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Moyen Orient et Monde - Reportage

Savamment chorégraphié, le sommet intercoréen a quand même réservé des surprises

« Moon Jae-in a dit à Kim Jong-un : quand vais-je pouvoir visiter le Nord ? » Et le leader nord-coréen de répondre : « Pourquoi pas maintenant ? »

Rencontre historique entre les deux leaders coréens hier à Panmunjom. Korea Summit Press Pool/AFP

C’était la poignée de main historique que les Coréens attendaient depuis plus de dix ans. Elle a donné lieu à un ballet impromptu, les deux dirigeants effectuant des allers-retours qui ne figuraient pas au scénario sur la frontière intercoréenne. Le déroulé du sommet intercoréen avait été pourtant calibré au millimètre.
Mais le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un est sorti des clous quand il a invité le président sud-coréen Moon Jae-in à l’accompagner de son côté de la frontière. Les deux leaders s’étaient retrouvés sur la ligne de démarcation militaire (MDL) qui fait office de séparation entre les deux Corées, se serrant la main pendant près d’une demi-minute.
Tout sourire, le président Moon a alors invité son hôte à se rendre en Corée du Sud. Les deux hommes ont posé pour les photographes à l’occasion de ce moment historique où M. Kim est devenu le premier dirigeant nord-coréen à fouler le sol du Sud depuis la fin de la guerre de Corée (1950-53).
C’est alors que le maître de Pyongyang a proposé à M. Moon d’aller de l’autre côté. Le Sud-Coréen a semblé hésiter mais M. Kim ne s’en est pas laissé conter, lui saisissant la main pour franchir la bordure en béton matérialisant la frontière, où les deux hommes ont à nouveau échangé une poignée de main chaleureuse. Le porte-parole de la Maison Bleue, la présidence sud-coréenne, a expliqué ensuite comment ce moment avait pu se produire.

Oignons antiodeurs
 « M. Moon a dit à M. Kim : quand vais-je pouvoir visiter le Nord ? » Et le leader nord-coréen de répondre : « Pourquoi pas maintenant ? » a-t-il dit. Puis, larges sourires aux lèvres, ils sont repartis main dans la main au Sud, où ils ont reçu des fleurs des mains d’enfants habitant un village proche de la zone démilitarisée (DMZ) qui sépare les deux Corées.
Les Sud-Coréens avaient mené une répétition générale exhaustive la veille de cette rencontre où devait figurer en bonne place l’arsenal nucléaire nord-coréen, des figurants jouant même le rôle des deux leaders. « Nous avons étudié le moindre détail, y compris l’éclairage et les décorations florales », a expliqué un porte-parole de M. Moon. L’odeur flottant dans la pièce prévue pour la rencontre a même fait l’objet d’attentions particulières. « Des oignons et du charbon ont été répandus au sol, des ventilateurs tournant à plein régime pour absorber les odeurs de peinture neuve. » Les équipes de sécurité nord-coréennes ont procédé à leurs propres préparatifs, selon Séoul, stérilisant la chaise où M. Kim allait s’asseoir pour signer le livre d’or, l’essuyant avec un linge blanc.

Moments de gêne
La cérémonie d’accueil fourmillait de symboles. Les deux dirigeants ont marché sur un tapis rouge au milieu d’une haie d’honneur formée par des soldats sud-coréens en uniformes traditionnels hauts en couleur. Dans l’après-midi, ils ont encore symboliquement « planté » un arbre près de la MDL. Gantés de blanc, ils ont jeté quelques pelletées de terre sous ce pin vieux de 65 ans, comme l’armistice. Puis M. Moon l’a arrosé d’eau provenant du fleuve nord-coréen quand M. Kim faisait de même, mais avec de l’eau du fleuve sud-coréen Han.
Ils ont ensuite fait une longue promenade dans la zone démilitarisée, jusqu’à une plateforme de bois bleu surélevée où ils se sont entretenus à l’air libre sans aucun conseiller. Il y a eu quelques moments amusants, comme lorsque la sœur du dirigeant nord-coréen, Kim Jo-jong, et un autre membre de la délégation qui suivait les deux dirigeants se sont brusquement écartés en s’apercevant qu’ils étaient dans le champ des photographes.
Il y a eu aussi quelques moments de gêne, quand M. Kim a mis très longtemps pour signer le livre d’or, M. Moon ayant l’air de ne pas savoir où tourner son regard. La longue poignée de main échangée par les deux dirigeants tranche nettement avec ce qui s’était passé lors du sommet intercoréen de l’an 2000 entre le père du dirigeant actuel, Kim Jong-il, et le président sud-coréen de l’époque, Kim Dae-jung. Vigoureuse, elle n’en avait pas moins duré que cinq secondes. La version 2007 avait été encore plus mesurée, trois secondes et une main seulement, tandis que Kim Jong-il accueillait Roh Moo-hyun à Pyongyang. Depuis lors, le Nord a avancé à pas de géant dans ses ambitions nucléaires.
En 2017, Pyongyang a mené son essai nucléaire le plus puissant à ce jour et testé des missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) mettant à sa portée le territoire continental des États-Unis. Le Nord a parfois menacé de transformer Séoul et Washington en « mer de flammes » et de déchaîner sur eux « l’épée chérie » de son arsenal nucléaire. Mais l’image qui marquait les esprits hier, c’était celle des deux dirigeants franchissant la frontière main dans la main vers un sommet dont beaucoup espèrent qu’il annonce un avenir plus pacifique.

Richard CARTER/AFP

C’était la poignée de main historique que les Coréens attendaient depuis plus de dix ans. Elle a donné lieu à un ballet impromptu, les deux dirigeants effectuant des allers-retours qui ne figuraient pas au scénario sur la frontière intercoréenne. Le déroulé du sommet intercoréen avait été pourtant calibré au millimètre.Mais le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un est sorti des...

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