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Santé - Oncologie pédiatrique

Ce qu’il faut faire pour guérir plus de 80 % des cancers de nos enfants

Le taux de guérison pourrait augmenter si les enfants qui ne répondent pas aux traitements conventionnels pouvaient bénéficier des nouvelles thérapeutiques.

L’état de santé des enfants qui ne répondent pas aux traitements conventionnels pourrait s’améliorer s’ils pouvaient bénéficier des nouvelles thérapies. Photo Bigstock

Contrairement au cancer des adultes, celui des enfants – tous types confondus – est guérissable dans 80 % des cas. Dans les 20 % des cas restants, soit l’enfant fera une rechute, soit il ne répondra pas aux traitements conventionnels. Pourtant, « son état pourrait s’améliorer s’il pouvait bénéficier des nouvelles thérapies qui commencent à être mises sur le marché », explique la Dr Roula Farah, pédiatre-hématologue-oncologue à l’hôpital universitaire Saint-Georges de Beyrouth et professeure associée de pédiatrie et d’oncologie pédiatrique à la faculté de médecine de l’Université Balamand. « Or, tous les enfants n’ont pas accès à ces médicaments, principalement à cause de leur prix excessivement élevé », déplore-t-elle. Une problématique qui inquiète les médecins, « d’autant que nous partons toujours du principe que nous devons guérir tous les cancers pédiatriques, mais la réalité est tout autre », se désole-t-elle.

La Dr Farah explique que « la recherche a abouti à d’importantes avancées médicales et scientifiques en oncologie pédiatrique ». « Je fais partie, en Europe, d’un groupe de recherches qui œuvre à identifier les causes génétiques du cancer chez l’enfant, souligne-t-elle. La biologie moléculaire permet d’établir un profil moléculaire de la tumeur pour connaître les perturbations survenues au niveau cellulaire et d’identifier plusieurs cibles moléculaires pour lesquelles il existe des traitements, dont nombre d’entre eux sont utilisés dans le cadre de protocoles de recherches menées aux États-Unis, en Europe ou ailleurs. Cela est important parce qu’en tant que médecins, nous ne voulons pas baisser les bras. Nous souhaitons permettre à l’enfant malade de bénéficier de ces traitements. De leur côté, les parents veulent tout faire pour sauver leur enfant. Néanmoins, ils se trouvent dans leur majorité dans l’incapacité de lui offrir ces traitements. »


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Science, politique et éthique
Cette inégalité dans l’accès aux nouveaux traitements, « qui ne va cesser d’augmenter au fil des années, notamment avec la mise sur le marché de nouvelles thérapeutiques », suscite à l’échelle mondiale une discussion « d’ordre scientifique, social, politique et éthique », avance la Dr Farah. « Cette question a d’ailleurs été au cœur d’une rencontre organisée en juin dernier à Sciences Po Bordeaux, en France, à laquelle j’avais pris part, note-t-elle. Elle était consacrée aux nouveaux développements thérapeutiques en oncologie pédiatrique et à la lutte contre les inégalités dans l’accès à ces traitements. »

Une rencontre d’autant plus importante que « ces traitements prometteurs peuvent changer l’histoire naturelle du cancer chez un patient », note la spécialiste, qui préside également Chance, une ONG dédiée à l’aide aux enfants souffrant de cancer. « Dans certains cas même, on peut avoir des rémissions, poursuit-elle. Bien qu’ils ne soient pas la solution à tous les cancers, ces traitements donnent un espoir et nous devons pouvoir les offrir aux patients. Au cours de cette journée, nous avons ainsi essayé de trouver un moyen de minimiser cette inégalité de l’accès aux soins en renforçant la coopération entre différentes associations à l’échelle internationale. Au Liban, il n’existe pas un programme national qui permet à ces enfants l’accès aux nouveaux traitements. Ce sont des initiatives personnelles qui sont entreprises dans ce cadre. Et il n’est pas toujours facile de les assurer. »


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Des causes génétiques
Le cancer reste la première cause de mortalité par maladie chez l’enfant. Chaque année, 35 000 nouveaux cas sont diagnostiqués en Europe, selon l’Organisation mondiale de la santé. Au Liban, selon le Registre national du cancer 2014, chaque année, près de 300 nouveaux cas de cancers pédiatriques sont détectés. « L’impact de la maladie sur les familles est important sur le plan émotionnel et financier, constate la Dr Farah. C’est à ce niveau qu’interviennent les ONG qui couvrent dans la mesure de leurs moyens les traitements et les examens des enfants et leur assurent un soutien psychologique ainsi qu’à leurs familles. Nous essayons aussi de leur assurer les nouveaux traitements. Néanmoins, ces initiatives restent isolées, menées à un niveau personnel, alors qu’il serait souhaitable d’avoir une politique nationale de santé qui permet aux enfants d’accéder aux traitements qui ne sont pas disponibles au Liban ou qui sont chers. »

Chez l’enfant, la leucémie reste la forme de cancer la plus fréquente, constituant plus du tiers des cas. La leucémie aiguë lymphoblastique est diagnostiquée dans plus de 80 %. « C’est aussi la forme qui répond le plus au traitement avec un taux de guérison frôlant les 85 %, indique la Dr Farah. La leucémie aiguë myéloblastique compte près de 20 % des cas. »

Les lymphomes constituent la deuxième forme de cancer la plus fréquente chez l’enfant, comptant près de 15 % des cas et un taux de guérison assez élevé (près de 95 % pour les lymphomes de type Hodgkin), suivis des tumeurs cérébrales. Le taux de guérison dans ce dernier cas dépend de la localisation de la tumeur, du stade auquel elle a été diagnostiquée et de sa pathologie.

« Chez l’enfant, les causes génétiques jouent un rôle important dans la survenue du cancer, souligne la Dr Farah. Cela ne signifie pas pour autant que tous les cancers de l’enfant sont héréditaires ou génétiques. En effet, dans de nombreux cas, on ignore la cause de la maladie. Dans le cas du Liban, on sait toutefois que les mariages consanguins, qui sont fréquents, favorisent les maladies récessives (maladies transmises par un gène défectueux chez les deux parents). Certaines personnes sont porteuses de gènes de cancer et les transmettent à leur descendance. On parle alors de cancers familiaux. Actuellement, j’étudie le cas de vingt-deux familles. Avec des équipes à l’étranger, nous essayons d’identifier les syndromes génétiques prédisposant au cancer. »

La Dr Farah souligne dans ce cadre que le syndrome le plus fréquent est celui de Li-Fraumeni. « Il s’agit d’une affection rare qui prédispose l’individu à diverses tumeurs, constate-t-elle. Ainsi, des cas de cancer sont détectés d’une génération à une autre dans une même famille et à chaque fois la maladie survient à un âge plus jeune. Il est important de diagnostiquer dans ces familles les syndromes génétiques prédisposant au cancer et d’identifier les membres qui sont porteurs de ces gènes en vue d’un dépistage précoce et potentiellement d’un traitement préventif ou ciblé. »
Et la Dr Farah de conclure en soulignant qu’en collaboration avec Chance, une campagne pour la détection précoce des cancers de l’enfant sera menée, « parce que tout comme chez l’adulte, plus le cancer est diagnostiqué à un stade précoce, plus l’enfant a des chances de battre sa maladie ».



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