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Moyen Orient et Monde - Offensive

Washington abandonne les rebelles dans le Sud syrien

L’administration américaine a averti l’ASL qu’elle n’interviendrait pas, alors que le régime syrien et Moscou bombardent la région.

Des combattants rebelles syriens conduisant un tank à Deraa, le 23 juin. Mohamad Abazeed/AFP

Alors que Damas et son parrain russe ont intensifié leur offensive la semaine dernière pour reprendre les provinces rebelles de Deraa et Soueida dans le Sud syrien, Washington a informé la direction de l’Armée syrienne libre qu’il n’interviendrait pas pour leur venir en aide dans la région. « Nous comprenons que vous devez prendre une décision (de combattre) basée sur vos intérêts, les intérêts de votre peuple et de votre groupe », insiste le message en arabe transmis hier à l’AFP par les rebelles. Cependant, « vous ne devez pas baser votre décision sur la supposition ou l’espoir d’une intervention militaire de notre part », précise le document. L’envoi du message n’a toutefois pas été confirmé par Washington.

Le timing de cette nouvelle information est d’autant plus critique pour les rebelles alors que, pas plus tard qu’hier, deux hôpitaux ont été endommagé et cinq civils tués dans des raids aériens contre plusieurs localités à l’est de Deraa, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme. L’ONG a rapporté que 24 civils ont été tués au total depuis mardi dernier dans des bombardements, tandis que Damas fait planer la menace d’une offensive terrestre. Bien que les rebelles ripostent par des tirs d’artillerie sur les régions progouvernementales et peuvent mettre en difficulté les forces du régime et de la Russie sur le terrain, le rapport de force laisse bien peu de chances aux insurgés de garder le contrôle de la région sans un appui américain. « C’est une zone plus facile à reprendre car le régime, malgré ses difficultés, peut bénéficier d’une percée territoriale jusqu’à la ville », explique à L’Orient-Le Jour Julien Théron, enseignant à Sciences Po Paris et spécialiste des relations internationales. « Les forces rebelles disposent d’un front assez uni, le front Sud, qu’il faut casser afin qu’il reste surtout des forces radicales », ajoute-t-il.

La lettre en provenance de Washington soulève donc certaines questions quant à un possible deal en coulisses entre les différentes puissances en présence. « Des négociations sont en cours entre différents acteurs », à savoir la Russie, la Syrie, les États-Unis et la Jordanie, précise à L’OLJ Joost Hiltermann, directeur du programme Moyen-Orient et Afrique à l’International Crisis Group. « Toutefois, aucun accord n’a encore été trouvé », précise-t-il. Selon les observateurs, Damas et Moscou, qui tentent de négocier depuis plusieurs mois un retour des troupes du régime dans le sud de la Syrie, pourraient offrir la garantie du retrait des supplétifs iraniens et du Hezbollah aux Américains et leurs alliés israéliens. Un argument de taille alors que ces derniers tentent par tous les moyens de les éloigner de leurs frontières quitte à intervenir à plusieurs reprises directement en Syrie contre les forces soutenues par Téhéran. En échange, les troupes du régime et du parrain russe auraient la voie libre pour lancer l’offensive et reprendre le contrôle de la zone.

Le message de Washington « sera sûrement vu par Damas comme un feu vert pour la reconquête du Sud », estime M. Théron. « Quant aux Russes, ils revendiquent la pertinence du processus d’Astana dans la sphère internationale, mais c’est ici soit un nouvel affront qui leur est fait par Damas qui joue davantage avec Téhéran sur le terrain, soit la démonstration d’un double discours du Kremlin avec la revendication d’un soutien à la désescalade sur la scène diplomatique, mais un soutien tactique aux offensives contre ces zones », observe-t-il.


