Le président libanais, Michel Aoun, qui est arrivé lundi à Strasbourg pour prononcer le lendemain un discours devant le Parlement européen, a affirmé que le gouvernement libanais sera formé une fois que le Premier ministre Saad Hariri aura présenté une mouture "équilibrée".
"Lorsque la mouture du nouveau gouvernement sera équilibrée, le cabinet sera formé, et aucune composante ou communauté religieuse n'a le droit de monopoliser la représentation ou de marginaliser les autres", a affirmé le chef de l'Etat aux journalistes qui l'accompagnaient à bord du vol Beyrouth-Strasbourg.
"On perd du temps à parler de prérogatives, alors que la Constitution consacre le partenariat entre les trois présidences (de la République, du gouvernement et du Parlement) lorsqu'il s'agit de former le gouvernement", a en outre affirmé le président Aoun.
Le président libanais, qui est accompagné de son épouse, Nadia Aoun, doit également s'entretenir avec de hauts responsables européens durant son séjour et aller à la rencontre de la diaspora libanaise à Strasbourg.
Le débat concernant les prérogatives de la présidence de la République et du président du Conseil avait été relancé lundi dernier lors de la présentation par le Premier ministre désigné, Saad Hariri, d'une nouvelle mouture de gouvernement. Le président Michel Aoun avait alors "formulé quelques remarques en se basant sur les critères qu’il avait fixés dans l’intérêt du Liban", lors d'un discours prononcé début août. Nombreuses formations politiques avaient alors estimé que la définition de tels critères ne rentrait pas dans les prérogatives du président de la République.
Interrogé par les journalistes sur un éventuel message que le chef de l'Etat adresserait ce mois-ci au Parlement afin d'inciter M. Hariri à former le gouvernement, le président Aoun s'est contenté de dire : "Cela est possible, il s'agit d'un droit prévu par la Constitution". Cette hypothèse est envisagée par le chef du Législatif, Nabih Berry.
Depuis sa désignation le 24 mai, M. Hariri a présenté plusieurs formules qui ont toutes été rejetées par le chef de l'Etat et certaines formations politiques. Le processus de formation du gouvernement continue de buter sur plusieurs obstacles, notamment le différend opposant le Courant patriotique libre aux Forces libanaises autour de leurs quotes-parts gouvernementales respectives. À cela s’ajoute la querelle entre le chef druze Walid Joumblatt et son principal rival Talal Arslane, le CPL insistant à intégrer ce dernier à la future équipe ministérielle, contrairement à la volonté du leader druze qui veut nommer tous les ministres appartenant à sa communauté au sein du cabinet Hariri.
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Le soutien de Deriane à Hariri
A l'occasion du nouvel an de l'Hégire que les musulmans célèbrent demain, le mufti de la République, le cheikh Abdel Latif Deriane, plus haute autorité religieuse sunnite du Liban, a apporté lundi son soutien à Saad Hariri.
"Je salue le Premier ministre désigné car il ne participe pas aux surenchères verbales qui ne servent qu'à semer la discorde", a déclaré le cheikh Deriane lors d'un discours prononcé à Dar el-Fatwa à l'occasion du nouvel an de l'Hégire, ajoutant que M. Hariri "œuvre en faveur de l'entente, de l'équilibre et du redressement de la patrie". "Nous souhaitons que son gouvernement soit formé et qu'il devienne le gouvernement de tous", a-t-il ajouté, dénonçant "les querelles communautaires qui menacent la nation". "Nous avons un Pacte national et une Constitution, et nous ne sommes ni des moutons, ni des subordonnés pour que tel ou tel camp remette en cause notre identité et notre appartenance", a-t-il également affirmé, soulignant que "nous vivons une grande crise, non seulement en raison de l'absence d'un gouvernement, mais aussi à cause de la situation économique et de la profonde fracture politique".
Le mufti jaafarite cheikh Ahmad Kabalan, représentant le vice-président du Conseil supérieur chiite, le mufti Abdel Amir Kabalan, a pour sa part appelé à "hâter la formation d'un gouvernement d'union", implorant le président de la République "de céder sa part gouvernementale à ceux qui sont responsables du blocage afin de barrer la route à tous ceux qui veulent du mal au pays". "Nous appelons à dépasser les mesquineries et à se comporter avec les autres dans un esprit de partenariat, surtout dans cette période qui exige une solidarité entre tous", a ajouté le mufti jaafarite.
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commentaires (8)
Il y a un Parlement européen à Strasbourg et il existe un autre à Bruxelles. Je suis pessimiste en concernant le futur de l'union européenne: à la limite les décisions doivent être prises dans les parlements nationaux comme à Londres et Paris et Berlin ou Rome et Madrid. Comment le président libanais peut-t-il parler devant un Parlement européen ? ce n'est pas logique, nous européens nous avons déjà assez de problèmes nous mêmes donc pas besoin d'inviter des libanais.
Stes David
10 h 51, le 11 septembre 2018