Le Liban – mais aussi le monde entier – retient son souffle en attendant le sommet entre les présidents américain Donald Trump et russe Vladimir Poutine qui doit se tenir lundi à Helsinki. On dirait presque que le sort du monde dépend de cette rencontre qui a été minutieusement préparée par les conseillers des deux présidents. Toutefois, avec la personnalité qualifiée en général d’imprévisible de Donald Trump, les deux parties restent circonspectes et préfèrent ne pas donner d’indications précises sur les principaux dossiers qui seront évoqués. Selon des sources diplomatiques arabes au Liban, le président américain compterait proposer à son homologue russe de prendre totalement en charge le dossier syrien en contrepartie de son appui au fameux « deal du siècle » préparé par les Américains avec l’accord des Israéliens pour régler définitivement le conflit israélo-arabe.
Selon ces mêmes sources diplomatiques, tout ce qui se passe actuellement dans la région tourne autour de ce point central, qui est au cœur de la présidence de Donald Trump. Ce dernier veut ainsi en faire le point fort de son mandat et la grande réalisation que l’histoire retiendra. Trump s’est donc engagé auprès des Israéliens à régler le conflit qui les oppose aux Palestiniens, et toute sa politique étrangère repose sur cet objectif. Son ouverture sur les pays du Golfe s’inscrirait aussi dans ce cadre, d’abord pour leur soutirer de l’argent, Trump gérant les affaires des États-Unis en bon businessman qui ne donne rien gratuitement, ensuite pour les pousser à se rapprocher des Israéliens dans le but de combattre l’Iran. Même son hostilité déclarée à l’égard de l’Iran et les sanctions économiques de plus en plus dures que son administration a décidé d’imposer à ce pays seraient liées à la volonté américaine de faire pression sur la République islamique d’Iran pour deux raisons principales : d’abord la pousser à ne pas s’opposer au « deal du siècle » et en même temps la contraindre à arrêter son appui aux mouvements de résistance dans la région, en Palestine et au Liban en particulier, ensuite pour l’empêcher de continuer à développer des missiles balistiques, surtout qu’on peut leur faire porter une ogive nucléaire.
Le « deal du siècle » est donc la grande priorité de la politique étrangère américaine, et Donald Trump se fait fort de réussir là où tous ses prédécesseurs ont échoué depuis plusieurs décennies. Sa stratégie pour cela est simple : neutraliser l’Iran et, par conséquent, affaiblir l’axe dit de la résistance, contraindre les autres pays arabes à accepter l’idée du compromis et isoler totalement les Palestiniens au point qu’ils n’auront plus d’autre choix que d’accepter ce qui leur sera proposé, n’ayant plus de soutiens pour pouvoir résister.
En réalité, le président américain avait promis d’annoncer le contenu de son plan de paix en mai dernier, mais il a renoncé à le faire parce que le camp qui pourrait s’y opposer n’était pas encore suffisamment affaibli. Ce qui pourrait pousser les parties arabes qui évoluent dans l’orbite américaine à ne pas exprimer publiquement leur position.
Jusqu’à présent, les détails du plan ne sont donc pas connus, mais beaucoup de points ont été publiés par plusieurs centres de recherche américains. L’idée principale est de créer un État palestinien faible et dépourvu de souveraineté, divisé en deux parties, Gaza et la Cisjordanie, à peine reliées entre elles, avec toutefois un échange de terrains entre les Égyptiens, les Israéliens et les Palestiniens. La capitale de cet État serait Abou Dis à quelques kilomètres de Jérusalem qui, elle, serait reconnue par le monde entier comme la capitale de l’État d’Israël. Bien entendu, l’État palestinien conçu de cette manière ne pourra pas accueillir les Palestiniens de la diaspora qui devront rester dans les pays qui les ont accueillis...
Indépendamment des chances du président américain d’obtenir gain de cause et de faire appliquer son plan, les sources diplomatiques arabes au Liban estiment que tout ce qui se passe aujourd’hui s’inscrit dans le cadre de cet objectif, qu’il s’agisse de la volonté américaine de donner le dossier syrien au président russe, des pressions sur l’Iran ou encore du peu d’empressement à pousser les parties libanaises à former un gouvernement. Concernant le dossier syrien, les sources précitées précisent qu’en réalité, c’est un faux cadeau puisque la situation sur le terrain syrien a évolué dans le sens voulu par les Russes et leurs alliés, au point que les Américains ne disposent plus réellement de leviers pour inverser le rapport des forces. Maintenant, ce que souhaitent les Américains, c’est reconnaître leur échec en Syrie, moyennant un engagement russe à empêcher l’Iran et le Hezbollah d’y avoir une influence déterminante. Le plan américain serait le suivant : l’Iran se retire de la Syrie et doit faire face à une grave crise économique interne, le Hezbollah se retire de Syrie et s’enlise dans les problèmes internes libanais, notamment les affaires de corruption et la crise économique, et l’État libanais, affaibli, ne sera pas en mesure de s’opposer au plan de règlement du conflit israélo-arabe proposé par les Américains.
Si cette approche était vérifiée, elle pourrait expliquer (en partie) la lenteur dans la formation du gouvernement...
Liban - Décryptage
Une autre raison pour expliquer la lenteur du processus de formation du gouvernement...
OLJ / Par Scarlett HADDAD, le 13 juillet 2018 à 00h00
commentaires (4)
Toujours des analyses aussi pertinentes que concluantes reposant sur des faits puisés de la réalité sur le terrain . Certes beaucoup de lecteurs les approuvent sans toutefois trouver à les commenter en ligne . La preuve de la crédibilité de Scarlett Haddad est qu'elle est devenue une starlette sollicitée par toutes les chaînes locales .Et qui sait ,un jour, peut être par des chaînes étrangères . D'ailleurs on ne ne récolte que ce que l'on sème . Merci chère Scarlett pour tout ce que vous nous donnez à lire .
Hitti arlette
17 h 12, le 13 juillet 2018