God Bless America, cette invocation citoyenne répandue sur toutes les lèvres continue de louer les grâces octroyées par le pays à toutes les occasions, sportives, politiques ou patriotiques. Cet air, qui est devenu le chant patriotique des États-Unis, célèbre son centième anniversaire cette année. Dans une période de grande tension autour notamment du dossier de l’immigration, l’accent a été mis sur son origine. Et pour cause : God Bless America a été composé en 1918 par un… immigré russe, Irving Berlin (1888-1989), pour exprimer sa gratitude envers les États-unis où il a connu la célébrité après y avoir débarqué à l’âge de cinq ans. Il avait confié avoir entendu pour la première fois l’expression « God bless America » dans la bouche de sa mère qui la répétait souvent avec exaltation, malgré l’état de pauvreté de la famille à son arrivée sur le sol américain en 1893. La fille aînée du compositeur, Mary Ellin Barrett, expliquait plus tard qu’il croyait ferme en chaque mot qu’il avait écrit. Notamment lorsqu’il a dit : « God bless America, land that I love/From the mountains to the prairies/God bless America, my home sweet home » (« Que Dieu bénisse l’Amérique, cette terre que j’aime/Des montagnes aux prairies/Que Dieu bénisse l’Amérique, mon doux chez-moi »). C’était sa façon à lui, l’immigré, de remercier son pays d’accueil. Il l’a également fait pour le remercier de lui avoir accordé la citoyenneté américaine en 1918. Dans ce même esprit, il avait décidé d’accomplir son service militaire alors que sa carrière musicale connaissait un essor considérable.
Un grand nom de la musique US
God Bless America qui, à l’origine, avait été écrit pour une comédie musicale sans être utilisé, a été mis en veilleuse puis ressuscité en 1938. Ce chant ressemblait alors à un appel à la tolérance face à la montée du nazisme en Europe. D’autant que son auteur était l’illustration même d’une fabuleuse success story basée sur l’acceptation de l’autre.
Irving Berlin, considéré comme l’un des plus grands compositeurs américains de l’histoire de la musique, a reçu de nombreuses récompenses tout au long de sa carrière. Sa popularité s’explique par le fait qu’il s’était imprégné de l’américanisme pur. Autodidacte, ne sachant ni lire ni écrire, ce parolier et compositeur avait produit des chansons simples, directes, afin, selon ses dires, « de toucher le cœur de l’Américain moyen » en qui il voyait « l’âme réelle du pays ». L’une des grandes voix du journalisme américain, Walter Cronkite, l’avait ainsi salué lors de la célébration du centenaire de sa naissance, en 1988 : « Il a aidé à écrire l’histoire de ce pays, captant le meilleur de ce que nous sommes et les rêves qui ont formé nos vies. » À 23 ans, il était déjà célèbre avec plus de 200 chansons à succès à son actif. Des centaines d’autres allaient suivre, comme Top Hat, Cheek to Cheek ou encore There’s no Business Like Show Business.
Un « White Christmas » indémodable
Berlin a composé des centaines de chansons, dont une grande partie sont devenues des hits, une vingtaine de comédies musicales pour Broadway et les bandes originales de 15 films hollywoodiens dont les chansons ont été huit fois nominées pour les Academy Awards. L’un de ces films intitulé This is the Army avait notamment pour protagoniste le futur président américain Ronald Reagan. Son répertoire, devenu des plus populaires, comptait, entre autres, l’iconique chant de Noël White Christmas. Le single le plus vendu dans l’histoire du disque s’est retrouvé 25 fois au top des hit-parades, repris par les plus grandes stars du monde : Louis Armstrong, Frank Sinatra, Dean Martin, Lady Gaga et Christina Aguilera, en passant par Elvis Presley, Judy Garland, Barbra Streisand, Rosemary Clooney, Cher, Diana Ross, Bing Crosby, Rita Reys, Nat King Cole, Billie Holiday, Doris Day, Jerry Garcia, Willie Nelson, Bob Dylan, Ella Fitzgerald et Harry Connick Jr.
Outre son talent, Berlin séduisait avec un optimisme à toute épreuve. « Quand je suis soucieux et que je ne peux pas dormir, avait-il dit, je compte mes grâces et non les moutons. » Ou encore : « Les choses qui comptent vraiment sont celles que l’argent ne peut pas acheter. Alors, prenons un autre café et une autre part de tarte. »
Durant les années 60, God Bless America est devenu un refrain caméléon qui a véhiculé des messages différents et diversifiés, devenant le symbole de l’inclusion des immigrés. Ce qui porte de nombreuses personnes à penser que God Bless America est l’hymne national des États-Unis, alors qu’en fait, c’est The Star-Spangled Banner qui l’est.
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13 h 31, le 03 août 2018