Les chiffres sont choquants : au moins une femme sur trois sur la planète a subi des violences physiques ou sexuelles, généralement de la part d’un membre de la famille ou d’un partenaire intime. Plus de 700 millions de femmes vivantes aujourd’hui ont été mariées étant des enfants. Jusqu’à 250 millions de femmes et de filles ont subi des mutilations génitales.
Bien que la violence à l’égard des femmes et des filles soit largement reconnue comme une pandémie mondiale, la réponse a été indifférente, sporadique ou inadéquate, avec une faible application des lois, l’impunité continue des auteurs et des ressources limitées pour résoudre le problème.
S’attaquer aux causes profondes
Mais il y a moins d’un an, quelque chose d’important a émergé : l’initiative Spotlight, un partenariat pluriannuel sans précédent entre l’Union européenne et les Nations unies, avec 500 millions d’euros de fonds de démarrage de l’UE. De portée mondiale, ciblée, cette initiative modifie la façon dont nous menons nos activités dans l’ensemble du système des Nations unies et entre les pays et les régions.
Nous reconnaissons que la violence contre les femmes et les filles est un phénomène complexe profondément ancré dans les relations de pouvoir inégales entre hommes et femmes et les normes sociales persistantes, pratiques et comportements discriminatoires à l’égard des femmes à la maison, au travail et dans la société. Plusieurs facteurs peuvent encore accroître le risque que les femmes et les filles soient confrontées à la violence, tels que leur appartenance ethnique, leur religion, leur âge, leur revenu, leur statut d’immigrant, leur handicap et leur orientation sexuelle. Les personnes les plus vulnérables à la violence sont très souvent celles dont la vie est menacée par d’autres moyens, par la pauvreté ou le manque d’accès à la santé ou à l’éducation. Ce sont souvent ceux que la société a oubliés. Ce sont aussi ceux que l’initiative Spotlight nous permettra de ne pas laisser pour compte, en cohérence avec le principe central des Objectifs de développement durable (ODD, adoptés par l’ONU en septembre 2015).
Jusqu’à présent, les investissements dans la prévention et les services essentiels pour les survivants de la violence et leurs familles ont été insuffisants ou inégaux à l’échelle nationale des pays. Nous savons que les solutions reposent sur le fait de travailler à plusieurs niveaux et d’amener des parties prenantes autour de la table. Nous devons avoir des conversations sur des sujets sensibles afin de s’attaquer aux causes profondes d’une telle violence et étendre les droits et les opportunités pour ceux qui ont été de tout temps exclus.
Depuis son lancement, l’initiative Spotlight travaille en étroite collaboration avec les pays d’Asie (programme Safe and Fair pour les travailleuses migrantes), l’Afrique – en mettant l’accent sur la violence sexuelle et sexiste et les pratiques néfastes – et l’Amérique latine, notamment sur le féminicide. Elle prévoit d’étendre ses activités au Pacifique et aux Caraïbes dans les mois à venir.
(Pour mémoire : « Girls for change » : une initiative libanaise pour les jeunes femmes vulnérables)
Diffuser la lumière
La phase de planification a été on ne peut plus inspirante : des fonctionnaires de plusieurs départements ont brisé les silos avec des partenaires internationaux de différents organismes des Nations unies et de l’UE, de la société civile et des militants qui sont généralement exclus des tables de décision et de conception de projets. Chaque programme de pays est dirigé par le coordonnateur régional des Nations unies, conformément aux derniers efforts de réforme de l’ONU pour rendre l’initiative plus collaborative, transparente et efficace.
Au Malawi, grâce à Spotlight, nous soutenons le dialogue sur les normes sociales discriminatoires, par exemple à travers le théâtre communautaire, en engageant les leaders traditionnels et les éducateurs à enseigner à leurs communautés comment bâtir des relations non violentes, respectueuses et équitables dès la petite enfance.
Au Mexique, nous formons des agents de santé pour identifier les signes précoces d’abus et prévenir la violence contre les femmes à travers des campagnes scolaires visant à sensibiliser le public aux stéréotypes sexistes et aux idées négatives sur la masculinité.
Au Niger, nous mobilisons des hommes et des garçons et renforçons la capacité des défenseurs des droits des femmes à plaider en faveur d’une réforme des politiques et à responsabiliser les décideurs. Au Niger, comme dans les sept autres pays africains, l’accent est mis sur la violence sexuelle et sexiste, les pratiques néfastes (comme le mariage des enfants et les mutilations génitales féminines) ainsi que les droits en matière de santé sexuelle et reproductive.
(Pour mémoire : Droits de la femme au Liban : HRW appelle les candidats aux législatives à mener cinq grandes réformes)
Au Zimbabwe, nous utilisons la radio et d’autres médias pour faire connaître la question. Pour s’assurer que les services sont accessibles à toutes les femmes et les filles, y compris les personnes handicapées, nous introduisons des mesures telles que des rampes d’accès dans les centres de services, des versions de documents d’information en langue des signes, en braille et audio.
Guidée par les principes communs des droits de l’homme, les avantages du multilatéralisme et les objectifs énoncés dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030, l’initiative Spotlight reflète un profond engagement à éliminer la violence sexiste dans le monde. L’initiative est un programme phare de réforme des Nations unies visant à incorporer de manière intégrée les ODD.
La violence contre les femmes a été ignorée ou gardée dans l’ombre pendant trop longtemps. Le nom même de l’initiative Spotlight illustre l’importance de mettre en lumière cette question afin qu’elle puisse être connue, traitée et éliminée. L’ONU et les pays partenaires sont disposés à diffuser cette lumière. Il est maintenant temps que tout le monde nous rejoigne.
Natalia Kanem , Secrétaire générale adjointe des Nations unies et directrice exécutive du Fonds des Nations unies pour la population.
Phumzile MLAMBO-NGCUKA , Secrétaire générale adjointe des Nations Unies et directrice exécutive d’ONU Femmes.
Achim Steiner , Administrateur du Programme de développement des Nations unies.
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