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Lifestyle - This is America

Le papier découpé se taille une place au musée

Deux couleurs, le noir et le blanc, et une paire de ciseaux sortent les silhouettes de l’ombre...

Une installation de 5 mètres de haut signée Kristi Malakoff (2009). Photo National Portrait Gallery

L’un des plus plus grands musées des États-Unis, la National Portrait Gallery, a choisi de porter toute son attention et celle de ses visiteurs sur un art longtemps demeuré dans l’ombre à travers une exposition baptisée Black Out : Silhouettes, Now and Then. Les silhouettes, c’est ce mode de représentation très ancien qui consiste à « croquer » des personnages en papier découpé. Le musée a voulu ainsi rendre hommage à cette forme d’expression obtenue par de simples coups de ciseaux et qui n’avait jamais été placée au-devant de la scène artistique. Dans cet esprit, il a exposé plus d’une cinquantaine d’œuvres révélant, selon la curatrice de l’exposition, Asma Naeem, « ses riches racines historiques et sa puissante présence contemporaine ». « Bien avant l’avènement de la photographie, en 1893, poursuit-t-elle, les silhouettes avaient démocratisé l’art du portrait, offrant la ressemblance demandée à très bas prix. Contre un portrait à l’huile, en 1800, pour 100 dollars et plus, 25 cents suffisaient pour obtenir quatre silhouettes ». Ces talentueux coups de ciseaux et du papier bon marché, à la place du canevas et des tubes de couleurs, avaient permis de croquer de nombreux chefs d’État et leurs subalternes, de même que des inconnus et jusqu’à des esclaves, mais aussi de nombreux anonymes.

Un certain visage caché de l’histoire

Ainsi, un portrait faisant partie de la section « Hier » de l’exposition a attiré l’attention générale : celui d’un couple de femmes, Sylvia Drake et Charity Brya, ayant, chose rare, vécu ensemble dans le Vermont des années 1840. Leurs profils respectifs sont liés par une fine natte de vrais cheveux formant un cœur. Ce serait, très probablement, la première évocation picturale d’un couple du même sexe. « Pouvez-vous imaginer qu’une peinture à l’huile de l’époque ait pu portraiturer ces deux femmes ? » fait remarquer la curatrice, Mme Naeem, ajoutant : « L’art de la silhouette a permis de raconter aisément ce genre d’histoires et de rappeler que des personnes appartenant à tous les milieux sociaux et toutes les orientations sexuelles ont toujours fait partie de ce pays. »
On apprend également que la pratique des silhouettes remonte aux années 1680, quand des membres de familles royales offraient leurs profils à la postérité. Plus tard, l’intérêt pour l’art du découpage a grandi avec la montée de la pseudoscience de la physionomie qui clamait que le caractère moral d’une personne pouvait être discerné par la simple forme du front, de l’angle du nez ou de la manière dont le menton est placé par rapport au visage. Ce qui a poussé tout un chacun à vouloir savoir ce que les physionomies cachaient, menant à ce que l’on appelle aujourd’hui un profil racial. Cette idée implique que les gens qui ont une certaine apparence ont un comportement qui en découle de toute évidence.

Les silhouettes ne sont pas restées figées dans l’histoire. Toujours en noir, sur fond blanc, elles ont, néanmoins, pris des traits et des caractères contemporains, notamment avec les ciseaux de quatre artistes actuels qui ont revisité ce style. La section « Aujourd’hui » de l’exposition dévoile leurs visions à travers des installations. Deux fresques panoramiques, signées Kara Walker, content des scènes de la vie dans les plantations ; Camille Utterback utilise le codage et un logiciel pour créer un mouvement interactif afin d’accentuer la présence physique des gens dans cet âge de la virtualité ; Kumi Yamashita a sculpté ombres et lumières pour obtenir des profils en médias mixtes ; avec Kristi Malakoff, c’est l’appropriation tridimensionnelle de vingt silhouettes enfantines que l’on découvre taillées en grandeur nature, et qu’elle fait danser autour d’un mât enrubanné haut de cinq mètres.

« Les visiteurs viennent à la Portrait Gallery pour y découvrir des sommités ainsi que des personnes qui ont contribué d’une manière significative à l’histoire et à la culture américaines, conclut la curatrice. Mais cela ne révèle pas toute l’histoire de l’Amérique. L’art du découpage du papier, dont le musée possède l’une des plus grandes collections accessibles à tous, en illustre un certain visage encore caché. » Qui, de plus, vient de se tailler une place officielle au musée.


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