Plus de deux mois après la désignation de Saad Hariri pour former le prochain gouvernement, le processus continue de buter sur plusieurs nœuds, principalement liés à la représentation des druzes, des chrétiens et des sunnites ne gravitant pas dans l’orbite du Futur. Nombreux sont ceux qui imputent la responsabilité des entraves principalement au chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil. Mais d’autres pointent plutôt le Hezbollah et reprochent au président de la République, Michel Aoun, d’assurer au parti chiite une légitimité chrétienne, voire étatique.
C’est ce point de vue que présente à L’Orient-Le Jour Farès Souhaid, président du Rassemblement de Saydet el-Jabal et ancien député de Jbeil, connu pour sa farouche opposition tant au parti chiite qu’au pouvoir en place. « Michel Aoun se comporte comme un parfait allié du Hezbollah, dans la mesure où il assure à ce parti les garanties qu’il demande », souligne M. Souhaid, avant d’en conclure qu’il « n’est donc pas le président de tous les Libanais ». Commentant les accusations lancées contre Gebran Bassil d’entrave à la mise sur pied de l’équipe ministérielle, l’ancien député estime que le chef du CPL « fait le bonheur de tout le monde ». « Tous les protagonistes lui font des cadeaux. Le Premier ministre avait déclaré qu’il était son allié. Une façon pour lui d’éviter de se rapprocher du Hezbollah. Quant au leader des FL, Samir Geagea, il profite de l’opposition à laquelle se heurte le ministre des Affaires étrangères dans les milieux chrétiens pour renforcer son poids populaire », analyse-t-il. « Le Hezbollah a, lui aussi, besoin de M. Bassil pour exécuter un agenda iranien sans être en confrontation directe avec le Premier ministre. »
(Lire aussi : Entre Aoun et Hariri, les choses se compliquent à nouveau)
Dimension régionale
C’est à partir de ce constat que Farès Souhaid place les tractations gouvernementales dans un contexte régional plus large. Selon lui, « nous sommes confrontés à un obstacle majeur : il s’agit de l’agenda que la République islamique voudrait exécuter au Liban, après avoir obtenu ce que l’on pourrait appeler “deux polices d’assurances” : l’accession de Michel Aoun à la présidence de la République et une loi électorale qui lui a donné une victoire quasi totale lors des législatives du 6 mai dernier ». « L’Iran recherche donc une troisième police. C’est-à dire un gouvernement libanais qui défendrait ses intérêts », poursuit-il, rappelant que « Téhéran considère que la situation régionale lui est favorable. Il en veut pour preuve le maintien au pouvoir (du président syrien) Bachar el-Assad et sa position forte en Irak. Il voudrait donc consolider ses gains au moyen d’un cabinet qui lui serait favorable au Liban. » M. Souhaid semble toutefois conscient que Saad Hariri ne formera pas un tel cabinet. « Le Premier ministre désigné ne peut pas mettre sur pied un tel gouvernement parce que la communauté internationale a envoyé des messages clairs : Le Liban ne bénéficierait pas, dans ce cas, des aides approuvées lors des récentes conférences internationales (Rome le 15 mars, Paris le 6 avril et Bruxelles le 25 avril) », souligne le président de Saydet el-Jabal, notant, toutefois, que « la résistance politique a des limites dans un pays comme le Liban, qui risque de devenir un champ de bataille entre l’Iran et l’administration Trump ».
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LA LIBRE EXPRESSION
11 h 00, le 01 août 2018