(Lire aussi : Assad veut reprendre le nord de la Syrie par la force si nécessaire)


Priorité à l’Iran
Le Sud de la Syrie représente un double enjeu pour le régime et ses alliés. Le premier est symbolique alors que Deraa est le berceau de la révolution qui a débuté en 2011. Mater l’un des derniers bastions rebelles les plus importants affecterait positivement l’image du régime et lui permettrait de renforcer un peu plus son emprise sur le pays alors qu’il contrôle désormais plus de 60 % du territoire. Le second est stratégique grâce à l’emplacement de ces zones à la frontière avec la Jordanie et le plateau du Golan, dont une partie est annexée par Israël.

Pour les rebelles, cette mise en garde vient donc balayer tout espoir d’une possible aide américaine sur le terrain face au régime et ses alliés. Washington a pourtant menacé jeudi Damas et Moscou que toute violation de la zone de « désescalade » établie en 2017 selon un accord entre les États-Unis, la Russie et la Jordanie aurait de « sérieuses répercussions » et avait promis « des mesures fermes et appropriées ». L’étendue de l’avertissement semble bien limitée alors que, selon Reuters, le message transmis hier précise que le gouvernement américain « continue de conseiller aux Russes et au régime syrien de ne pas entreprendre des mesures militaires qui violent la zone ». Pour Washington, la priorité dans la région reste clairement l’Iran et la sécurité d’Israël.

Selon un commandant rebelle contacté par l’AFP et s’exprimant sous le couvert de l’anonymat, si la mise en retrait des États-Unis sur le dossier du Sud syrien a été pour la première fois officialisé, « nous savions de toute façon qu’ils n’allaient pas intervenir, nous ne sommes donc pas déçus ». Il a assuré que cette lettre n’est pas une réponse à un appel à l’aide de son camp.

« Les conséquences pour les rebelles sont assez catastrophiques », souligne M. Théron. « Les options sont maigres : soit trouver de nouveaux soutiens – scénario assez peu probable –, soit lutter jusqu’au bout, soit passer un accord de relocalisation, à l’instar de la Ghouta, par exemple, et donc rejoindre la galaxie des forces rebelles sous parapluie turc dans la zone Idleb-Afrine-Manbij », ajoute-t-il. Selon le spécialiste, cela « n’est pas sans conséquences sur leur avenir politique, stratégique et organisationnel ».



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commentaires (3)

La balance des forces en présence penche nettement en faveur de la Russie et de la Résistance. Venir en aide aux terroristes dans le Sud coûterait trop cher aux americains pour peu de bénéfices au niveau stratégique et même tactique. Les seules zones qu’ils sont réellement prêts à défendre sont celles où il y a du pétrole et ou sont positionnés les FDS, leurs positions à la frontière syro-iraquienne et enfin “israel”. Et même là rien ne leur garantie qu’ils seront en mesure de protéger ces zones sur le long terme

Chady

16 h 33, le 26 juin 2018

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Commentaires (3)

  • La balance des forces en présence penche nettement en faveur de la Russie et de la Résistance. Venir en aide aux terroristes dans le Sud coûterait trop cher aux americains pour peu de bénéfices au niveau stratégique et même tactique. Les seules zones qu’ils sont réellement prêts à défendre sont celles où il y a du pétrole et ou sont positionnés les FDS, leurs positions à la frontière syro-iraquienne et enfin “israel”. Et même là rien ne leur garantie qu’ils seront en mesure de protéger ces zones sur le long terme

    Chady

    16 h 33, le 26 juin 2018

  • EST-CE UNE DES CONCESSIONS... AUTRE QUE LE RETRAIT DES IRANIENS ET LEURS ACCESSOIRES... L,ACCEPTATION PAR LE REGIME SYRIEN DE L,ANNEXION DEFINITIVE DU GOLAN PAR ISRAEL ? LE SANDJAK D,ISKENDERUN EN EXEMPLE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 52, le 25 juin 2018

  • POUR DES CONCESSIONS ET DES GARANTIES OBTENUES EN FAVEUR D,ISRAEL ET DU DEPART DES IRANIENS ET DE LEURS ACCESSOIRES DE SYRIE LES AMERICAINS ABANDONNENT COMME D,HABITUDE LEURS ALLIES ! LA CONNIVENCE RUSSO AMERICAINE EST CLAIRE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 30, le 25 juin 2018

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