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À La Une - Terrorisme

Indignation internationale après une journée noire pour les journalistes afghans

"Cette tragédie nous rappelle le danger auquel nos équipes doivent sans cesse faire face sur le terrain et le rôle essentiel des journalistes pour la démocratie", selon le PDG de l'AFP.

Des proches du chef photographe de l'AFP à Kaboul, Shah Marai, lors de ces funérailles, le 30 avril 2018. AFP / POOL / Andrew Quilty

L'indignation était générale mardi au sein de la communauté internationale après la journée noire vécue lundi par la presse en Afghanistan, où dix journalistes ont été tués après avoir été "délibérément ciblés" selon l'ONU.

Un double attentat suicide revendiqué par le groupe jihadiste Etat islamique a frappé la capitale tôt lundi, faisant au moins 25 morts, dont neuf journalistes, parmi lesquels le chef photographe de l'AFP à Kaboul, Shah Marai, 41 ans. Un reporter afghan de la BBC a été abattu quelques heures plus tard à Khost (sud-est).

Après un premier attentat contre le siège des services de renseignement afghans, le NDS, un second kamikaze, portant une caméra, s'est fait exploser au milieu des journalistes venus couvrir l'attaque, selon la police. Selon Reporters sans frontières (RSF), il s'agit de l'attentat le plus mortel contre les médias depuis la chute des talibans en 2001. Des journalistes de Radio Free Europe, de la chaîne afghane Tolo News et de 1TV font partie des victimes.

Le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres a fait part de son "indignation" après le double attentat, qui a également fait 49 blessés. "Le ciblage délibéré de journalistes dans cette attaque souligne une fois de plus les risques que les professionnels des médias prennent en accomplissant leur travail essentiel", a-t-il affirmé.

Dans une troisième attaque, onze enfants ont été tués et seize personnes blessées, dont des militaires roumains et afghans, quand un autre kamikaze a fait exploser sa voiture piégée contre un convoi de l'Otan dans la province de Kandahar (Sud).

"C'est la normalité pour les gens qui ne peuvent pas l'emporter par les bulletins de vote. Alors ils utilisent des bombes", a commenté le secrétaire de la Défense américain Jim Mattis, en référence aux élections législatives devant se tenir en octobre en Afghanistan, avec trois ans de retard.

Le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo a également condamné des attaques "insensées et barbares". "Le dynamisme du paysage médiatique qui s'est développé en Afghanistan perdurera, en grande partie grâce à ces journalistes (...) morts tragiquement dans l'attaque, mais dont le travail courageux et loyal a permis de poser les fondations de médias florissants, résilients et indépendants en Afghanistan", a-t-il remarqué.

La BBC a confirmé que son reporter, Ahmad Shah, âgé de 29 ans, qui travaillait pour la chaîne depuis plus d'un an, a été abattu par des hommes armés non identifiés à Khost et que la police enquêtait sur leurs motivations.


Été sanglant
Ces attaques surviennent quelques jours après l'annonce d'une offensive de printemps par les talibans, rejetant tacitement une offre de pourparlers de paix formulée par le chef de l'Etat afghan Ashraf Ghani.

L'ONU doit adresser "un signal fort à la communauté internationale et aux protagonistes locaux en nommant un Représentant spécial pour la protection des journalistes", a déclaré le secrétaire général de RSF Christophe Deloire, dont l'organisation a recensé le décès de 34 journalistes en Afghanistan depuis 2016.

En 2016, sept employés de la chaîne de télévision Tolo avaient péri lors d'un attentat suicide revendiqué par les talibans. En novembre dernier, des hommes armés ont pris d'assaut la télévision privée Shamshad TV, faisant un mort.

Quelques heures après cette attaque, Shamshad reprenait toutefois ses retransmissions, l'un de ses présentateurs, les mains bandées, commentant l'assaut, tandis que son directeur affirmait, défiant : "ils ne peuvent pas nous réduire au silence".


(Pour mémoire : La douleur vire à la colère après un nouvel attentat-suicide à Kaboul)


Démocratie
Né à Kaboul en 1977, Shah Marai travaillait pour l'AFP dans la capitale afghane depuis 1996 et en était devenu un pilier. Grand gaillard mince aux yeux bleus très clairs, il avait largement contribué à la couverture des événements lorsque l'Afghanistan était sous le régime taliban ainsi qu'au moment de l'invasion américaine de 2001 et de tous les rebondissements qui ont suivi. Durant sa carrière à l'AFP, il a été battu et menacé par les talibans, et avait perdu plusieurs proches dans le conflit ravageant son pays, notamment son collègue et ami Sardar Ahmad, journaliste senior du bureau de Kaboul, abattu avec sa femme et deux de ses trois enfants lors d'une attaque revendiquée par les talibans en 2014. Marai, était père de six enfants, dont une petite fille née il y a deux semaines.
Il a été enterré lundi en fin de journée dans son village natale de la plaine de Chamali, au nord de Kaboul.

"Cette tragédie nous rappelle le danger auquel nos équipes doivent sans cesse faire face sur le terrain et le rôle essentiel des journalistes pour la démocratie", a réagi Fabrice Fries, le PDG de l'AFP.



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