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Moyen Orient et Monde - Analyse

Iran / Corée du Nord : les limites de la méthode Trump

La rencontre hier entre les deux leaders coréens à Panjumon dans la zone démilitarisée. Korea Summit Press Pool/Pool via Reuters

Pourquoi changer une méthode qui fonctionne ? C’est cette logique qui semble animer Donald Trump dans sa gestion du dossier du nucléaire iranien. Convaincu qu’il a réussi à faire céder la Corée du Nord et ainsi à lui faire renoncer à ses ambitions nucléaires, en accentuant la pression à son encontre et en la menaçant d’une intervention militaire, le président américain donne l’impression de vouloir reproduire la même recette avec l’Iran. En somme, faire avec l’un ce qu’il pense avoir réussi à faire avec l’autre selon un raisonnement assez sommaire qui consiste à penser que seule la menace est efficace avec ces « États voyous », tels qu’il les avait qualifiés à la tribune de l’ONU en septembre dernier.

La détente intercoréenne qui a donné lieu hier à une rencontre historique entre les deux leaders de la péninsule, qui ont promis de s’engager pour la paix, conforte Donald Trump dans l’idée qu’il a réussi son pari. Plusieurs arguments auraient pourtant de quoi tempérer l’optimisme du président américain, qui a déclaré hier « qu’il n’allait pas (se) faire avoir (par Kim) » tout en estimant qu’il y avait un réel « enthousiasme » côté nord-coréen de parvenir à un accord.

Que la rencontre entre les deux dirigeants coréens soit, en soi, une avancée positive est une évidence. Mais, d’une part, elle tient plus à la volonté du président sud-coréen Moon Jae-in de tendre la main à son voisin qu’aux outrances de Donald Trump qui qualifiait il n’y pas si longtemps que cela Kim Jong-un « d’homme-fusée » et, d’autre part, elle pourrait tout à fait rester sans lendemain.
Si cette rencontre a été possible, si Kim Jong-un a annoncé un moratoire sur les essais nucléaires et les tirs de missiles balistiques à longue portée, c’est avant tout parce qu’il a atteint son objectif principal : il va pouvoir négocier directement avec les Américains tout en ayant la bombe. C’est celle-ci qui lui permet de se retrouver, lui le leader d’un régime enclavé, en tête à tête avec l’homme le plus puissant du monde. C’est elle, encore, qui garantit à ses yeux la survie de son régime. Pourquoi accepterait-il alors de s’en séparer volontairement et de mettre son propre pouvoir en péril ? L’efficacité de la « méthode Trump » repose finalement exclusivement sur la bonne foi du leader nord-coréen. Autrement dit, il y a de quoi être sceptique.


(Pour mémoire : Fin des essais nucléaires : scepticisme après les annonces de Pyongyang)


Le parallèle entre les dossiers nord-coréen et iranien pourrait même se retourner contre Washington. Pyongyang et Téhéran doivent regarder avec attention la façon dont les États-Unis sont en train de gérer leurs cas respectifs. La sortie des États-Unis de l’accord nucléaire iranien, qui semble être acté sauf énième retournement de situation, ne devrait pas inciter la Corée du Nord à conclure un accord avec Washington. S’ils ne respectent pas le deal qu’ils ont passé avec l’Iran, pourquoi le respecteraient-ils avec moi ? pourrait penser, à juste titre, Kim Jong-un. La gestion américaine de ces deux dossiers devrait, au contraire, inciter Téhéran à essayer d’obtenir la bombe, perçue comme le seul moyen de se faire respecter par Washington.

Alors qu’il doit rencontrer Kim Jong-un dans les semaines à venir, le président américain devrait annoncer dans la même période sa décision de se retirer de l’accord nucléaire iranien. Pourrait s’ouvrir alors un jeu de poker menteur à trois entre les États-Unis, la Corée du Nord et l’Iran. S’il obtient satisfaction avec Pyongyang, Donald Trump concentrera probablement tous ses efforts sur Téhéran, qui sera plus que jamais dans la ligne de mire américaine. S’il n’obtient rien, il devra gérer en même temps deux crises face à deux régimes qui testeront la crédibilité des menaces du président américain. Quels risques ce dernier est-il prêt à prendre pour mettre l’Iran et la Corée du Nord au pas ? Washington fera certainement tout pour dissuader Téhéran d’acquérir la bombe. Mais une intervention militaire contre l’Iran, dans le contexte régional actuel, a toutes les chances d’allumer une poudrière sur plusieurs fronts. En matière de risque, une intervention contre la Corée du Nord, qui possède pour sa part la bombe, n’aurait toutefois pas grand-chose à lui envier.


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commentaires (4)

LES SANCTIONS ONT DONNE DU RESULTAT CHEZ LES DEUX !

LA LIBRE EXPRESSION

13 h 32, le 28 avril 2018

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Commentaires (4)

  • LES SANCTIONS ONT DONNE DU RESULTAT CHEZ LES DEUX !

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 32, le 28 avril 2018

  • C’est le coup de poing de Trump sur la table qui a fait bouger les choses, et non le printemps ni les athlètes des jeux de Seoul. L’encerclement et la pression diplomatique aussi . Les sanctions économiques c’est bien gentil, mais on l’a déjà vu ici et là, il ya toujours des âmes charitables prêtes à offrir leurs bons offices pour nourrir leur caisse et leur compte en banque. À méditer pour notre région.

    LeRougeEtLeNoir

    10 h 57, le 28 avril 2018

  • Excellente intelligente analyse. On est loin des chemas de l'épouvantail américain qui fait fuir les moineaux, si ça marche avec les pays soumis du golfe des bensaouds la mayo ne prendra pas avec ceux qui s'en tapent de l'impérialisme américano sioniste. Pour la Corée du Nord du COURAGEUX KIM Jong UN y a rien à dire le parapluie nucléaire fait son effet sur la grande GUEULE du clown déséquilibré mental , il ne restera plus qu'à l'Iran NPR de savoir faire comprendre à ce bouffon de quel bois d'ébène elle se chauffe. Ainsi vont les nations qui traverseront les siècles.

    FRIK-A-FRAK

    10 h 49, le 28 avril 2018

  • Ce sont les sanctions contre la coree du nord qui ont amadouees le dictateur sanguinaire KIM...la solution est la meme pour l Iran...asphyxier son economie afin qu elle rentre dans le rang...renoncement a son programme nucleaire et a son imperialisme mortifere pour le moyen orient.

    HABIBI FRANCAIS

    01 h 55, le 28 avril 2018

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