir « une confiance totale » dans le travail effectué par la juridiction.

Jeudi dernier, les membres du CC avaient entendu un premier groupe de candidats défaits dans la circonscription de Beyrouth II, notamment Ibrahim el-Halabi, Omar Wakim (liste Sawt el-Nass), Salwa Ayoub el-Khalil (liste Beyrouth el-Watan), Nadim el-Osta et Zeina Mounzer ((liste Loubnan Herzein), laquelle a présenté un recours en invalidation de l’élection de Nouhad Machnouk et Fayçal Sayegh, candidats de la liste du courant du Futur. Le lendemain, des membres de l’instance ont auditionné Hani Merhebi, avocat de l’ancien ministre Achraf Rifi défait à Tripoli, qui avait présenté lui aussi un recours en invalidation.


(Pour mémoire : Recours contre les résultats des législatives : le Conseil constitutionnel dément les rumeurs) 


Vérifier des milliers de bulletins de vote
Si la procédure peut paraître longue pour certains, un expert assure à L’Orient-Le Jour que celle-ci se situe toujours dans les délais raisonnables. Il rappelle que les candidats défaits bénéficiaient d’un délai d’un mois après les législatives du 6 mai pour intenter leur recours, et que les députés dont la victoire a été contestée avaient 15 jours pour répondre aux recours dont les a notifiés le CC.

La phase préliminaire des enquêtes (audition de la société informatique en charge des données, convocation de fonctionnaires du ministère de l’Intérieur…) n’a donc débuté que vers fin juin et a pris du temps. Sans compter le temps que prend la vérification un à un de milliers de bulletins annulés par des responsables de bureaux de vote et qui se trouvent dans des urnes au sein du bâtiment

ultrasécurisé de la Banque du Liban. D’après cette même source, les membres du CC ont dû se rendre à la BDL pour effectuer leur besogne, demandant ensuite au ministère de l’Intérieur de leur faire parvenir les urnes controversées au siège du CC.

Il existe aussi d’autres sources de litiges. Pour la circonscription de Bécharré par exemple, où le candidat malheureux William Tok a intenté un recours contre Joseph Ishak, député des Forces libanaises (FL), les résultats électoraux indiquent qu’aucun bulletin n’a été introduit dans aucune urne des 28 bureaux de vote installés pour les Libanais votant à l’étranger. L’enquête menée à ce sujet prend aussi du temps.


(Pour mémoire : Résultats des législatives : le retrait du recours de Salah Salam n’engage pas les autres candidats)


Quant aux auditions, elles ne sont pas près de s’achever, affirme la même source, indiquant que le CC a le droit de convoquer toutes les personnes qu’il juge utile d’entendre, et que celles-ci ne devraient pas se sentir suspectes ou coupables, comme elles se seraient senties devant les tribunaux de droit commun. Pour la seule circonscription de Baalbeck-Hermel, où Yéhia Chamas a intenté son recours, il reste encore à auditionner nombre de personnes, notamment Albert Mansour, Salim Kallas, Walid Succarieh, Jamil Sayyed et Antoine Habchi. Une autre source informée explique à cet égard que, dans le système de la loi proportionnelle, et plus particulièrement de la voix préférentielle, le recours d’un candidat malheureux appartenant à une confession déterminée peut rejaillir sur tous les membres d’une liste, indépendamment de leur confession.

À une question de L’Orient-Le Jour concernant la probabilité que le CC annule l’élection de certains députés, qui, au prononcé des jugements, auront passé finalement au moins six mois au Parlement, cette source indique qu’ « elle est forte », une loi sur l’élection des députés stipulant que ces derniers « exercent leur fonction jusqu’à l’annulation de leur mandat ». « Le fait accompli n’est donc en aucun cas une entrave à l’établissement de l’ordre public et d’une justice fondée sur des preuves manifestes d’irrégularités », ajoute-t-elle.

« En plus du travail titanesque qu’accomplit le Conseil constitutionnel, il faut ajouter que l’action de cette juridiction est quelque peu gênée par le manque de coopération de la Commission de supervision des élections » , affirme un observateur consulté par L’OLJ, soulignant que « jusqu’à présent, cette instance n’a pas présenté son rapport sur les dépenses effectuées par les candidats ». Et de dénoncer, à ce propos, « le manque de courage de certains juges qui bénéficient pourtant de garanties pour leur indépendance », notant que « l’obligation de réserve n’implique pas une obligation de paresse, de peur ou de manque de sérieux ».


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